Quand les hommes pleurent les chiens meurent

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- Attends-moi ! Attends-moi, j't'en prie !

- Dépêche-toi !

- FRED !

- Quoi ?

- Ma... Ma cheville, Fred... J'me la suis tordue...

La jeune fille, le visage rouge et les yeux larmoyants, s'appuya contre un arbre et releva son pied droit dont la partie supérieure commençait à virer dangereusement au bleu. Elle inspira puis expira profondément avant de se pencher pour défaire les lacets brûlés de ses tennis, mais la douleur lui fit perdre l'équilibre et elle s'effondra au sol, provoquant un bruit sourd qui alerta son ami.

- Axelle ? Tu... tu peux te relever ?

- Je... j'pense pas...

Le dénommé Fred releva la tête et plaça ses mains sur son bassin. Il lança un regard à droite puis à gauche comme s'il cherchait un panneau d'indication, mais il se ravisa rapidement et rapporta son attention sur son amie qui pleurait en silence. Sa cheville avait dû se casser, elle était bleue et enflait à vue d'œil.

- Axelle, donne-moi tes mains, je vais te porter !

La jeune fille ne se fit pas prier et lui tendit ses mains pleines de terre et couvertes d'égratignures. Fred la souleva un peu et en quelques secondes, il parvint à la mettre sur son dos, ses jambes autour de son bassin.

- ... 'suis 'ésolée...

Le garçon percevait encore les sanglots et les reniflements de son amie lorsqu'il s'enfonça dans un sous-bois plus sombre. Le sol, pentu, était recouvert d'épines. S'il poursuivait son chemin en suivant la pente, il tomberait forcément sur une route, ou un sentier.

- On va y arriver, Axelle... On va se sortir de là ! Hein ? Tu n'crois pas ?

Il attendit la réponse de son amie avec impatience, mais le silence qu'elle lui offrit l'inquiéta. Alors il s'arrêta et en profita pour se reprendre et souffler un peu tandis que la jeune fille sur son dos, silencieuse jusqu'à présent, grogna quelques mots submergés par les sanglots :

- Moi... 'en suis pas sure...

***

En plus de la douleur, la faible température extérieure n'aidait pas Timothy à se calmer. Plongé entre l'éveil et l'inconscience, le proxy se morfondait sans retenue alors qu'il était transporté par Splendorman, toujours plus silencieux. Ce dernier veillait à ce que le jeune homme reste en vie, seul le bruit de la neige qui crissait sous ses semelles perturbait l'atmosphère placide. Le chaos régnait et aussi étonnant soit-il, Splendorman espérait qu'il perdure encore un moment, afin de gagner du temps. Si les chasseurs ne se décidaient pas à relancer l'assaut tout de suite, il aurait le temps de mettre Tim à l'abri puis de revenir. En réalité, le trajet n'était pas un problème. La téléportation aidait bien.

Mais pourtant... il suffisait d'une ou deux secondes pour qu'un drame se produise.

- ... 'quoi... cet air... 'i... triste ?

Splendorman accorda son attention au corps immobile qu'il tenait entre ses tentacules et remarqua les yeux à demi ouverts de ce visage fiévreux.

- Qu'as-tu dis, Masky ?

Le garçon rassembla le peu de force qu'il gardait en lui et entrouvrit ses lèvres sèches, bleuies par le froid.

- Pou'quoi cet air... si tris' ?

Il se tut et poussa un profond soupir, comme si parler l'avait épuisé au point de s'endormir brusquement. Apeuré par le comportement soucieux du garçon, la créature posa l'extrémité de son tentacule sur son torse et son inquiétude retomba lorsqu'elle perçut les battements de son cœur qui s'avéraient être réguliers.

Il était un automne... [Creepypastas]Where stories live. Discover now