Chapitre 85

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Je hurlai de toutes mes forces. Je savais qu'il allait me faire quelque chose d'immonde, j'espérais donc du plus profond de mon cœur que quelqu'un serait encore à côté de la maison. Il m'insulta de plus belle et sortit un pistolet qui me vint en plein milieu du front. Par chance, ma prière se fit entende car Jean fracassa la porte. Gaston, surpris, les regarda s'avancer sans le moindre geste. Il ne devait pas s'attendre à une telle entrée. Jean se jeta sur lui, pour le forcer à me lâcher, ainsi que son arme. Ils se battirent d'une force incommensurable. Les coups partirent sans que je ne puisse les prévoir. Ils s'insultèrent et essayèrent de prendre chacun le dessus sur l'autre. Mais après quelques minutes, Jean réussi à le maintenir à terre, lui bloquant les mains et les jambes. Il en profita pour me lancer un regard.

— Vous allez bien ? Il ne vous a pas fait de mal ? m'examina-t-il.

— Non, je vais bien. Vous êtes arrivés à temps.

Jean se releva tenant fermement Gaston et le fit sortir de la maison. Juliette, sur le parvis, se jeta dans mes bras quand elle m'aperçut, elle pleura de soulagement. Je la repoussai gentiment pour voir Gaston se faire arrêter. J'avais envie de voir cette image et lui lancer quelques derniers mots.

— Tu m'as rendu la vie impossible pendant des années, maintenant c'est à toi de payer.

— Je n'ai en aucun cas perdu, objecta-t-il.

Je fronçai les sourcils ne comprenant pas ses paroles, mais une idée s'éclaira.

— Juliette sauve toi ! lui ordonnai-je.

Mais ce fut trop tard, Gaston avait déjà réussi à sortir son arme et à pointer le canon vers Juliette, la balle partie d'un coup. Elle toucha un corps, mais pas celui visé car une carrure imposante s'était jetée pour la protéger. Il s'agissait de Jean, il n'avait réfléchi, il avait juste eu ce réflexe pour protéger Juliette. Il s'écoula à terre se tenant la poitrine devenue rouge par son sang. Gérard, un habitant, sauta sur Gaston pour l'empêcher de faire d'autres victimes ou de s'échapper.

Juliette se rua aux pieds de son premier amour pour appuyer sur la blessure, les joues remplies de larmes.

— Non, non, tu ne peux pas me laisser. Il faut que tu restes en vie, pour moi, pour ta femme, tes enfants, pour tout le monde.

— Arrête Juliette, je vais mourir. Sèche donc tes larmes, je ne les mérite pas. Je t'ai fait bien trop de mal pour que tu te mettes dans des états pareils pour moi.

— Ne dis pas de bêtises, on est passé à autre chose.

— Non, pas moi. Je ne ... t'ai jamais oublié. Je n'ai jamais cesser de ... t'aimer. Je veillais sur toi constamment, avoua-t-il difficilement.

— Tais-toi, économise des forces.

— Non, il faut que je ... te dise tout ça. Je les ai tellement ré...pétés dans ma tête pour te les ... dire. Je ... je ... Je t'aime Juliette. Je t'ai toujours aimé, souffla-t-il à demi-mot.

Après ces mots, il laissa tomber la main qu'il avait portée à la joue de Juliette, pour donner son dernier souffle. Juliette hurla, se débattit lorsque Sébastien voulut la séparer de Jean. Elle tenta de s'accrocher encore plus. Ses larmes dévalèrent ses joues dans un torrent puissant. Les autres n'étaient guère dans un meilleur état. Ils pleuraient pour la plupart, ou étaient très choqués. Gaston, de son côté, criait de le lâcher, se débattait de toutes ses forces, mais rapidement la hargne vint s'emparer des autres résistants, qui s'élancèrent sur lui, le martelant de coups. J'avais beau protester de le lâcher, la peine mélangée à la haine les possédait tous. Ils avaient sûrement perdu l'un des leurs et voulaient faire payer le coupable. La mort ne les effrayait plus. Rapidement, des hommes les séparèrent. Gaston était en sang, son visage était bien amoché. On ne distinguait d'ailleurs plus aucune parcelle de peau, mais juste une sorte de liquide rouge. Mais grâce à la seule personne censée, le médecin avait été prévenu. Il n'avait pas tardé à débarqué, sa mallette gigotant aux rythmes de ses pas. Il s'activa lorsqu'il vit le petit groupe agglutiné près de Jean. Il nous ordonna de nous écarter, lui permettant d'examiner Jean. Il chercha à arrêter le sang, mais hélas, une bonne partie s'était déjà déversée sur le sol. Ses gestes s'accélèrent d'un coup. Son teint perdit ses couleurs sans prévenir. Puis, il s'arrêta. Il nous regarda l'un après les autres, d'abord Clémentine, puis Benoît, moi, et enfin Juliette.

SUITE ALLEMANDEWhere stories live. Discover now