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Peu avant minuit, tout le monde insiste pour que j'ouvre les cadeaux. Je me sens un peu mal à l'aise, sachant que je n'ai pas pour habitude de recevoir des présents, et encore moins de les ouvrir devant une petite assemblée. Néanmoins, j'obtempère.

Je me retrouve assise sur une chaise, en plein milieu du salon, une couronne en papier sur la tête,  tous les cadeaux à mes pieds.

J'épargne les détails du déballage, mais je me retrouve avec des sweats et une casquette Seine Zoo Records, des livres, dont Martin Eden (un classique que je n'avais pas encore eu l'occasion de lire). Les gars m'ont aussi offert leurs albums Jeunes Entrepreneurs, Paris Sud Minute et Seine Zoo, ainsi que leurs EPs La Source et La Suite. Message subliminal : "T'as intérêt à écouter notre musique parce que clairement on va te matrixer". Merci les gars.

Emma m'a offert un bracelet tout simple, et je la remercie. Certains ne m'ont rien offert, mais je m'en fiche un peu. je ne cours pas après les cadeaux, de toute façon. Je remercie chacun à tour de rôle en leur faisant un câlin, et arrivée devant Mathieu, je décide quand même de lui faire un câlin, bien qu'il ne m'ait rien offert de matériel. Il a l'air peu réceptif, mais finit par m'encercler de ses bras.

Certains commencent à partir, comme Emma par exemple. Sa mère est venue la chercher, mais elle part après m'avoir donné son numéro de téléphone, et promis qu'on devait faire quelque chose ensemble avant de reprendre les cours. L'Entourage au grand complet part peu après, tout comme les quelques membres du Panama Bende (j'ai appris ce soir seulement son existence, alors que Mathieu en fait partie).

Finalement, il ne reste que lui et moi. Je commence à ranger un peu, décidant de mettre tous les déchets dans un sac poubelle que j'irai mettre dans un container plus tard dans la journée. Je pars ensuite m'affaler dans le canapé, et prends une bouteille qui traîne encore sur la table basse. Je l'ouvre et commence à boire.

— Tu devrais p't'être arrêter de boire.

Je me tourne vers Mathieu, et hausse un sourcil.

— Ah, bah oui, maintenant que les gens sont partis, je peux redevenir ta gentille petite pote câline.

Il soupire et me prend la bouteille des mains, avant d'en boire et de grimacer.

— Putain, c'est d'l'essence ce truc.

— Bah non, c'est de la vodka.

— Ouais, mais la Polia, c'est dégueulasse. La Zubrowka c'est meilleur. Ils ont des goûts de merde.

— Faut se contenter de ce qu'il y a. Rends-moi la bouteille.

— Non.

— Commence pas Mathieu, j'ai le droit de faire ce que je veux.

— T'avais le droit d'faire c'que tu voulais hier, vu que c'était TA journée. Là, il est deux heures passées, donc c'est plus ta journée d'anniv, donc t'es censée redevenir raisonnable.

— Dit-il alors que c'est le gars le moins raisonnable que je connaisse.

Je récupère la bouteille après qu'il ait soupiré, et continue de boire.

— Tu sais, dis-je entre deux gorgées, je te comprends pas. Et je te hais un peu.

Il fronce les sourcils, et je pose la bouteille. Je me tourne vers lui pour m'expliquer, en essayant d'être la plus claire possible malgré l'alcool qui coule dans mes veines. J'ai dû boire quatre ou cinq verres, plus un quart de la bouteille, mais toujours très espacés et j'ai mangé entre temps. Je pense que ça explique la lucidité que j'arrive à garder malgré que ça soit la première fois que je boive autant.

— On est au lycée, tout se passe bien. On est que tous les deux, tout se passe bien. On est avec tes potes, que ça soit avec l'Entourage ou le Panama, et tu fais comme si j'existais pas. Si je suis ton amie, t'es pas censé agir comme ça. À moins que tu me considères pas comme ta pote, auquel cas t'as pas à me trainer avec toi, et à faire le gentil. J'ai très bien vécu la solitude l'an dernier, j'aurai pu la supporter si t'étais pas rentré dans ma vie hein.

