47

4.4K 182 50
                                    

Damien, peu convaincu des dires d'Ormaz, émet un grognement.

— J'suis pas d'accord. Quand tes potes hésiteraient pas à te balance, tu le fais aussi.

— Donc tu insinues que j'étais prête à descendre Flavie ? demandé-je.

— Non. C'est compliqué.

— En plus t'étais pas si proche d'elle que ça, donc en quoi ça te gênait qu'elle parle de moi en bien ? Je pense pas être une mauvaise personne.

— T'en es pas une, t'étais juste un peu aguicheuse. Mais elle t'aimait, ça crevait les yeux. Et ça me saoulait parce que tu la méritais pas.

— Pardon ? Si j'étais amie avec elle il y avait une bonne raison. C'était une bonne personne, elle était intelligente et belle et drôle, elle méritait que le meilleur. Et même si tu dis juste et qu'elle m'aimait, elle me l'aurait dit, et je lui aurais dit que je n'étais pas bisexuelle ou lesbienne.

— C'est c'que je dis, tu la méritais pas. T'étais trop bien pour elle. Personne ne la méritait, toute façon.

— Flavie était une bonne personne, cingle Adam.

— Pas tant que ça, elle se faisait tringler par le premier gars qui passait.

— Mec, dis pas de conneries sur ta reus, respecte sa mémoire quand même, intervient Elyo.

— Pourquoi faire ? Elle a jamais été méritante pour quoi que ce soit. Ni pour ses potes, ni pour ses mecs. Elle les trompait en plus.

— Flavie était pas le genre de filles à tromper, elle me racontait tout. Au contraire, c'est elle qui se faisait tromper.

— Ah ouais ? C'est pour ça que pratiquement tous les soirs je la baisais ? Et quand c'était pas moi, c'était mon père ?

— Alors j'suis pas doué en loi ou quoi mais j'crois que c'est considéré comme viol et inceste et que c'est puni par la loi, affirme Lesram.

— C'en était pas. Notre mère était devenue stérile après la grossesse de Flavie, et elle éprouvait plus aucune envie. Mon père en a conclu que c'était la faute de Flavie. Et c'était un vide-couilles rapide et facile, que demander de plus ?

— C'est irrespectueux, craché-je.

Adam, assis à côté de moi, passe un bras autour de mes épaules, me tenant contre lui afin que j'évite de faire une connerie. Damien, lui, ne voyant pas où est le mal, se ressert un verre qu'il bout cul sec. Les gars, fidèles au plan, font comme si c'était à peu près normal, et agissent comme ils le font en temps normal. Elyo s'affale un peu plus dans le canapé où il est assis, et regarde l'autre pourriture.

— Du coup pour toi Louna c'était aussi un vide-couilles facile même si elle a dit non ?

— Elle a peut-être dit non, mais son attitude disait oui. Elle avait des tenues provocantes, avec ses robes au ras du cul là. Ses regards qui me disaient "baise-moi", ses sourires aguicheurs. J'suis désolé mais ça voulait dire oui, elle avait pas à agir comme une salope si elle voulait pas que ça se passe.

— Donc tu l'as violé, siffle Adam.

— Je l'ai pas violé.

Mes mains tremblent, les larmes menacent de couler.

— T'u m'as violé, Damien. J'avais dit non. Mon attitude était normale. Mes tenues étaient correctes. Je te souriais par respect et par gentillesse. Je te regardais difficilement parce que oui tu me plaisais physiquement mais ça s'arrêtait là. Et avec ce que tu faisais à Flavie, je ne voulais pas sortir avec un gars comme toi.

— Ton mec n'est pas mieux. Il est connu pour le deal, mais aussi parce qu'il a baisé je sais pas combien de filles. Et tu dis que tu ne veux pas d'un mec comme moi ? Rends-toi à l'évidence, t'aimes les connards qui s'intéressent à toi que pour le cul.

Je récupère mon téléphone, les mains tremblantes, et éteins le dictaphone. J'en ai assez entendu, assez enregistré, pour espérer que Flavie ait sa vengeance. Et moi aussi.

Je me lève, me place en face de lui, et me penche doucement, toujours tremblante.

— J'aime Mathieu. Physiquement et mentalement. Toi, t'étais juste beau. Mais ta beauté en a pris un coup avec tes aveux. J'en ai rien à faire que Mathieu ait couché avec je ne sais combien de filles, puisqu'il couche avec moi, désormais. Ouais, j'ai exclusivité. J'en ai rien à faire qu'il touche et vende de la beuh, puisqu'il sait ce qu'il risque. Toi, par contre, t'as pas conscience de tout ce que tu risques.

Encore une fois, ma main rencontre sa joue violemment. Je laisse les larmes couler, tandis qu'Ormaz, Elyo et Lesram escortent Damien jusqu'à la sortie. Adam me prend dans ses bras, espérant me calmer un peu, mais c'est peu concluant. Lorsque les gars reviennent, ils me prennent tour à tour dans leurs bras.

— J'pensais pas que c'était si hardcore que ça, avoue Elyo.

— J'avoue, c'est pire que ce qu'on pensait.

J'essuie mes joues, trempées, et les regarde en souriant.

— Oui, mais au moins, on a de quoi le faire tomber pour un moment. Il n'y a eu aucune enquête sur pourquoi elle est morte, mais elle a vu une psychologue. Si on va voir les flics en leur donnant l'enregistrement, et en leur expliquant qui était Flavie, il risque d'y avoir une enquête. Ils vont avoir sa psy, qui va leur transmettre le dossier médical, et il tombera. On a ce qu'il faut, c'est le principal. Oui ça m'a fait du mal d'entendre tout ça, et de voir comment il parlait de sa propre soeur, mais il va aller en taule, et elle aura sa vengeance.

— T'es archi forte Louna, franchement.

— T'es balèze ouais, respect.

— On fait quoi maintenant ? Faut qu'on se vide la tête, nan ?

Je montre les bouteilles restantes du doigt.

— On les finit, quitte à avoir une bonne gueule de bois demain et essayer de tout oublier de cette soirée ?

Les gars acquiescent, et on retourne s'asseoir. Ormaz met de la musique, Elyo ouvre les fenêtre et Lesram roule des joints. Adam serre les verres, et en tend un à chacun.

— Les gars, avant de boire, je propose un truc. Cette soirée, c'est le truc qui doit rester entre nous. Mathieu sera pas mis au courant, Assaf non plus, Emma non plus, personne d'autre que nous doit savoir ça. Si l'un d'entre nous oublie, c'est pas grave, on lui rappelle pas ce qui a été dit. Si on oublie, c'est pas grave, ça évite de mauvais souvenirs. Si on s'en souvient tous, on fait en sorte de ce souvenir de l'after, de cette partie-là de la soirée, pas d'avant. On fait ça pour Flavie, pour Louna, pour que l'autre bâtard croupisse en taule, explique Adam.

Les gars acquiescent, et je leur offre un sourire sincère pour la première fois de la soirée.

— À la débauche ? proposé-je.

— À la débauche !

Nous levons nos verres, et buvons cul-sec.

IdioteWo Geschichten leben. Entdecke jetzt