Partie 3

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   Camila

Quelques gorgées de café mêlées à quelques bouffées d'air marin me redonnent immédiatement de l'énergie. Le spectacle de l'océan me fascine. Je pourrais rester des heures ainsi, à scruter la surface, à observer les différents bateaux, avec l'espoir de voir surgir le dos noir d'une baleine. C'est aussi parce que la mer a cet étrange pouvoir sur moi que je veux intégrer un cursus en biologie marine.

Terminer le lycée tout en m'occupant de ma mère n'a pas été facile et ne m'a pas laissé le temps de postuler auprès d'universités. Cette année est donc une année blanche. Mais dès la rentrée, j'ai bien l'intention de me trouver un petit boulot pour ne pas dépendre complètement de mon père et Clara. Et dès à présent, je prépare des dossiers de candidature dans des universités et des instituts de biologie marine. Australie, Amérique, canada, et même le Japon, j'ai postulé dans le monde entier. J'ai envie de voyager, et je sais que ma mère m'aurait encouragée à le faire. Elle a toujours regretté que nous n'ayons pas pu voyager pour de vrai, faute de moyens.

J'entre dans le salon par une des baies toujours ouvertes, attrape mon ordinateur portable et m'installe dans le grand canapé qui fait face à l'océan. La vue est splendide. Cet endroit est l'un de mes spots préférés de cette maison.

Sue l'écran de mon ordinateur apparaît l'image d'une baleine à bosse que j'ai eu la chance de croiser lors d'une sortie en mer offerte par ma mère, à mon dernier anniversaire. Je salue mentalement le cétacé puis clique sur le fichier « Ecosse ».

L'institut océanographique écossais est l'un des plus prestigieux établissements auprès desquels je souhaite postuler. Malheureusement, je ne suis pas la seule à en rêver... Les candidats sont nombreux. J'ai passé plusieurs jours à peaufiner mon dossier pour mettre toutes les chances de mon côté, mais je sais que la sélection est drastique.

Après avoir relu une dernière fois la lettre de motivation qui accompagne ma candidature, je rédige un mail d'accompagnement puis, le cœur battant, j'appuie enfin sur « Envoyer ».

En relisant la plaquette de présentation, je songe un instant à ce que pourrait être ma vie au sein de cette université – complètement géniale. Rapidement cependant, je reviens à la réalité. Un autre obstacle se dresse entre mon rêve et moi : l'argent...

Ma mère m'avait ouvert un compte et elle y mettait de l'argent de côté pour mes études. Seulement, elle avait du mal à boucler les fins de mois, et malgré tous ses efforts, il ne lui restait pas toujours de quoi économiser. « Les petits ruisseaux ne font jamais de très grandes rivières », soupirait-elle souvent, comme pour s'excuser.

J'ai tourné les chiffres dans tous les sens, recompté mille fois ce que j'avais sur mon compte en banque – pas grand-chose – y ai ajouté ce que je pourrais gagner en travaillant toute une année – pas grand-chose non plus. J'arrive toujours au même résultat : pas assez pour payer l'université.

Alejandro m'a assuré qu'ils veilleraient à ce que je puisse faire des études. Je lui en suis infiniment reconnaissante, mais je suis embarrassée de dépendre de ma « nouvelle famille » pour cela. Et j'aimerais m'en sortir seule. Ce ne sera pas facile, je le sais, mais j'y arriverai. Je le sens. Et, surtout, je vais tout faire pour.

Quoi qu'il arrive, je trouverai mon chemin.

Mon téléphone me tire de mes réflexions, annonçant un message... de Dinah ! Ça, c'est un signe du destin ! Dinah est une force de la nature, et son amitié m'est indispensable. Le simple fait de lire son prénom sur l'écran de mon téléphone me donne le sourire.

« La moyenne est basse. Elle ne dépasse pas 3/10. »

J'éclate de rire. Il est 11h40 dans la havane, 8h40 à Los Angeles. Dinah a débuté son premier jour de travail comme serveuse dans un bar de page ultra-select, le Blue Sky, il y a dix minutes et elle m'envoie déjà son évaluation de ses collègues et des vacanciers. Au départ, nous avions prévu de travailler sur la plage, toutes les deux, mais mon départ chez les Cabello à tout remis en cause.

« Aurais-tu fais le mauvais choix ? »

Deux bars avaient accepté sa candidature comme serveuse pour l'été. Après une étude minutieuse de la fréquentation masculine des terrasses et de la constitution des équipes, elle avait conclu que l'équipe du Blue Sky était composé d'une solide moyenne de beaux mecs qui compensaient la fréquentation, estimée très moyenne, de la terrasse. Manifestement, elle s'est trompée.

« Les équipes ont tourné ! J'aurais dû choisir le Royal, l'équipe a changé, chez eux aussi, et on dirait qu'ils ont recruté leurs serveurs directement dans une agence de mannequins. J'envisage la démission pour tromperie sur la marchandise. »

Tout en pouffant, je décide de jouer les philosophes.

« Méfie-toi, Dinah, le mec est toujours plus musclé sur la terrasse du voisin... »

La réponse à mon vers pleins de sarcasme ne se fait pas attendre.

« Merci Socrate, le conseil est précieux. A propos de beaux mecs, tu en as vu, toi ? »

Je réponds du tac au tac.

« J'espère plutôt voir des baleines... »

« Ne me dis pas que tu n'es pas encore allé à la plage de Cuba ! Les plus beaux spécimens de surfeurs s'y rassemblent chaque été et tu m'as promis de m'envoyer des photos ! »

« Ce n'est pas vraiment la bonne période pour surfer, ici. »

- Encore en pyjama, Camila ? S'étonna Clara en jetant un œil à sa montre.

Je me lève d'un bond. Je ne perçois pas l'ombre d'un reproche dans sa voix. Je crois surtout qu'elle craint que mon père ne me croise dans cette tenue.

- Dépêche-toi d'aller te préparer ! On déjeune dès que la femme de ménage sera passée. Elle doit mettre en ordre ta chambre !

Elle regarde une nouvelle fois sa montre.

Encore un truc que je ne voyais pas quand je vivais avec ma mère.

- Enfin si elle se décide à venir un jour, elle aurait dû être là il y a une heure... Et puis Lauren ne devrait pas tarder, elle non plus.

Ah ! Oui, Lauren, la plus grande des filles de Clara. Elle en parle si peu que j'avais oublié qu'elle devait nous rejoindre. J'ai compris à demi-mot qu'elle avait un caractère bien trempé et qu'elle n'avait pas du tout envie de passer l'été dans la Havane. Les seules photos d'elle, au salon, datent d'avant ses 10 ans. Le sourire peste, elle pose à chaque fois avec une nanny aux traits passablement fatigués qui semble à deux doigts de l'étrangler avant de donner sa démission. Tout ce que je sais, c'est qu'elle vit à Miami et qu'elle va à l'université pour étudier je ne sais quoi de mortellement ennuyeux.

Et si elle ressemblait à tous ces gosses de riches ?

Elle ferait partie d'une société secrète, tout en conciliant diverses associations caritatives...

Je pianote à toute allure sur mon téléphone.

« Il faut que je te laisse, Dinah. La brigade anti-mollesse vient de m'arrêter en flagrant délit de port de pyjama après l'heure décente fixée par le général Cabello. De plus, la fille prodige ne devrait pas tarder à faire son apparition et je suis sommée d'aller me préparer. »

« Tu parles de la princesse de Galles ? »

« Presque. La fille de Clara. Ça sent l'adolescente immature et colérique qui pense que tout lui est dû ! »

Apprends-moi/fan-fiction camrenWhere stories live. Discover now