Chapitre LXIV - Deux soirées différentes

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Ryan

(vendredi 21 février)

C'est plus fort que moi, ne pas répondre aux messages d'Hannah m'est impossible. Ces derniers toujours dans la provocation, le désespoir et surtout avec une certaine familiarité qui pourrait laisser croire qu'elle et moi sommes toujours ensemble. Pour elle, Bonnie n'est rien puisqu'elle n'a jamais cessé de me harceler. Quant à Jenny, je n'ai plus aucune nouvelles d'elle depuis la scène au bar de l'autre soir. Cela serait une bonne chose si Hannah arrêtait d'arroser ma boîte de messages depuis maintenant plus de quatre jours. J'ai la nette impression que ma sœur est derrière cette soudaine arrivée de SMS, que c'est elle qui entraîne sa chère complice dans ce tournent de mots inappropriés : « Tu me manques », « Je ne veux pas t'oublier », « J'ai besoin de toi »...

J'en ai assez. Bonnie passait d'excellentes vacances avec ses amies alors elle n'est pas au courant. Mais je vois mon erreur face à l'acharnement avec lequel Hannah m'assomme de messages. Le premier message semble trop long à retrouver au point que c'est maintenant trop tard de faire connaître leur existence à Bonnie. Elle commence à me faire confiance alors je ne veux la tenir informer de ceci, je vais plutôt y mettre un terme une bonne fois pour toute. C'est après que je pourrais lui en parler. Elle digérera mieux le fait que j'ai mis les choses au clair avec Hannah plutôt qu'avant de l'avoir fait. De ce fait, la confiance qu'elle me fait ne pourra que s'agrandir.

Devant sa porte, je me répète ce que j'ai à lui dire de manière claire et nette sans rage, mais avec calme et douceur. Ce serait la satisfaire de lui montrer mon agacement. Il faut que je me fasse intimidant alors le moment de profiter de mes talents d'argumentation et de coopération m'est venu. Mais cette blonde vénitienne est loin d'être un dossier facilement déchiffrable et encore moins un client susceptible de collaborer avec moi. Elle fait partie de ma vie personnelle puisqu'elle est ma plus grande histoire d'amour. Mais ce n'est pas le moment de me raviver mon passé.

Toutes ces pensées s'évaporent lorsque mes yeux croisent les siens. Un pyjama gris, des cheveux très mal coiffés et une mine épuisée. C'est la première fois que je la vois comme ça depuis ce soir-là où je suis venue pour la récupérer et qu'elle m'a repoussé. J'ose me demander si je suis la cause de son état.

- R-Ryan ?

Elle paraît innocente, cette image d'elle justifie le ton de ses messages si naïve et fragile. Égoïstement, je l'imaginais rire diaboliquement après l'envoi des SMS, si ce n'est aussi qu'imaginer Jenny appuyer ses actions avec une coupe de champagne dans les mains. Mais je suis là, encore sur le pas de sa porte à la regarder. Je me sens soudain idiot. Et je ne sais pas si je dois détester le sentiment de regret qui prend possession de moi, mais il n'est rien à côté de celui de la peine.

- Je peux entrer ? demandé-je d'une petite voix mal assurée.

Elle cligne des yeux et dans un pincement de lèvres nerveux, s'écarte pour me laisser passer. Pendant que je passe devant elle, j'ai le temps de voir son regard s'attarder lentement sur moi comme si j'étais l'apparition d'un fantôme. Ce qui est sûr, c'est qu'elle ne s'attendait pas à me voir. Toujours le même appartement fleuri et petit. C'est comme si rien n'avait changé, il me rappelle toujours l'époque où je vivais avec ma mère et Jenny dans un petit habitacle. Et pourtant des mois sont passés. Hannah ne travaille plus à Carter Corporation, Gauthier a retrouvé l'amour avec Lisa, j'ai fondé ma propre association pour les sans-abris et ma relation avec Jenny n'est plus ce qu'elle était. Mais surtout, j'ai rencontré Bonnie.

- Tu veux quelque chose à boire ?

Sa voix m'apparaît de derrière, vers la cuisine. Lorsque je me retourne, elle est là, à me regarder avec tristesse. Ses yeux sont rouges, elle a sûrement pleuré toute la soirée et mon instinct me dit que son chagrin erre en elle depuis bien trop longtemps. Et si ses sentiments errants pour moi la mettait dans cet état chaque soir ? Mon bonheur avec Bonnie m'a aveuglé sur ce que pouvait ressentir Hannah. Mais pourquoi mon cœur se serre et s'en soucie ? Elle m'aime encore, et moi j'aime une autre. Alors pourquoi je la fixe dans un silence pesant en détaillant son visage, son corps, ses cheveux..? Elle ne porte pas de soutien-gorge, sa robe grise moule ses tétons de manière affolante. Putain, arrête de regarder !

La Maladresse de T'aimer [Is it Love ? Ryan] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant