Il était un automne... [Creepypastas]

Proxy?

La propriété était immense, tout comme la demeure d'ailleurs. Bien que les haies ne soient pas entretenues, la végétation apportait un charme particulier au domaine et personnellement, je m'en régalais. Toby, excité comme une puce, m'avait offert une visite des plus complètes des moindres recoins du jardin, sans oublier "le plus important", à savoir: la roseraie. Elle était située à l'arrière du manoir, sous une serre aux verres brisés. Elle n'était pas très imposante mais restait chargée et à ma grande stupéfaction, semblait être traitée avec le plus grand des soins! Il était très dur de se faufiler au travers des rosiers sans s'accrocher quelque part, mais la chaleur ambiante de la pièce et l'odeur enivrante des fleurs nous envoûtaient presque, nous incitant à rester. Nous étions en automne et pourtant, chaque rose restait ouverte, dévoilant son cœur généreux et son pourpre saisissant.

- C'est beau, hein?

Le nez fourré dans l'une des fleurs, je me retournai et souris à Toby. Oui, cette douce consolation était belle, en effet! Nous restâmes un moment, assis sur l'unique banc de la serre, chacun installé à une distance significative: un mètre de séparation, pas de familiarisation. Toby était, comme dit auparavant, très sympathique. Mais quelle idée de favoriser le contact avec l'un de mes kidnappeurs? Bien qu'il ne soit pas directement concerné. Le regard fixé sur un pétale tombé à mes pieds, je fus rappelée à l'ordre par la voix cassée de mon locuteur, nous allions rentrer.

- Au fait, tu n'as pas visité le manoir entièrement, n'est-ce pas?

Je fis non de la tête et me retrouvai une nouvelle fois entrainée dans le jardin, Toby me tirant toujours par le poignet, trottinant légèrement dans les hautes herbes. Nous remontâmes l'escalier principal, à l'extérieur, retournant dans le hall d'entrée au lustre impérial malheureusement enveloppé d'un manteau brunâtre de poussière et au sol dallé de noir et de blanc, couvert d'un tapis sombre, moelleux mais maculé d'auréoles suspectes.

- Le hall, enfin, tu l'as aperçu tout à l'heure! Mais là, tu peux l'examiner attentivement, c'est cool hein? Héhé...

Je gloussai à l'entente du ton enjoué qu'il avait pris, quelle joie de vivre! Pourtant, je stoppai mes gloussements lorsque Toby fut interpellé dans le hall par un "Hé, Toby!" Nous nous retournâmes en même temps et je fus surprise de retrouver face à moi, un homme masqué déjà aperçu.

- Hey! Masky! Alors, quoi d'beau? Tu vois, j'comptais faire visiter le manoir à Lou! Tu t'joins à nous?

Toby rit, quant au dénommé Masky, il se contenta simplement de hausser les épaules. Je préférai rester en arrière, sentant mon visage se crisper par la terreur: c'était cet homme qui m'avait amenée là, celui aperçut dans les bois, celui entendu sur le pas de ma porte, celui caché dans l'ombre de ma chambre. Une bouffée de chaleur m'envahit avant de laisser place à un frisson m'ébranlant quelque peu, je tentai de ne rien faire paraitre et serrai les poings, préférant maitriser ma panique.

- Slenderman nous a convoqués, Hoody, toi et moi. Maintenant!

Sa voix était rauque et autoritaire, je déglutis bruyamment et les deux individus se trouvant non loin de moi le remarquèrent. Toby se rapprocha de moi et m'indiqua son retour dans près d'une quinzaine de minutes, me conseillant de l'attendre là. Il sembla me sourire et suivit Masky qui s'engageait déjà dans l'un des nombreux corridors qui s'offraient à nous. En quelques secondes, je me retrouvai seule, perdue au milieu d'un hall emplit d'un silence de plomb, je m'assis sur l'une des marches de l'escalier menant à l'étage du dessus, mes bras encerclant mes genoux.
Je commençais à m'adosser nonchalamment contre la rambarde en fer forgé noir lorsqu'une mélodie chantonnée me surpris! Je me relevai immédiatement des marches et fis face au fredonnant qui s'avéra être en réalité, une jeune fille. Elle laissa échapper un "oh!" de surprise et descendit les quelques marches qui restaient entre elle et moi.

