It's a very, very... mad world

701 69 35
                                    

Les draps blancs adhéraient à ma peau, se confondaient avec la pâleur de mon corps, jouaient de leurs ondulations pour me créer un cocon consolateur. J'étais allongée là depuis... Je ne savais plus vraiment. Une heure ? Une nuit entière ?

J'étais perdue et mon esprit me jouait des tours. Je perdais petit à petit la notion du temps, étions-nous le matin, l'après-midi ?

Le jour se levait-il ? Ou bien était-ce mon heure de rejoindre Morphée ?

Je guettais​ la levée du ciel gris au travers de mes carreaux battus par le vent, mais pour l'instant, un pâle voile incolore habillait le ciel sans nuages. Il devait être le matin.

Probablement, puisqu'il était déjà parti.

Me laissant encore une fois seule, dans mes draps moites, nue et sans chaleur.

Allongée sur le dos, quelques frissons ébranlant mes épaules, je fixais le plafond haut de la chambre aux allures royales, toute expression ayant quitté mon visage depuis longtemps. Je ramenai les draps jusqu'à mon menton, couvrant ma poitrine nue encore frissonnante de ses caresses. L'un de mes seins portait à sa naissance une tâche violacée qui ne s'estompait pas, restant ancrée dans ma peau. Je l'effleurai de mon index, comme ses lèvres quelques instants auparavant.

Douleur désirable. Je pensais et repensais à cette union inattendue et impensable, à ces heures suspendues dans le temps, à ce rêve éveillé désiré d'être vécu une nouvelle fois encore. Je haïssais Zalgo comme jamais je n'avais haïs personne.

Mais pouvais-je le désirer autant ?

                             ***

Un flocon. Il était bien en avance celui-là, et pourtant, rien ne l'empêcha de poursuivre sa chute sinueuse jusqu'au nez de Toby. L'hiver semblait en avance, le ciel se faisait plus sombre encore et l'air, plus froid. Le proxy, masqué de son bandeau ainsi que de ses lunettes polarisées, descendit d'une traite les marches de l'entrée du manoir et finit par tracer au milieu des hautes herbes du jardin, traversant une petite partie de la forêt, jusqu'à la « Petite Cabane en Bois ». Celle où personne n'allait.

La petite bicoque vieillissait mal : son toit cabossé manquait de tuiles, ses murs faits de planches étaient creusés par des fentes sans doute dues à la dilatation du bois, selon la température. Sans parler de la végétation qui l'envahissait de plus en plus, le lierre se faufilant sous le toit, sous la porte, rendant cette cabane plus antique que n'importe quel autre objet ici. Même la forêt semblait plus récente.

Toby, jouant de ses doigts pour créer une petite mélodie grâce à de simples claquements, entra d'une démarche nonchalante dans le squat. Ses pieds raclaient le sol poussiéreux, butaient contre de vieux cartons emplis de choses dont personne ne souhaiterait connaitre l'origine. Il fonça vers le fond et s'accroupit entre deux sacs poubelles couverts d'asticots grouillant çà et là, se régalant d'une masse putride s'échappant d'un trou béant formé dans le plastique noir. Là, il saisit une petite boite en plastique couverte de poussière et de copeaux de bois, il en souleva le couvercle et s'empara des quelques petits sachets qui se trouvaient au fond. Puis il rebroussa chemin et couru jusqu'au manoir, prenant soin de bien refermer la porte de la petite cabane.

Le vent commençait à souffler, quelques flocons tombaient par-ci par-là, et Toby courait encore, slalomant entre les arbres, sautant quelques souches, se laissant glisser le long de la pente d'un fossé. Il perdait haleine mais aperçut enfin la façade du manoir. Un sourire se dessina rapidement sur ses lèvres gercées, dissimulées par son cache. Lorsqu'il eut atteint le milieu du jardin laissé à l'abandon depuis longtemps, il sut que quelque chose n'allait pas.

Il était un automne... [Creepypastas]Where stories live. Discover now