.LV. Dans les cieux

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C'était prévu depuis longtemps : je passe les fêtes de fin d'année avec ma famille, en France. Aiden, lui, les passe aussi avec sa famille, mais ici, aux États-Unis. Au début, je trouvais ça triste. J'imaginais mal un Noël sans lui. Mais j'ai tellement hâte de revoir toute ma famille que finalement, j'arrive à me faire à l'idée, même si cela reste un peu amer.

- Tu vas me manquer, p'tite mouche, dit Aiden alors que je referme ma valise.

- Toi aussi, tu vas me manquer. Ça va me faire drôle de regarder la télé le samedi soir sans te voir.

- Dans ce cas, tu me verras sur ton téléphone. En FaceTime. On va faire un tour en ville, avant ton départ ?

Mon avion décolle demain à 06 h 00 du matin, et je suis censé arriver à Toulouse le Jeudi 15 Décembre, aux alentours de 19 h 00.

Je vérifie une dernière fois que je n'ai rien oublié et laisse Aiden me guider là où bon lui semble.

Le soleil commence à se coucher, laissant sa petite chaleur partir avec lui alors que je ciel rougit lentement. L'air est frais. Pas froid, c'est quand même la Californie, mais frais. Frais, dans le sens où l'air est respirable et agréable. Beaucoup de gens font comme nous et se baladent au hasard dans les rues de la ville. Certains font encore du lèche vitrine, d'autres cherchent un bon restaurant où diner ce soir. Je reconnais certains touristes, même, surement venus ici pour les fêtes.

Aiden et moi descendons la rue principale en direction de la plage. Sur les pavés blancs qui précèdent le sable encore chaud, la foule est dense. Comme chaque seconde de chaque jour, des joggeurs, des accros à la musculation, des skateurs ou encore des gens en rollers viennent ici pour pratiquer leur sport. Certains sont assis, en train de déguster un fast-food emporté, ou une glace. D'autres traversent avec des enceintes diffusant leur musique. Il y a des vendeurs, des magiciens... j'adore cet endroit. C'est certainement le meilleur endroit que je n'ai jamais connu.

- Oh mon Dieu !

La voix stridente qui vient de derrière moi me fait sursauter. Une jeune fille accourt vers nous, suivie de deux autres adolescentes de son âge. Elles ont les yeux écarquillés et les bouches grandes ouvertes pendant qu'elles sautent partout en dégainant leur téléphone.

- Aiden Harris ! Je suis trop contente !! On peut avoir une photo ? se remet à hurler la fille.

- Bien sûr, répond Aiden en souriant.

Il se place alors à côté de chaque fille en les enlaçant d'un bras et en dégainant sont plus beau sourire pendant qu'elles se contentes, excitées comme elles ne l'ont jamais été, d'appuyer des dizaines de fois d'affilée sur le bouton pour prendre la photo, afin d'être sûres d'avoir la bonne prise.

Ces dernières semaines ont été vraiment spéciales. Je m'étais habitué à voir le visage d'Aiden placardé sur les murs de la ville, mais j'ai encore un peu de mal à être familier avec ces gens qui nous arrêtent dans la rue pour prendre une photo avec la star de l'émission, ou demander un autographe, ou encore nous prendre « discrètement » en photo quand on est dans les lieux publics. Ça a aussi affecté notre vie privée maintenant, parce que Aiden et moi ne sortons plus dans de tels lieux publics rien que nous deux. Pour ne pas éveiller les soupçons. En effet, si les gens, si les médias, nous voyaient tout le temps ensemble, partout, ils vont finir par se demander qui je suis, faire des recherches, et des découvrir des trucs... qui feront éclater la vérité. Oui, on devient complètement parano. Mais nous ne faisons que suivre les conseils de Frank, qui s'y connait certainement plus que nous. Alors du coup, dès que l'on veut sortir au restaurant, ou simplement aller à la plage, quelqu'un d'autre est de la partie. C'est très souvent un membre de l'équipe, voire tous ensemble. C'était bizarre au début. Mais bon, je m'y suis fait.

Une fois les photos faites, Aiden s'éloigne vite de ses groupies et nous continuons notre petite promenade.

J'enlève mes chaussures pour marcher dans le sable. J'adore sentir ces millions de petits grains glisser entre mes orteils quand je marche. Ils dégagent encore la chaleur du soleil qui s'est accumulée dans la journée, mais le sable est assez froid en profondeur. Nous allons jusqu'au bord de l'eau, ou nous nous asseyons et regardons les vagues venir courir jusqu'aux bouts de nos orteils. Le soleil, au loin, cet immense point rouge, s'enfonce dans l'eau presqu'à vu d'œil.

Je suis tellement heureux d'être là.

- Alors, quelle est la première chose que tu vas faire en rentrant chez toi ? me demande Aiden.

- Je taperais « Aiden Harris » sur Google pour voir ce que les médias disent sur toi et s'ils n'ont pas découvert notre petit secret.

- Il faut que tu arrêtes de voir ça comme une menace, comme si on vivait avec l'épée de Damoclès au-dessus de nous.

- Ah mais je ne le vois pas du tout comme ça ! Je voulais juste... faire de l'humour. Je n'ai pas peur que tout se sache, tu sais.

- Alors pourquoi tu as supplié Stefania de ne pas le faire ?

- Aiden, regarde l'océan et tais-toi.

Il rit.

- J'imaginais passer un autre genre de Noël, avoue-t-il.

- Moi aussi. Mais je ne pouvais pas le faire sans ma famille. Et toi sans la tienne. Quand tu seras assez riche, on offrira à tout le monde des billets pour Noël pour qu'ils puissent tous venir ici !

Je ne dis plus rien pendant un instant. Lui non plus.

- J'aurais aimé que... 'fin, je nous voyais tous les deux déballer les cadeaux sous le sapin, au coin du feu. Toi habillé en papa Noël maigrichon et tout, je dis.

- Tu aurais fait la mère Noël, Jo ?

- Tu gâches toujours tout ! je râle en jetant un petite poignée de sable sur Aiden.

Il me fait ce sourire. Ce sourire qui veut dire je t'aime quand il ne veut pas le dire à haute voix. Je réalise que pendant ces deux semaines il va vraiment me manquer. Je réalise que depuis des mois entiers, je n'ai pas passé plus de quelques heures sans lui. Ça va vraiment me faire bizarre.

- T'as déjà fait l'amour sur une plage, Aiden ? demandé-je.

- C'est pas aussi bien que dans les films. T'as du sable qui colle partout, parfois t'as des rafales de vent... ça ne vaut rien.

- Je sais.

Aiden se fige avec de gros yeux lancés sur moi.

- Comment ça, tu sais ?!

Je ne peux m'empêcher de rire devant sa mine, et maintenant c'est lui qui me lance du sable.


Alors nous restons ici encore quelques minutes, quelques heures, à rire, à parler, à se taquiner. Et puis la nuit tombe. Et il en profite pour m'enlacer. M'embrasser. M'aimer. À mon réveil, je courrai vers mon avion que j'aurais faillit louper à cause d'un réveil tardif, et je me souviendrai du moindre détail de cette merveilleuse nuit. Et j'en garderai le même sourire que je porte aujourd'hui.

JoWhere stories live. Discover now