- Lou? C'est ça?

Sa voix douce vint apaiser le nœud constamment logé au sein de mon estomac, je la remerciai intérieurement et acquiesçai à l'entente de mon prénom.

- Tu es perdue?

Je niai et me rassis sur les marches, elle fit de même et sembla me détailler quelques instants avant de me tendre la main:

- Jane, Jane "The Killer".

Je frémis à l'entente de son nom mais saisis sa main aussi pâle que le masque qu'elle portait, tout comme le reste de sa peau, d'ailleurs. Jane resta là, paressant ne rien avoir à faire.

- Tu es la nouvelle?

Je haussai les sourcils et elle émit un gloussement, ses épaules couvertes de fines manches dentelées de noir s'élevant un peu.

- La nouvelle tueuse, tu veux dire?

Son gloussement devint un rire forcé, dénué de joie puis elle se tut, si soudainement, que même l'atmosphère détendu depuis quelques minutes seulement sembla s'alourdir brusquement.

- Une tueuse? Non, une Creepypasta plutôt! Ne confonds pas ces deux termes, il en serait mieux pour toi!

Elle se releva et lissa les plis de sa robe en velours sombre, réajusta son col montant couvrant la moindre parcelle de sa peau à l'aspect fantomatique et s'en alla sans dire un mot de plus... À moins que...

- Au fait, Lou! Je ne te souhaite pas la bienvenue, car si jadis, j'avais eu le choix, j'aurais préféré mourir.

La jeune fille s'éloigna rapidement, ses cheveux d'ébène se balançant légèrement dans son dos, et disparut à l'angle d'un couloir adjacent.

***

- Lou!

Telle une tornade, Toby se pointa devant moi non sans oublier les ravages auditifs qu'une supposée tornade pouvait causer.

- Ça va? T'es toute pâle! Tu veux un verre d'eau? T'as froid?

Je brandis la paume de mes mains face à lui, comme pour le stopper et lui assurai que oui, tout allait bien. Ou presque...

- Désolé du mini-minuscule-microscopique retard! C'est une réunion de proxies, donc ouais... Ça prend du temps, un peu!

- Une réunion de quoi?

La dernière fois que j'avais entendu le mot "proxy" remontait à il y a bien une semaine, voire plus, lorsque Odette avait souhaité se rendre à l'épicerie du coin. Mamie Odette... Ma mamie Odette.

- De proxies! Slender t'a pas expliqué?

Je secouai légèrement la tête afin de chasser le blues qui menaçait de me faire éclater en sanglot et raccordait mon attention à Toby et son terme de "proxy".

- Masky, Hoody ou moi sommes des proxies! On est un peu comme les assistants de Slenderman, ses bras droits! Ou plutôt, ses tentacules droits, ahah! Et plusieurs fois par semaine, on est obligé de participer à des réunions, entre nous quatre seulement! Histoire de faire un compte rendu de nos missions, c'est cool hein?

"Cool", il serait ironique de le penser. Non, ça n'était pas "cool". Je me contentai d'acquiescer et le remerciai de son instruction. Toby me saisit une nouvelle fois par le poignet et entama sa visite, s'arrêtant tout de même au beau milieu d'un couloir:

- Le diner s'ra aux alentours de dix-neuf heures, le mieux pour tout savoir, ce s'rait qu'tu t'joignes à nous, hein?

Oui, bien sur... Évidemment.

Merci d'avoir lu! À très bientôt!

Lucie Draw

(mini) PS: je ne doute pas qu'il y est parmi mes lecteurs, quelques fans d'un certain "The Killer", mais patience, patience, une célébrité se fait toujours attendre! Sur ce bonne journée!