Chapitre 4 Fabio 2/2

243 33 15
                                    

— Maman ! Il faut qu'on parle ? dis-je en entrant dans la boutique.

Elle est occupée à servir un habitué, ou devrais-je dire, le client le plus fidèle de la maison. Un bon monsieur d'un certain âge avec qui j'aime converser en règle générale. Mais actuellement, je préfère m'abstenir. Ma mère et lui ont décidé de se liguer contre moi. C'est à cause de ce personnage, que l'appart de ma sœur est de nouveau peuplé d'intrus, ou plus précisément d'une sublime intruse. Je ne vais pas le remercier pour cela. Je le salue brièvement avant d'insister du regard auprès de Mama qui visiblement n'est pas pressé de venir à ma rencontre.

— Attends un peu. Je finis de servir ce client et je suis toute à toi.

Je n'ai aucune envie d'attendre. La patience n'a jamais été mon fort, hormis dans mon travail, mais même dans cette discipline, elle a cessé de l'être.

— Carla peut le faire ! la pressé-je.

— Mais qu'est-ce qui t'arrive ? s'étonne t-elle de mon empressement.

Elle fait signe à Carla qui est notre jolie et jeune employée, mais pas du tout mon style de femme, puis elle se dirige vers la cuisine, où je la suis.

Ici, c'est mon chez moi, le seul endroit où je me sens bien, car quand je viens travailler, je ne pense plus à rien d'autre. Je me contente juste de faire ce qu'on attend de moi.

Lorsque je suis venu m'installer dans ce quartier, tout le monde m'a pris pour un fou, à commencer par mes parents. Ils ne croyaient pas en mes talents. Et très vite, ils se sont tous rendus compte qu'ils avaient eu tort, que j'avais un don pour créer de nouvelles saveurs. Même si aujourd'hui, mon flair semble m'avoir quitté. Je ne parviens plus à inventer de nouveaux produits. Tout ce que j'entreprends de neuf se termine irrémédiablement à la poubelle, donc j'ai décidé il y a peu d'arrêter le massacre et d'en terminer avec les créations. Je ne fabrique plus que ce que je sais faire et c'est déjà pas mal.

Cette cuisine, je l'ai conçue de façon à me faciliter le quotidien. Elle est toute en inox, avec trois grands fours professionnels et un immense plan de travail dans le centre de la pièce, deux grands frigidaires et un garde-manger, ainsi qu'une variété de robots de différentes fonctions. Je l'ai équipée telle une cuisine de grand pâtissier français.

Je m'accoste à l'immense planche en bois qui me sert d'atelier culinaire, tandis que ma mère reste près de l'entrée de mon antre, très impatiente d'en découdre avec moi. Je ne la fais plus attendre et vais droit au but.

— Elle ne peut pas rester ! attesté-je.

— Carla ? me questionne ma mère interloquée.

Par évidence, elle ne sait pas de qui je parle. Comment peut-elle penser un instant que j'ai envie de mettre notre seule recrue à la rue ? Elle me croit vraiment sans aucune compassion ? Ok ! Ce n'est pas une perle, elle est un peu gauche, mais elle reste très professionnelle et les clients l'apprécient. Alors, je ne vois zéro raison pour laquelle elle a pu penser qu'il s'agissait de cette fille.

Bref ! Revenons à mes moutons.

— Je te parle de la nouvelle du troisième, lui précisé-je.

— Luisa ? Elle est très charmante, tu ne trouves pas ?

Charmante ? N'est pas le mot adéquat pour la décrire. Affriolante serait plus approprié ou impertinente, exaspérante et extrêmement séduisante, sensuelle, une bombe atomique en puissance, voilà ce qu'est cette femme. Une bombe à retardement et quand elle explosera, je veux que ce soit en moi. Mais bon, là, je m'égare totalement.

L'appart du Troisième (nouvelle version)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant