Partie 84

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   Camila

Le lendemain, quand j'arrive à l'aquarium, Mlle Brownstone me convoque dans son bureau. Les quatre autres saisonniers qui ont été embauchés en même temps que moi s'y rendent aussi.

- J'avais toutes les raisons de croire que tous les contrats seraient prolongés pour l'année, explique-t-elle d'entrée de jeu. Malheureusement, ce ne sera pas possible.

Il me semble que le sol se dérobe sous ma chaise. J'entends à peine les explications navrées de la directrice du personnel. Il est question de restructurations de l'aquarium, de travaux entraînant une baisse des besoins en matière de poste de renseignements. La décision a été prise soudainement la semaine dernière, en urgence, après le passage d'une commission de sécurité qui a constaté des dégâts.

Le dernier après-midi que je passe dans l'aquarium à renseigner les visiteurs est terrible. J'ai du mal à contenir mes larmes de frustration et de déception.

Je dois donc tout recommencer à zéro !

Quand je rentre à l'appartement, Lauren est en train de cuisiner. Elle a noué un tablier autour de sa taille. Et elle arrive malgré ça à être sexy. Si sexy que je la verrais tout à fait jouer, dans cette tenue, pour une publicité...

Apparemment, elle vient tout juste de se mettre aux fourneaux. Très occupée à faire flamber un ingrédient qui dégage une odeur délicate de safran, elle ne détourne pas tout de suite les yeux de la casserole.

- Je suis rentrée plus tôt, j'ai décidé de cuisiner pour toi, et...

- Super !

Je m'efforce d'avoir l'air enjoué, mais je n'y arrive pas. Lauren se tourne vers moi.

- Que se passe-t-il ? demande-t-elle, inquiète, en tentant d'intercepter mon regard.

- Mon contrat saisonnier n'est pas renouvelé ! dis-je en me laissant tomber sur le canapé. C'est fini, l'aquarium.

Comme si tout mon découragement éclatait d'un coup, je me sens anéantie, broyée par une force qui me dépasse et contre laquelle je ne peux rien.

Lauren a éteint le gaz et se précipite vers moi.

- Comment je vais faire ? m'écrié-je.

Elle s'agenouille devant le canapé et pose une main sur ma cuisse.

- Tu vas faire comme tu sais si bien le faire, me rassure Lauren. Tu vas affronter les difficultés !

Ses mots ne m'apaisent pas.

- Il faut que je recommence à zéro, Lauren ! Tu te rends compte !

- Du calme, Camz, tu vas retrouver un emploi... Tu avais commencé des recherches, tu vas les reprendre ! dit Lauren sur un ton calme. Il y a une liste sur ton bureau...

- Oui, et parmi les trente noms de cette liste, aucun ne m'a rappelée ! J'ai épluché les annonces de toute la ville ! grondé-je.

Je me suis recroquevillée. Lauren est restée à ma hauteur et me caresse la cheville. La délicieuse sensation qui naît sous ses doigts me calme un instant.

- Avec la rentrée, je suis sûre que des postes vont se créer..., encourage-t-elle.

- Et tous les étudiants de New York vont chercher un emploi ! rétorqué-je.

- Ne baisse pas les bras Camz..., souffle Lauren.

- Est-ce que tu m'as déjà vue baisser les bras ? m'indigné-je en me levant d'un bond. J'en ai assez, c'est tout.

Lauren semble décontenancée par ma réaction.

- Camz, ne t'énerve pas... Ne te mets pas la pression. Tu vas trouver quelque chose, tu n'es pas à une semaine près, tout de même. Je suis là pour toi, tu le sais.

- Et je refuse que tu paies quoi que ce soit pour moi, tu le sais ! balancé-je froidement.

- Tu ne vas pas remettre ça sur le tapis, Camila, pas maintenant, lance-t-elle. On est un couple ou pas ?

- Je ne veux pas vivre à tes crochets. Je ne veux dépendre de personne, tranché-je.

Le visage de Lauren s'assombrit. Elle se lève et s'écarte de quelques pas.

- C'est ça pour toi, un couple ? lâche-t-elle, furieuse. Si j'étais dans la merde, tu me jetterais parce que tu refuserais que je vive « à tes crochets » ? Chacun se débrouille dans son coin, c'est ça le principe ?

- Pas du tout ! Je veux être indépendante, c'est tout !

- Tu es privée d'études par ma faute, c'est normal que je fasse quelque chose ! déclare-t-elle.

- Comment ça par ta faute ? demandé-je interloquée.

- C'est à cause de moi que nous sommes parties de la Havane ! A cause de moi que tu as été chassée de la maison ! Si nous étions restées chez ma mère et ton père, ils se seraient occupés de payer tes études. Tu serais allée tranquillement étudier à New York, sans penser à rien d'autre...

- Tu crois vraiment que tu me dois quelque chose ? Et c'est pour cela que tu me proposes de tout payer ! Parce que tu rembourses une dette ! Je te rappelle qu'on était deux à partir, m'offusqué-je.

- Alors pourquoi tu te comportes comme si tu étais toute seule ? jette-t-elle, glaciale.

Laissant Lauren plantée au milieu du salon, je me précipite dans la chambre et j'ouvre le placard pour en tirer quelques affaires.

Je prends mon sac et je passe comme une furie devant Theo, qui est sorti de sa chambre, attiré par les cris. Je lui passe sous le nez et je gagne la sortie. Je claque la porte de l'appartement à en faire trembler l'immeuble et je m'engouffre dans le métro en direction de la 106e Rue, chez Dinah.

Apprends-moi/fan-fiction camrenWhere stories live. Discover now