Chapitre 27

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Une fois rentrée à la ferme de Madeleine, je la vis attablée avec un verre d'eau, les enfants jouant calmement dans une autre pièce. Quand elle me vit, elle me sourit tristement.

— Où êtes-vous allée ? Je pensais que vous arriverez plus tôt.

— Je suis désolée, je n'ai pas vu le temps passer, m'excusai-je

— Non, ne le faites pas, c'est plutôt à moi, je me comporte comme une maman louve prête à couver n'importe qui.

— Je crois que j'ai la solution pour vous redonner le sourire, dis-je en m'installant.

— Dites-moi ce que vous voulez, la journée ne peut pas être pire.

— Je suis allée voir ma belle-mère, pour lui parler et me confronter à elle une bonne fois pour toute. Après une discussion forte en émotions, j'ai réussi à la convaincre de vous laisser tranquille. Elle ne viendra pas vous demander votre loyer, plus maintenant.

— Lucile, ça me touche énormément, mais je ne peux pas accepter. Il faut que je me débrouille par moi même.

— Je sais le caractère que vous avez. Vous ne demandez jamais de l'aide, vous voulez toujours vous débrouiller et ainsi de suite mais là c'est un cas de force majeure. Il n'est pas simplement question de vous, vous avez des enfants aussi. Ils subissent déjà l'absence de leur père, ils ne peuvent pas vivre une situation pareille. Perdre sa maison est très dur, beaucoup trop. Laissez moi au moins vous permettre de la garder. Vous m'avez tellement aidée quand j'habitais encore ici. Vous vous souvenez, le nombre de fois où j'allais chez vous, après une énième dispute avec ma belle-mère ou mon mari. Vous avez été présente et ma seule amie. C'est important pour moi.

Elle me regarda quelques secondes avant de sourire et de me prendre dans ses bras. La voir comme ça me remplit/gonfla le coeur de bonheur. J'avais réussi la mission que je m'étais attribuée. J'étais fière de Madeleine.

Les jours passèrent et se ressemblaient. J'aidais Madeleine à sa ferme, m'occupant de ses enfants, de ses animaux, de son potager. Elle remontait la pente doucement mais sûrement.

Un mois était passé/s'était écoulé depuis mon arrivée. J'avais croisé ma belle-mère quelques fois. Nous nous évitions le plus possible, au point de changer de trottoir.

Mon départ a été assez difficile avec Madeleine et sa famille. Je les adorais tous. Mais je devais rentrer. Je ne pouvais pas laisser Juliette indéfiniment.

Une fois chez mon amie, celle-ci me sauta dans les bras, toute guillerette.

— Je n'en pouvais plus d'attendre ! J'ai bien cru que tu n'allais jamais rentrer.

— Mais qu'est-ce que tu racontes, Lui dis-je sans trop comprendre.

— Tu as reçu deux lettres de ton prince charmant. Je ne les ai pas ouvertes bien sur mais j'ai dû sérieusement me retenir. Plus les jours passaient et plus c'était dur. Alors installes toi et lis les.

Elle me mit de force sur une chaise et me montra les 2 lettres. J'ouvris la première et les battements de mon cœur s'accélérèrent.

Chère Lucille,

La vie sans vous est de plus en plus difficile. Des rumeurs circulent et n'envisagent rien de bon. Je ne peux rien te dire de plus, je pense que vous l'avez vous même deviné. Je dois être envoyé en renfort en France. Je ne peux, non plus, rien vous dire.

Vous savoir en vie me comble de bonheur. J'ai longtemps rêver de nos retrouvailles même de manière épistolaire.

J'avais sous estimé le chamboulement de mon coeur envers vous. Que m'avez-vous fait ? Ces deux années ont été un calvaire sans vous. Avez vous des nouvelles de votre mari. Je peux essayer de me renseigner.

Amitiés sincères

Bruno

Je m'empressai d'ouvrir l'autre.

Chère Lucile,

Je me languissais de vos réponses. Concernant votre mari, je me suis tout de même renseigné. Il est toujours prisonnier dans ce camp. Il est avec deux-cents autres prisonniers. Beaucoup sont morts dû aux mauvais traitements et aux difficultés tant morales que physiques. Il semblerait que Gaston Angellier soit un battant avec un moral d'acier. De plus, d'après mes recherches, il est très apprécié des allemands malgré sa nationalité et son statut de prisonnier. A vous d'analyser et de tirer vos propres hypothèses. Je ne puis vous dévoiler les miennes, question de bienséance.

Avez-vous des nouvelles d'Erich? Je n'en ai pas eu depuis des semaines. Vu l'état dans lequel il était, je m'attends au pire.

Racontez moi la vie que vous menez. Comme cela, nous aurons l'impression d'être proches même à des milliers de kilomètres.

Mes respectueuses salutations

Bruno

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