.IX. Voyage, voyage...

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À la sonnerie de 16 h 00, alors que d'ordinaire je suis toujours le premier à sortir de la classe, aujourd'hui je traîne la patte. La raison : je suis censé attendre Aiden, un homme qui me plaît affreusement et qui m'invite étrangement, alors que je ne le connais pas vraiment. Comme vendredi, j'ai une petite boule au ventre, mais j'appréhende moins car la première fois s'est très bien passée.

Alors que je sors de la salle, Marvin m'interpelle :

-Écoute, mec, pour la soirée, je suis vraiment désolé, tu sais je...

-Ah mais il n'y a pas de soucis, je m'en fous, moi ! le coupé-je.

-Bah, vu ce que Clément à fait... je trouvais ça un peu craignos, quoi.

-Bien sûr, mais c'est pas toi qu'il faut blâmer, c'est ce trou du cul, là.

-Sandy sait ? me demande-t-il timidement.

-Que ?

-Que c'est moi qui voulait lui présenter, dit-il.

-Ah non je ne lui ai pas dit, je n'y ai même pas pensé. Mais tu sais Sandy s'en bat les flans, elle est imperturbable, tu la connais. T'as peur ou quoi ? Tu m'as l'air tout timide, fais-je en plaisantant.

Marvin rit.

-Bah, je sais qu'elle est aussi impulsive que toi, avoue-t-il.

-Mais non, y'a pas de malaise !

Sur cette dernière réplique je le prends dans mes bras et lui fais de nombreux bisous successifs sur la joue.

-Ça te dirait qu'on aille se manger un morceau ? me demande Marvin.

-Oh non, je suis désolé, je réponds gêné. J'ai déjà un truc de prévu. Mais quand tu veux il n'y a pas de soucis !

-OK, t'inquiète une autre fois. Bon j'te laisse, à plus, p'tit pédé !

Cette conversation sans fond me détend un peu. Mais me met aussi un peu en retard. Pour ne pas qu'Aiden croit que je me fais désirer, j'accélère le pas.

Il est dehors. Il porte une veste chaude, imitation daim, qu'il n'avait pas ce matin, dans laquelle il plonge ses deux mains dans les poches avant. Son cou est aussi rentré dans ses épaules, à cause du froid, et il fait de petits pas un forme de cercle, signe d'impatience.

-Hey, fais-je en arrivant à sa hauteur.

-Bonsoir jeune homme, où voulez allez ? plaisante-t-il, toujours avec son sourire.

-Au Ritz, ça me suffira.

Il rit.

-Je connais un endroit beaucoup plus sympa.

Sur le chemin, je me surprends a être assez détendu avec lui. Je ris vraiment à ses blagues, lui aux miennes. Et j'ai retrouvé ma répartie. Aussi, j'arrive à formuler des phrases correctes, même en le regardant. J'ai fais de sacrés progrès.

On s'arrête devant un petit café en centre ville. Dedans, la décoration est moderne, beaucoup de gens sont attablés devant des sucreries et des tasses fumantes, et la musique diffusée en fond n'est autre que la radio. En somme, un petit café qui vient juste d'ouvrir, et bien sympathique.

-Alors, commence-t-il une fois que nous sommes assis, tu veux quoi ?

Ses yeux profonds percent les miens, comme si quelque chose se cachait derrière ma pupille.

-Oh, la même chose que toi, lui dis-je.

-Tu ne sais même pas ce que je vais prendre.

-Non, mais ça sera forcément bon.

Il me regarde un instant, et sourit, avec un air de défis.

Lorsque la serveuse arrive, il demande :

-Deux muffins pommes, cannelle, s'il vous plaît. Et deux cappuccinos. Alors, ça te semble bon, me questionne-t-il ?

-Pour être très franc avec toi, le muffin est mon gâteau préféré.

-Hum, qui l'eut cru ?

Cet homme m'intrigue réellement. Il est très avenant avec moi, mais il joue la carte du mystère. Je ne sais pas s'il flirte avec moi, je ne connais pas son histoire, je ne sais même pas son âge.

-Aiden, quel âge t'as ?

-Vingt-quatre. Toi ? Seize ?

-Je vais faire dix-sept en Mars, là, ouais.

-Gamin, marmonne-t-il en me regardant.

Je lui fais un doigt d'honneur, ce qui le fait rire.

-Et du coup, commencé-je quand la serveuse nous apporte les muffins et les boissons, tu pars quand exactement aux États-Unis ?

-Tu veux savoir la date pour la réserver et partir avec moi, c'est ça ?

-T'es du genre à inviter des inconnus à partir avec toi ? dis-je en plaisantant.

-Non, c'est pour ça que d'abord, j'apprends à te connaître.


Je le regarde, décontenancé, en train de croquer dans son gâteau, me fixant d'un air malicieux.

JoWhere stories live. Discover now