Aux voleurs!

2.1K 154 37
                                    

  - Lou?

  On frappa à la porte de ma chambre et quelqu'un entra d'un pas qui se voulait silencieux mais en vain: le parquet était bien trop vieux! Je souris et ouvris les yeux, je m'étirai et baillai longuement, la bouche grande ouverte.

- Mamie, il est quelle heure?

  Elle s'assit au bord de mon lit et m'embrassa sur les deux joues, une odeur semblable à de la verveine séchée emplissant mes narines.

- Il est assez tard pour que tu restes au lit plus longtemps! Allez ma grande, debout!

  Elle rit et s'éloigna avant de redescendre les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée. Voilà longtemps que je n'avais pas dormit ici, dans ma petite chambre, celle tout au fond du couloir. Cette pièce n'avait pas changé, il y avait toujours ce lit simple fait d'une literie plus que dépassée, ce lustre sur lequel étaient suspendues plusieurs petites figurines que j'aimais beaucoup, il y a dix ans. Ainsi que cette même commode en bois sombre, cachée sous une collection incroyable de peluches et de poupées et mes dessins bariolés étaient encore accrochés là, sur le mur d'en face, au plafond, sur la porte. J'aimais bien cette chambre.

  Je me levai et tins ma nuque, la précipitation le matin ne m'étais pas bien conseillée, j'eus quelques vertiges et repris mon rituel matinal: débarbouillage, habillage, coiffage.

- Et tes cours, comment ça se passe? Pas trop dur la Terminale?

  J'avalai ma dernière gorgée de café et souris à Papi Jo qui lisait le journal d'aujourd'hui.

- Ça va, pour l'instant!

  Il rit et fit glisser sa paire de lunettes sur le bout de son nez, me toisant au-dessus des verres.

- T'inquiète pas, gamine! T'as bien réussi ton bac de lettres, alors t'inquiète pas pour l'reste! T'vas voir!

  Je haussai les épaules et terminai de déjeuner, je m'apprêtai à quitter la cuisine lorsque Papi, s'adressant à Odette, ma grand-mère,  annonça quelque chose de singulier, très singulier.

- Au fait, Odette! Ils ont encore eu des vols à la ferme de ton cousin Hugues.

- Des bêtes?

  Je fronçai les sourcils, des vols? Dans une si petite commune?

- Non, juste leur viande, on a volé plus d'une dizaine de kilos, incroyable!

- En voilà quelque chose de drôle! Je passerai voir Hugues cet après-midi.

  Je remontai dans ma chambre et me munis de mon sac de cours ainsi que de mon ordinateur portable. Je m'installai au salon et me plongeai durant une bonne demi-heure sur mon devoir d'histoire, une tasse de café non-loin, Coussin le chat sur mes genoux.

                                                                                        ***

  - A tout à l'heure ma Lou! Et ne tombe pas de l'échelle! Si tu as besoin, tes médicaments sont sur le buffet. Papi est dans le jardin, si tu l'cherches.

  Je fis signe à Odette et après l'avoir vue disparaitre derrière la porte d'entrée je remontai à l'étage, tirai la corde pendante du plafond, ouvris la trappe et fis glisser l'échelle en bois qui permettait d'accéder au grenier. Le comble était spacieux, bien qu'il y est de nombreux cartons, il restait propre et entretenu. Selon la description de Mamie, les cartons à bouquins étaient situés à la droite de la trappe, cachés sous une pile de vieux vêtements.

  "Littérature Argumentative du 18e siècle", "Littérature Théâtrale du 17e siècle", "Les Nouvelles les plus Célèbres à travers le Monde", "Victor Hugo et le 19e siècle"... Parmi ces nombreux ouvrages, certains plus fictifs, d'autres plus substantiels, j'en sélectionnai une bonne dizaine et m'installai sous le velux qui dégageait assez de lumière pour ne pas allumer l'unique ampoule à l'illumination jaunâtre et commençai à feuilleter un exemplaire des "Contes Macabres". Le grenier plongé dans le silence, je ne tardai pas à pénétrer dans l'univers sinistre que dégageait ce livre.

- Hé! La grande! Où qu't'es?

  Je clignai des yeux et relevai le menton: il faisait presque nuit et j'étais toujours là, sous le velux, le ciel déjà gris ce matin était devenu beaucoup plus sombre et je pris compte de l'obscurité inquiétante dans laquelle baignait la pièce, je refermai mon bouquin et ramassai les autres, quittai le grenier et rejoignis mes grands-parents pour diner.

                                                                                        ***

- Alors? T'es allée voir ton cousin?

  Odette posa sa fourchette sur le bord de son assiette en un léger tintement métallique et joignit les mains avant de répondre à la question de Jo.

- Accablé! Pauvre cousin! Tant de travail, tant d'efforts! Il ne comprend pas, il ne comprend plus!

  À mon tour, je posai mes couverts et restai attentive à la conversation qui avait lieu:

- Et il ne lui manque pas d'argent, à Hugues?

  Mes grands-parents se turent et me regardèrent comme si je venais d'apparaitre, il est vrai que je ne parlais pas beaucoup lors des repas.

- Non, pas un rond! Rien! À croire que ces voleurs n'étaient que des vagabonds affamés, on pourrait presque croire qu'il s'agit d'animaux! Enfin... La police de la commune voisine s'en occupe, c'est c'que m'a dit Hugues.

  Je finis mon assiette sans en demander plus et terminai la soirée devant une émission historique supportée par ma grand-mère. J'allai me coucher, la tête pourtant monopolisée par une seule et même question: "Qui?"

  Merci d'avoir lu, à bientôt pour le second chapitre!

  Lucie Draw

Il était un automne... [Creepypastas]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora