Chapitre 37 Luisa 3/4

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C'est la cinquième robe que j'essaye, et je dois avouer que je ne me sens pas à l'aise avec. J'ai l'air d'un saucisson dedans. Elle fait ressortir toutes mes rondeurs. Comment j'ai pu un instant croire que ce bout de tissu tout serré pouvait me mettre en valeur ?

— Elle te va à merveille ! me complimente Carla.

Mais il faut préciser qu'elle ne m'est pas d'une grande aide. Elle trouve que tout me va à ravir. Alors que ce n'est pas du tout le cas ! Les cinq tenues essayées me saucissonnent de trop et me font constater que mes petits bourrelets disgracieux se sont transformés en garniture bien dodue pour des bêtes sauvages. Je suis condamnée à faire attention à ne pas trop m'égarer hors des sentiers battus sous peine d'être dévorée.

Je ne comprends pas comment, j'ai pu prendre autant de poids, en si peu de temps ? Si ! En réalité, je sais ! Ce sont les magnifiques et délicieuses pâtisseries englouties depuis mon arrivée dans ce pays.

— Regarde ! Elle fait ressortir ma bouée.

Je montre à Carla ma prépondérance en l'exagérant.

Elle en rigole la chipie.

Quant à moi, je suis exaspérée de ne trouver aucune robe à ma morphologie.

— Arrête ! Ce n'est rien ça ! Je donnerai tout pour avoir un corps comme le tien, avec des formes, me gronde t-elle de son fauteuil, dont elle admire le spectacle.

Il faut dire qu'elle n'arrête pas avec les éloges me concernant : tu as vu tes magnifiques fesses ; ta généreuse poitrine ; tous les mecs ne rêvent que de ça, de se trouver une femme avec tes attributs.

Alors que moi, je pense le contraire, les hommes sont plus attirés par les femmes comme Carla, longiligne, sublime, sans rondeur.

Et si elle savait comme j'ai raison ? Pas plus tard qu'avant hier, j'ai eu la désagréable expérience de constater à quel point les mecs ne rêvent que de belles filles élancées.

Je comprends mieux pourquoi je me suis faite jetée par mon insupportable voisin du dessous. Il n'a pas apprécié mon corps rondelet. Tant pis pour lui !

— Je vais en essayer une autre.

Je ne me démonte pas. Je vais bien finir par en trouver une qui me sied tout de même.

— Si ça continue, tu vas enfiler toute la boutique, m'informe t-elle un peu agacée et désemparée face à ma plus grande faiblesse, mon corps.

Depuis l'accident, je n'arrive pas à trouver, ce n'est-ce qu'une partie de moi satisfaisante. Chaque partie de mon anatomie a perdu de sa splendeur. Ce n'est pas que je me trouve moche. Non ! J'ai simplement la sensation de ne plus être la femme que j'étais. Tout me semble différent. Ma psychologue m'a dit que c'était dû au traumatisme, mais qu'avec le temps, j'apprendrais à me redécouvrir et à m'apprécier à nouveau. Ce qu'elle ne m'a pas dit en revanche, c'est que cela met un temps fou à revenir.

— Tu as autre chose de mieux à faire ? pesté-je de derrière le rideau.

— Oui ! Me trouver un bel étalon comme Manu, se met-elle à pouffer.

— Tu finiras pas le trouver l'homme de tes rêves, la rassuré-je en enfilant une énième robe.

Je sors de la cabine et le regard de Carla n'est pas très engageant.

— Tu ne vas pas choisir celle-là ? s'irrite t-elle.

— Au moins, on ne voit plus ce qui me gène, affirmé-je pas très convaincue.

— On ne voit rien, tu veux dire ! On est passé de la femme glamour, à une fille très ordinaire, tout comme moi, me réprimande t-elle en me faisant les grands yeux.

Ce vêtement est d'un tout autre style. Il me convient bien mieux que tous les autres essayés avant, même si ce n'est pas du tout vers quoi je me serais dirigée auparavant.

— Tu es méchante avec toi. Tu es une très belle fille ! tenté-je de lui redonner le sourire.

— Fille ! Voilà, le mot qui me décrit le mieux. Je n'ai pas le corps d'une femme, en conclue t-elle.

Je préférais avoir les courbes d'une adolescente de dix-huit ans que celles que je porte au quotidien.

— Tu es encore jeune ! Moi, je donnerais tout pour avoir ton âge. A vingt et un ans, on a encore toute la vie devant nous, alors que moi, je vois les années défiler sans pouvoir les arrêter.

Attention ! Je ne suis pas en train de dire que je suis vieille, c'est juste que j'ai l'impression d'avoir pris un coup de vieux avec ce qu'il m'est arrivé. J'ai les os et les muscles d'une jeune grand-mère, et non d'une petite trentenaire.

— Moi, j'échangerai bien ma jeunesse contre ton corps ! stipule t-elle.

Mais elle est vraiment inconsciente ! Comment peut-elle dire une chose pareille ?

— Tu es très bien comme tu es ! Tu n'as nullement besoin de ma bouée, lui précisé-je, en serrant ma robe à la taille.

— Change toi ! exige t-elle en changeant de conversation. La rouge t'allait à merveille !

— Non ! A mon âge, on ne peut pas mettre des vêtements aussi courts ! protesté-je. Elle cache à peine mes grosses fesses ! lui indiqué-je en secouant mon popotin.

Ce qui la fait rire et moi aussi.

— Je vous propose celle-ci ? Je pense qu'elle vous ira à ravir ! intervient une vendeuse avec une robe bleu marine.

Je crois qu'elle n'a jamais eu une cliente comme moi, si compliquée à satisfaire. Je suis désolée pour elle. Elle me supporte depuis plus d'une heure.

— Va pour la bleue ! dis-je en prenant la robe des mains de la jeune commerçante.

Puis, je disparais à nouveau derrière le rideau.

Lorsque je sors de la cabine, j'aime l'expression que je vois dans le regard de Carla, ainsi que celui de la vendeuse. Je me retourne face au miroir, et à l'unisson avec mes deux partenaires de shopping, nous exaltons :

— C'est celle-ci !

Cette robe a tout pour me plaire, la jupe est courte mais pas trop, elle met mon fessier en valeur tout en cachant ma ceinture abdominale et le décolleté suggère sans trop en dévoiler. Une tenue faite pour moi.




Publié le samedi 10 février 2024

On se retrouve pour la fin de ce chapitre demain matin. 

Bon week-end ! 

L'appart du Troisième (nouvelle version)Where stories live. Discover now