— J'comprends pas. En quoi tu me hais ?

— J'te hais parce que tu me fais ressentir des trucs contraires. J'te hais parce que quand j'étais avec Ken, je me sentais mal vis à vis de toi alors que j'avais pas à l'être. Je te hais parce que quand tu m'appelles "ta Nana", j'ai un peu mal là (je lui montre le bas de mon ventre), mais c'est agréable en même temps. Je te hais parce que tu m'embrouilles le cerveau et que tu fausses mon ressenti par rapport à toi. T'es pas un gars fréquentable, ni quelqu'un que j'aurai approché encore l'an dernier. J'aime pas les gars qui fument, qui boivent, et encore moins ceux qui vendent. Mais avec toi, ça me dérange pas. Je devrais m'éloigner de toi, parce que ça se trouve t'as une mauvaise influence sur moi, et on en est là. J't'appelle mon polak, j'te fais des massages et des papouilles, je te laisse être tactile avec moi alors que j'aime pas ça en temps normal. Je suis venue chez toi, alors qu'en temps normal je serais partie avec ma mère. Et je crois que Ken avait raison et c'est ce qui me fait peur.

— Il aurait raison sur quoi ?

— Sur le fait que ça se trouve je t'aime plus qu'un simple ami et j'aime pas ça. J'ai jamais eu de copain, ni d'attirance pour quelqu'un alors je sais pas comment gérer ça et..

Il me fait taire en plaquant pour la deuxième fois de la soirée ses lèvres sur les miennes. Sa main trouve à nouveau ma nuque, et son autre main se pose sur ma taille. Désinhibée par l'alcool ingurgité, je me retrouve à califourchon sur lui, mes mains sur ses joues, et mes lèvres contre les siennes. Les mains de Mathieu se posent sur mes hanches, et remontent jusqu'à ma taille. Au bout d'un certain moment, nos lippes se séparent, étant à bout de souffle. Il me regarde, un léger sourire aux lèvres.

— Si t'avais peur que ça soit pas pareil pour oim, t'as ta réponse.

— J'ai pas peur de ça, j'ai peur d'un tas d'autre chose.

Il me serre contre lui. Et je me sens bien.

— Vas te coucher, on parlera demain, t'es éclatée.

— Reste avec moi.. S'il te plaît.

— J'avais pas prévu de partir, t'inquiètes.

Je me lève, prends sa main et l'entraîne dans ma chambre. À peine la porte ouverte, Pistache sort en trombe. Je saisis mon pyjama, et pars dans la chambre d'Adam lui emprunter un jogging et un t-shirt, que j'emmène à Mathieu après m'être changée.

Lorsque l'on est tous deux installés, je sens qu'il se redresse, et fouille dans ses affaires.

— J'ai oublié de te donner ça. Allume la lumière.

J'obéis, et le vois assis, un écrin dans ses mains. Je l'ouvre, et vois un magnifique collier avec un petit pendentif en forme de lune.

— T'aurais pas dû..

— J'allais pas me ramener sans rien.

— Tu m'as offert mon premier baiser, c'est déjà beaucoup. Tu me l'accroches ?

Je me tourne, et il attache doucement son cadeau autour de mon cou. Lorsque je me tourne à nouveau vers lui, j'ose poser doucement mes lèvres contre les siennes.

— Merci pour tout, Mathieu.

Il sourit doucement, et nous finissons par nous rallonger. Dos à lui, je sens qu'il passe son bras au dessus de mon ventre pour m'attirer contre lui. Il passe ensuite sa main dans mes cheveux, et c'est sur le mouvement de ses doigts dans mes cheveux que je finis par m'endormir.

Idioteحيث تعيش القصص. اكتشف الآن