Chapitre 62

220 26 34
                                    

Yeo Sang m'avait tirée derrière lui en agrippant fortement mon poignet, ce qui devait probablement être déplacé de la part d'un serviteur. Mais je ne l'avais pas relevé. Et s'il avait pu se le permettre, c'était parce que, de toute évidence, Geun Rye et Hong Sim étaient absentes. Elles auraient surement été choquées de son attitude si elles avaient été là. Et il ne se serait pas permis non plus de rester seul avec moi dans ma pièce de vie. Mais là, aucun problème. Et comme je n'étais pas aussi fermée d'esprits qu'eux sur le sujet, je n'avais pas protesté. Très clairement, Yeo Sang en avait gros sur le cœur et il y avait peu de chance que je réussisse à éviter les reproches avec une autorité que je n'estimais pas légitime moi-même.

« Tu te rends compte de l'inconscience de tes actions ? » m'apostropha-t-il, dès que nous fûmes dans ma chambre.

Je décidai de m'assoir parce que ça risquait d'être long. J'avais pris le parti de ne pas répondre tout de suite et de toute façon, Yeo Sang enchaina sans m'en laisser le temps.

« Si Jong Ho a décidé de m'envoyer ici, c'est pour que tu puisses bénéficier d'une protection efficace. Mais comment est-ce que je peux te protéger de tous les dangers qui te guettent ici si tu m'écartes tout le temps ? Ou si tu vas à des endroits où je ne suis pas censé te suivre ? Je ne sais pas si tu en as vraiment pris conscience mais tu es en danger de mort ! Il y a quelqu'un dans ce palais qui veut te voir six pieds sous terre ! Et pour peu que ce soit quelqu'un de puissant ou de tenace, il va finir par y arriver. Surtout si tu continues d'agir comme une idiote. Quand on est dans une position comme la tienne, il faut faire profil bas. A moins que finalement, tu ne tiennes pas du tout à la vie ? Mais dans ce cas-là, pense un peu à Jong Ho qui fait tout pour toi et qui s'inquiète réellement. Si tu mourais, tu crois qu'il se sentirait comment ? Et moi ? Je ferais comment pour le regarder dans les yeux si tu es morte alors que j'essayais de te protéger ? Je devrais vivre dans la honte pour toujours ! Alors le minimum, ce serait que tu sois coopérative ! » s'énerva-t-il, toujours aussi prolixe.

« Je ne risquai absolument rien avec l'intendant Yun Ho. » objectai je. « Je pensais te l'avoir bien fait comprendre. Moi non plus je ne veux pas prendre de risques inconsidérés. » lui fis je remarquer.

« Mais ce n'est pas une question de prendre des risques inconsidérés ! » s'exaspéra Yeo Sang. « C'est une question de prendre des risques tout court. A chaque fois que tu t'éloignes de moi, tu risques de faire une mauvaise rencontre de laquelle je ne pourrais pas te protéger. Je ne sais pas si tu en as conscience mais mon rôle, c'est de donner ma vie pour toi s'il le faut. Et je le ferai sans hésiter. Si je dois mourir pour que tu survives, mon devoir sera accompli. Mais si je te survis, c'est le déshonneur. Et pire que ça. J'aurais manqué à ma parole. Parole que j'ai donné à celui que j'estime plus que tout. » expliqua-t-il, contrarié.

Je passais sur le fait que son honneur avait l'air de passer avant sa vie, ce qui était une pensée typiquement coréenne à mon sens.

« Ce que j'essayais de te dire, c'est que je n'ai pris aucun risque. » tentai je de lui faire comprendre, calmement.

Il fallait faire redescendre la tension. Je n'avais pas l'impression que Yeo Sang était vraiment en colère contre moi mais plutôt qu'il avait peur pour moi. Et je ne pouvais pas en vouloir à quelqu'un de s'inquiéter pour ma santé.

« Yun Ho est un ami et s'il l'avait fallu, je suis persuadée qu'il m'aurait protégée. En plus, le jardin est gardé. »

« Parlons-en, de tes amis... » soupira-t-il. « L'intendant du palais ? Vraiment ? Pourquoi pas le chef de la garde Hanyang, pendant qu'on y est ? Si vous vous connaissiez depuis l'enfance, que vous aviez grandi ensemble, j'aurais compris. Mais ce n'est pas le cas. Par conséquent, votre relation est forcément ambiguë. Et tu ne peux pas te permettre de fréquenter tous les hommes que tu connais dans ta condition. J'ai bien compris que ton père t'encourageait à entretenir les espoirs de deux hommes différents pour des raisons sans doute politiques et probablement un peu douteuses mais ce n'est pas une raison pour te comporter comme la dernière des gisaeng. Tu as un statut à préserver, d'autant que les regards sont rivés sur toi en tant qu'étrangère. Tu ne peux pas ruiner la réputation de la famille Choi en laissant penser que tes mœurs sont légères. » plaida-t-il.

Le souhait du roiWhere stories live. Discover now