Chapitre 21 Luisa 2/2

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Je tourne en rond dans mon appartement depuis de longues minutes. Je suis bien trop empressée pour me poser sur un siège. Je ne cesse de penser à mon rendez-vous de demain soir. Que vais-je apprendre de nouveau sur mon insupportable voisin ? Et si Manu était en définitif comme tous les autres, muet ?

Non, je refuse de croire que tous les gens d'ici se laissent manipuler par Monteiro. Ce beau jeune homme n'a pas eu peur de mon voisin pour m'accoster, donc j'ai grand espoir en lui. Il faut qu'il parle !

N'arrivant plus à tenir en place, je prends la décision de prendre l'air. Le temps s'est dégagé. Le soleil a refait son apparition. J'arpente quelques rues par-ci, par-là, sans aucun but précis, jusqu'à épuisement.

— Bonjour ! dis-je toute fatiguée en entrant dans la pâtisserie, mais avec le sourire aux lèvres.

Hummm..., une belle odeur de chocolat me parcours les narines, j'en ai l'eau à la bouche, mais en voyant les têtes d'enterrement de Maria et de Carla, mon enthousiasme s'évanouit. Elles sont toutes les deux assises à une table avec un air tristounet.

— Que se passe t-il ? Fabio a encore fait des siennes ? les interrogé-je, tout en les rejoignant.

— Non Luisa ! Il n'a rien à voir avec ça, me répond Maria très embêtée, ce qui m'étonne.

Alors s'il n'est pas responsable, que se passe t-il ?

Rien de grave, j'espère ?

Ah non ! Elles ne vont tout de même pas altérer ma bonne humeur, pas aujourd'hui. Cependant, leurs mines défaites ne m'annoncent rien de bon. Elles commencent même, sérieusement, à m'inquiéter.

— Alors pourquoi vous faites cette tête là ? Quelqu'un est mort ?

— Ils vont devoir se passer de moi, me répond Carla avec les yeux humides.

— Non... Mais pourquoi ?

— Je n'ai plus les possibilités de lui payer son salaire, m'informe mon amie, responsable des lieux.

J'étais consciente que la boutique marchait au ralenti, mais de là, à devoir se séparer de Carla, j'étais loin de m'en douter. Pour moi, il ne s'agissait que d'une période creuse, avant l'apparition des premiers touristes pour les fêtes de fin d'année. Je ne pensais pas que c'était aussi critique. La pauvre !

— Je voyais bien que la boutique n'était pas très pleine mais...

— Un cappuccino ? me coupe Maria.

— Oui, merci !

Tandis qu'elle s'éloigne de la table pour aller me faire ma boisson. Je prends place à côté de Carla, puis lui prend sa main gauche que je serre entre les miennes. La malheureuse essaye en vain de retenir ses larmes.

— Eh ! On va trouver une solution, dis-je très émue de la voir ainsi.

— Comment ? Il n'y a pas d'issue. Je vais me retrouver au chômage, sans avenir, m'annonce t-elle dépitée.

J'empoigne l'autre de ses mimines et les serres toutes les deux tout en la rassurant.

— Mais non. Il doit forcément avoir un moyen de te garder ici.

Mais, cela ne semble pas fonctionner. Elle est dépitée. La jeune femme qu'elle est, paraît avoir pris dix ans de plus.

J'aimerais pouvoir l'aider, et lui dire ce qu'elle rêve d'entendre. Cependant, aucun remède miracle ne me vient dans l'immédiat. Toutefois, je ne baisse pas les bras pour autant.

— On a tout essayé ! m'informe Maria en me déposant ma tasse sur la table.

Je lâche les mains de mon amie, pour prendre le petit récipient devant moi. Je le lève jusqu'à mon visage et je hume la délicieuse odeur de mon café. J'adore ce parfum, un mélange de cacao sublimé par le magnifique nectar d'arabica des Amériques latines. Dommage, de ne pas avoir droit à cet élixir durant la soirée. Je suis persuadée que je serais bien plus performante dans mon travail avec ce délice pour compagnie.

— Tu veux une part de gâteau pour accompagner ton breuvage ?

— Oui ! Bien évidement, lui souris-je. Mais ça peut attendre. Assieds toi ! insisté-je auprès d'elle.

Une idée me saute subitement au nez. L'arôme de mon capuccino a décidément des effets insoupçonnés. Je ne sais pas si mon concept est réalisable mais je me lance :

— Et si vous ouvriez la nuit ? Jusqu'à minuit ou une heure du matin ? Je vous propose ça sans savoir si vous avez le droit...

Depuis mon arrivée dans ce pays, j'ai pu constater que les gens sortaient davantage à partir de vingt heures. Et le quartier dans lequel je vis, ne fait pas exception.

Il suffit de se mettre à la fenêtre de mon appartement pour le remarquer. Si en journée il y a beaucoup de monde qui visite le lieu, énormément de gens ne font que passer. Alors que le soir, ils sont plus enclins à s'installer et déguster un bon café ou une bonne bière entre amis.

Je suis certaine que ça pourrait fonctionner.

— Je ne me sens plus capable de tenir l'ouverture aussi tard à mon âge, proclame Maria.

Je ne pensais pas à elle pour le faire, mais à notre jeune recrue.

— Justement ! Carla pourrait travailler la nuit au lieu du matin ?

— N'y comptez même pas ! s'emballe l'autre abruti, qui pour une fois encore, se mêle de ce qui ne le regarde pas.

Et d'ailleurs, d'où il sort ? Je ne l'ai même pas vu entrer dans la pâtisserie. Il a vraiment le don d'apparaître quand il ne le faut pas. Ce n'est pas possible !

— Ah ! Vous préférez vous séparer de Carla, à ce que je vois ?

— Non ! Mais... pas de travail de nuit, insiste t-il très nerveusement.

Mais pour qui il se prend ? Il faut bien trouver des solutions. Et visiblement, il est loin d'en fournir. Alors pourquoi s'agite t-il ainsi ?

— Si vous avez une autre idée, dites le nous ? le provoqué-je.

Il me pose une part de gâteau au chocolat sur la table, et s'enfuit très contrarié en cuisine sans dire un mot. Pour le coup, je lui ai coupé son clapet. Ça fait un bien fou ! 





Publié le samedi 26 août 2023

Est-ce que ces deux là sauront se parler un jour sans monter sur leurs grands chevaux ? 

On se retrouve la semaine prochaine pour la suite ! 

Bonne fin de vacances ! 

L'appart du Troisième (nouvelle version)Where stories live. Discover now