.XXXIX. Euphoria

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Ce matin, lorsque le réveil sonne et que j'ouvre les yeux, le lit est vide. J'entends alors un bruit lointain d'eau qui coule. Aiden est entrain de prendre sa douche. Je pourrais le rejoindre, mais le rayon de soleil qui traverse la fenêtre et vient brûler mes jambes me donne envie de me prélasser ici pour toujours. Malheureusement, je ne peux pas. Déjà parce que la Terre tourne, donc d'ici quelques minutes le rayon aura disparu, mais aussi et surtout parce que j'ai cours aujourd'hui. Et je l'avoue, j'ai un peu hâte.

Je saute du lit et enfile un caleçon avant de me diriger vers la cuisine. Aiden est toujours sous la douche, je lui prépare ses tartines grillées. Je ne comprends même pas ce qu'il fait debout à 07 h 00 du matin.

Tout en mâchant bruyamment, je prends mon téléphone pour faire défiler le fil d'actualité de Facebook, Instagram ou encore iFunny, et je manque de m'étouffer à cause d'une vidéo de chaton qui éclate un ballon de baudruche rempli d'eau. Il suffit de peu pour me faire rire.

—Eh ben alors, ne t'étouffe pas, dit Aiden en sortant de la douche avec une simple serviette blanche autour de la taille.

—T'en as mis du temps, j'ai cru que tu allais finir par te noyer.

—C'est à dire que c'est pas forcément super facile de se doucher avec des côtes fêlées.

—Oh pardon, petit bout, j'avais oublié. Pourquoi tu m'as pas demandé de t'aider ?

—Je voulais pas te réveiller, me dit-il en déposant un baiser sur mon front.

—Qu'est-ce ce que tu fais debout cette heure là, d'ailleurs ?

—J'ai rendez-vous avec Frank et les autres membres de l'équipe dans une demi heure, au salon. Ils ont finit de le rénover, alors tout ça va devenir de plus en plus concret.

Je n'arrive toujours à réaliser ce qui nous arrive.


Avant d'entrer dans le bâtiment qu'est ma nouvelle école, je m'arrête devant la porte pour fumer une énième cigarette. C'est alors que j'entends une voix suraiguë derrière moi :

— Heeey !

Je me retourne et aperçoit alors une silhouette qui m'est familière.Petite et fragile, la fille de ma classe que j'ai rencontré hier avance vers moi, toujours souriante.

—Salut, je réponds. Tu vas bien... excuse-moi, je ne me souviens plus de ton prénom, j'ai oublié.

—Tu ne l'as pas oublié, dit-elle, je ne te l'ai pas dit. Je m'appelle Bonnie. Et toi ?

—Jo, dis-je simplement en essayant de lui rendre un sourire pareil au sien.

—Enchanté, Jo. Je viens d'Allemagne, et toi ? Tu as un petit accent français je trouve !

—Oui, je viens de France.

Cette fille m'épate un peu, je dois le dire. Elle est vraiment souriante,ses yeux ne cessent de se plisser. Elle transpire la gentillesse. Je ne la connais pas, mais étant un peu sauvage moi-même, c'est le genre de personne qui vous met directement à l'aise.

On passe ainsi une dizaine de minutes à parler de nos vies respectives,et on monte en cours. Notre emploi du temps nous indique que nous commençons par histoire de l'art : la seule matière qui me sera inutile et que je hais déjà. Mais je n'aurais pu la haïr plus avec un autre professeur.

Il est assis sur son bureau, regardant les élèves entrer au compte-goutte de la tête au pied. Entre ses sourcils se trouve une ride marquée par un regard sans cesse furieux. Les coins de sa bouche descendent dangereusement vers le sol, comme attirés par un aimant. Ses cheveux mi-long et gras sont de la même obscurité que ses habits et que ses yeux. C'est le professeur Rogue en personne.

JoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant