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Ce n'est pas le doux son de mon réveil qui me tire de mon sommeil, mais les cris de mon frère et de mon père. Bienvenue chez moi.

Je me lève sans prendre le temps de m'étirer, et saisis dans mon armoire un jean et un t-shirt au hasard, puis file dans la salle de bains en prenant soin d'éviter de croiser quelqu'un. Je me renferme dans la salle d'eau, et prends une douche rapide. Après m'être habillée et maquillée à la va-vite, je retourne dans ma chambre préparer mon sac, et mettre mes lentilles.

Aujourd'hui, c'est la rentrée. Et je n'ai qu'une envie, c'est de retourner dans mon lit, me blottir sous ma couette, et de ne plus en sortir. J'ai du mal à survivre à la période du lycée, et j'y retourne après quelques mois d'absence. Autant dire que la réadaptation va être très dure, je le sens.

Après avoir posé rapidement ma trousse, mon agenda, un livre au hasard et un bloc-notes dans mon sac à dos, j'enfile mes chaussures et récupère mon téléphone. Il ne me sert à rien en soit, mais cela me rassurer de l'avoir avec moi. Je sors ensuite en trombe de ma chambre, fais un arrêt rapide dans la cuisine pour récupérer un pomme et un pain au chocolat, et sors de chez moi en pensant à prendre mes clés.

Je ne prends pas la peine de dire bonjour ou de souhaiter une bonne journée à quiconque se trouverait encore ici, puisqu'on ne m'écoute pas.

Une fois en dehors de mon bâtiment, je pars vers la station de métro la plus proche, et prends une grande bouffée d'air en voyant le métro arriver. Je m'engouffre dedans, entre deux personnes perdant déjà patience, et attends patiemment d'arriver à ma station. Je descends tout aussi rapidement que je suis montée, et me dirige à pas rapide vers le lycée. Lorsque j'arrive devant ce dernier, je vois qu'il est déjà ouvert, et qu'il n'y a que quelques personnes devant. En même temps, il n'est pas encore sept heures et demi, c'est donc normal qu'il n'y ait pratiquement personne.

Je m'engouffre dans le lycée, en disant bonjour rapidement aux surveillants parlant entre eux, et me dirige vers les panneaux d'affichage, pour voir dans quelle classe je me retrouve. J'étais en série générale l'an dernier, mais ai décidé de m'orienter dans la voie technologique, et d'aller en STMG. C'est une filière assez intéressante, puis à ce que j'ai compris, on aura des cours d'économie et de droit. Les seules matières qui m'intéressent un tant soit peu. Une fois que j'ai vu mon nom sur une des lites et que j'ai vu dans quelle salle je devais me rendre, je m'y rends. Personne n'est devant, personne n'est dedans. J'en profite pour récupérer le livre que j'ai glissé dans mon sac, et lis le titre.

Risibles Amours, de Kundera.

Ma mère me l'a offert il y a un petit moment de cela déjà, mais je n'avais jamais pris l'initiative de le lire. Jusqu'à aujourd'hui, même si je l'ai pris au hasard.

Plongée dans ma lecture, je ne fais pas réellement attention aux gens qui arrivent lentement mais sûrement, ni au temps qui passe. Je reprends conscience du monde qui m'entoure lorsque la sonnerie retentit. Je range alors mon téléphone et mon livre dans mon sac, et rentre dans la salle. Je pars m'installer au fond, contre le mur, comme à mon habitude. Personne ne vient s'installer à côté de moi, au contraire, j'ai plutôt l'impression qu'on cherche à m'éviter comme la peste. Je sais que certaines personnes me dévisagent, que d'autres se retiennent de parler sur mon dos, et que d'autres encore me regardent bizarrement. J'ai l'habitude de ce genre de comportement vis à vis de moi, alors je ne dis rien, me contentant d'essayer de me concentrer sur le professeur, qui entame son speech de rentrée scolaire.

Il commence à parler des épreuves anticipées du bac que nous allons avoir cette année, mais je ne l'écoute qu'à moitié. Je sais déjà quelles épreuves nous allons passer, je sais aussi que nous n'aurons pas les TPE à passer puisqu'ils ne concernent que les filières générales. Je sors mon bloc-notes et un stylo, et commence à dessiner distraitement, en regardant le professeur de temps à autre.

Ce professeur-là, je l'ai eu l'an d'avant. Il s'agit de mon professeur d'histoire. Lorsque j'étais encore au lycée, l'an dernier, c'est lui qui m'a pris sous son aile. Qui m'a aidé à faire du mieux que je pouvais. Il sait que, même si j'ai l'air distraite (chose qui peut arriver assez souvent), j'écoute quand même. Ou du moins, j'arrive à répondre sans être totalement à côté de la plaque.

Il commence à faire l'appel, et lorsqu'il arrive à mon nom, il me cherche du regard en fronçant les sourcils. Je lève la main, et il oriente son regard vers moi.

— Je t'ai déjà eu l'an dernier, non ?

— Oui.

— Donc les informations sont toutes correctes, nickel. Tu me facilites la tâche, merci.

Je ne réponds pas, me contentant de sourire très légèrement, et me concentre à nouveau sur mon dessin, qui prend forme petit à petit. Inconsciemment, j'ai dessiné une hirondelle prenant son envol. Elle prend pratiquement toute la feuille, et j'en suis plutôt fière. Je note dans un coin de la feuille qu'il faut que je le refasse sur une toile et que je le peigne, puis tourne la feuille.

Le professeur allait ajouter quelque chose, mais quelqu'un frappe à la porte, et une tête châtain fait son apparition à côté d'un pion.

— Bonjour, désolé de vous interrompre mais j'amène un retardataire.

— Nom et prénom ? demande le professeur.

— Pruski Mathieu, répond le châtain.

Autant, en général, je ne prête pas attention aux gens, autant lui, il a attiré mon attention. Peut-être parce qu'il arrive en retard le jour de la rentrée et que son arrivée n'est pas passée inaperçue, peut-être parce que mon inconscient s'est réveillé. Je n'en sais rien.

— Ah oui, je vois. En effet, tu es bien sur ma liste. Vas t'installer à côté de Louna.

— J'sais pas qui c'est, répond ledit Mathieu.

Je lève la main en me raclant la gorge doucement, et lorsque son regard capte le mien, il soupire et vient s'installer à côté de moi.

IdioteWhere stories live. Discover now