CHAPITRE 10

6.8K 448 16
                                    

— Qu'est-ce que tu regardes avec ses grands yeux ? je demande à Marie, la petite fille que je garde.

Elle est venue s'installer dans ce pays, plus précisément, ici, à Lisbonne, à cinq rues d'où j'habite, avec ses parents, un peu avant moi. Les premières semaines, avec elle, ont été très difficiles. Elle ne me disait pas un mot. Je devais sans cesse deviner ce qu'elle désirait faire. Et le plus souvent, elle préférait rester seule, dans sa chambre, avec la tablette de ses parents dans les mains, dans un silence religieux. Jusqu'au jour, où je lui ai apporté des crayons de couleurs et des feuilles blanches, son visage s'est illuminé ce soir là. Depuis, nous sommes devenues les meilleures amies du monde, et lorsque je la garde, nous passons nos soirées à dessiner et rire de nos coloriages enfantins.

— Mais ? Ça ne ressemble pas à un papillon, ton dessin !

— Laisse moi le terminer et après tu pourras en juger, tu veux bien ?

D'habitude, je me contente de suivre son exemple et de me rapprocher le plus possible de ses coups de crayons. Mais, aujourd'hui, j'avais envie, je ne sais pas pourquoi, de faire à ma façon. C'est sûrement pour cela qu'elle est aussi étonnée.

— Oui ! Mais je crois que tu te trompes !

— On verra bien ? Je voulais changer un peu !

Elle ne dit plus rien et termine son beau dessin plein de couleurs, un vrai arc-en-ciel. Quant à moi, je m'applique à faire de cette page blanche un petit tableau qui j'espère plaira à ma plus grande fan.

— Waouh ! j'entends alors que je suis concentré sur un petit détail, mais qui fait toute la différence, selon moi, les deux petites antennes de la bébête. C'est trop, trop beau ! Tu peux me le donner ?

— Attends que je le finisse avant !

Elle n'est pas patiente du tout. Un peu plus, elle me l'aurait tiré des mains sans que je puisse y faire quoi que ce soit. J'essaye de finir au plus vite, pour ne pas qu'elle attende trop longtemps.

Elle trépigne près de moi, alors que je mets un dernier coup de couleur à ma petite oeuvre.

— Tu dois le signer ! m'indique t-elle tandis que j'étais sur le point de lui tendre.

— Bien mademoiselle !

Je m'exécute et signe : Di P 26.

Elle me regarde comme si j'avais gâché mon dessin. Elle ne semble pas très heureuse, pourtant c'est elle qui m'a demandé de le parapher.

— Tiens, il est tout à toi !

Je lui tends finalement et son sourire réapparaît instantanément.

— On croirait qu'il est vraiment là, et qu'il va s'envoler, fait-elle virevolter ma feuille dans les airs.

— Si tu l'aimes, tant mieux !

— Oui ! Je l'adore ! s'extasie-t-elle en le regardant de plus en plus près. Pourquoi tu as signé ses lettres et ses chiffres ? Ce n'est pas ton nom, si ?

— Car quand j'ai commencé à dessiner, ma mère m'a dit qu'il fallait que je signe tout ce que je faisais de mes dix petits doigts et que je devais également apposer mon âge, afin qu'elle sache quand est-ce que je l'avais fait, je débite avec beaucoup d'émotion dans la voix. Et comme j'étais trop petite pour savoir réellement écrire, j'ai mis di en pensant de, P pour Paloma et les chiffres pour l'âge que j'avais. En l'occurrence, 26 depuis environ trois mois. Et j'ai toujours fait ainsi.

J'essaye de contenir mes larmes, même si ce n'est pas facile. Il m'est dur de ne pas pleurer lorsque je repense à mes souvenirs d'enfants. Ma mère y était si présente. Mais je dois rester forte, je ne veux pas attrister la petite.

— Sur le mien, je vais mettre 5, car j'ai cinq ans ! dit-elle très contente.

Ce qui me fait du bien, et refoule immédiatement mes larmes. Comment être triste auprès de ce petit boute-en-train.

— Tu peux, ça te permettra de voir ce que tu étais capable de faire à cet âge quand tu seras plus âgée !

— Oui ! s'empresse-t-elle de mettre son âge sur son papier. Maintenant, je vais afficher ton dessin au-dessus de mon lit !

— Attends ! Tu vas devoir demander à ta maman si tu peux ou non le mettre.

La déco de sa chambre semble tout droit sorti d'un magazine de décoration. Je doute que sa mère soit enchantée d'y afficher des dessins quelconque. D'ailleurs, aucune œuvre de sa fille n'est représentée dans ce lieu très cocooning.

— Elle sera d'accord !

— Peut-être ! Mais en attendant que tu lui demandes, on va le mettre ici, sur ta table de chevet, je prends la feuille de ses mains et la dépose sur le meuble près de son lit. Bon, il ne nous reste qu'un petit quart d'heure avant de te mettre au lit, que veux tu faire ?

— Encore un dessin ! Mais cette fois-ci on fait ce que l'on veut !

Elle se met tout de suite au travail, alors que moi j'ai du mal à trouver l'inspiration. Et sans que je me rende vraiment compte je finis par gribouiller quelque chose. Et c'est seulement quand Marie revient vers moi, et qu'elle me demande :

— C'est qui ?

Que je comprends. Je viens de reproduire en quelques coups de crayon, et pas de la meilleure des façons, la personne qui submerge mon esprit depuis des semaines maintenant. Dans la stupeur et la précipitation, je fais tout tomber à terre. Puis, je ramasse la feuille, la plie en quatre et la fourre dans ma poche.

— On aurait dit le patron de ma maman... me confie Marie, mais je n'y prête pas attention ne connaissant pas la patron de sa mère, ni ce qu'elle fait dans la vie, avant de m'aider à ramasser gentiment tous ses crayons de couleur éparpillés sur le tapis par ma faute.

Après un brossage de dents interminable, je la mets finalement au lit avec huit minutes de retard, mais pas sans lui faire une promesse. Je dois, en attendant, que ces parents rentrent, lui faire un très, très beau dessin, ce sont ces mots. Après dix minutes de réflexion, je me suis décidée à essayer, ce qui n'est pas simple, de faire son portrait à l'aide d'une photographie qui prône en plein centre de la pièce dans laquelle je suis. 





Publié le jeudi 4 juin 2020 Chapitre Bonus

*************************************************

Voilà, j'espère que ce chapitre bonus, vous a plu ? Le suivant aura lieu aux 1300 étoiles. 

Mais bien évidement on se retrouve mercredi pour la suite de ce chapitre, qui s'annonce, croyez moi très exaltant. 

Soyez au rendez-vous ! Et n'oubliez pas de voter si l'histoire vous plait toujours. 

Bonne journée et à très vite ! 


L'initiation à l'amour : DÉSIR OU AMOUR ? TOME 1Where stories live. Discover now