Le tic en cage ou la chute d'un coeur battant

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Tout autour de moi, dansaient les arbres, les feuilles, l'herbe se mouvait en un ballet de vagues verdoyantes, les fleurs s'agitaient, et les roses noires m'entouraient par milliers. Le ciel, bleu cette fois-ci, m'aveuglait. Pas l'ombre d'un nuage, ni d'une goutte de pluie. Le vent me chantait de poursuivre mon chemin, de marcher encore et encore, et encore, encore, encore et encore...

Au loin, la colline, au loin, l'avenir, le pas prochain, la marche suivante. Le futur. Au loin, un au-delà acceptable, une utopie jouissive. Je fis un pas, un autre, et un autre encore. La plante de mes pieds foulait le sol, mes cheveux se balançaient dans mon dos, s'entremêlant, dansant, jouant de leurs ondulations pour laisser à penser que je prendrais enfin mon envol.

Il était temps.

Et je courais, courais, courais... Sans m'arrêter, sans rencontrer ni obstacle, ni épine à mon pied ! Pas de piège, ni de guet-apens !

- Lou ?

L'avais-je entendue ?

- Lou, c'est moi !

Impossible.

- Lou, m'entends-tu ?

Laisse-moi.

- Lou, pourquoi t'enfuis-tu ?

Je ne m'enfuis pas. Laisse-moi. Va-t'en !

- Ne m'abandonne pas, Lou !

Le vent était tombé. Depuis son appel, la prairie s'était laissée mourir. A terre, mes pieds saignaient d'avoir trop frappé le sol devenu épineux, mes yeux pleuraient d'être restés ouverts trop longtemps, mon cœur saignait d'avoir battu trop rapidement, mes poumons sifflaient d'épuisement. Je me tournais vers elle, mégère de mon bonheur, bourreau de mon envol.

Elle aussi, elle ne me laisserait pas.

- Je veux aller là-bas ! Et personne ne m'en empêchera.

De mon index, je pointai le au-loin. Et elle se mit à rire, fort, très fort, si fort que mes tympans se crevèrent. Soit ! Je n'entendais plus.

Je perçus ses lèvres remuer, son regard hautain me toisant, elle s'avança de quelques pas tout en continuant un discours que je n'arrivais à définir. Je fronçai les sourcils, comment quelqu'un pouvait-il l'apprécier ?

« Toi, tu l'aimes bien ! »

« N'importe quoi ! Cette fille est un amas d'emmerdes ! »

« Elle n'y est pour rien ! »

« Si, sa naïveté et sa frousse ont eu raison d'elle ! »

Conscience, assez de tes plaintes !

Mademoiselle semblait ne plus rien avoir à dire, elle affichait un rictus narquois qui ne lui ressemblait pas vraiment. Et à mon plus grand malheur, elle osa prendre mes mains entre les siennes. Je vis ses cheveux roux voleter un peu, le vent était revenu. Je vis ses yeux bruns pétiller, le soleil s'était levé. A mon oreille, un bourdonnement, un sifflement, un écoulement et enfin... Un hurlement.

Le mien.

Je la vis, arborant encore ce rictus sadique. Sa chevelure folle et rebelle encadrant son visage qui m'appartenait. Elle m'avait tout pris ! Et n'avait laissé qu'un restant de moi-même, sur cette colline, un restant qui m'habitait et qui bientôt, s'écraserait au fond d'un gouffre obscur.

Je la vis, agitant sa main en un « au-revoir ».

Je me laissais aller dans ma chute, me demandant si elle en était bel et bien responsable.

Il était un automne... [Creepypastas]Donde viven las historias. Descúbrelo ahora