.LII. Deux mojitos, s'il vous plaît !

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Les américains aiment la hauteur. Et les soirées. Alors, quoi de mieux que de faire la cérémonie sur le toit d'un immeuble ? Cela me rappelle le diner que j'ai eu avec Sandy, très récemment.

Après être passés une éternité dans un ascenseur qui gravissait les étages à vive allure, et après avoir monté une dizaine de marches en ferraille blanche, nous arrivons au sommet de la tour. Une chose est sûre, c'est que l'équipe était très attendue. En effet, plusieurs personnes se ruent sur nous lorsqu'ils nous voient débarquer. Bien sûr, je dis « nous », mais moi, je suis invisible. Ils en ont surtout après Frank. Le premier homme à venir le voir doit avoir à peu près son âge, les cheveux noirs et les yeux bleus. Ses dents sont refaites, il n'y a aucun doute là-dessus. Il parle fort et présente l'équipe à toutes les personnes qui passent dans un rayon inférieur à un mètre de nous. Je n'ai aucune idée de qui il est, mais il semble peser dans le milieu, et inspirer le respect.

Je ne saurais dire combien de personnes sont ici, mais juste que tout ce monde me surprend. D'autant plus que je sais que tous les invités ne sont pas encore là. Je reconnais certains cameramen en costume, et des maquilleuses en longue robe de soirée. Je ne les ai jamais vu habillés d'une telle façon. Quoique, moi non plus, je n'ai jamais porté un truc pareil. Je reconnais également quelques journalistes qui ne sont pas méconnus ici, aux États-Unis. Il y a également un grand blogger, mais je ne connais rien d'autre que son visage. Pratiquement tous tiennent une coupe de champagne dans leur main ou bien un cocktail, bien plus approprié à une heure pareille. Aux bordures de la terrasse s'étalent des stands immenses d'amuses-bouches qui plaisent visiblement aux invités.

Alors que j'ai à peine le temps de m'habituer au lieu, Aiden m'est déjà retiré par une bande d'hommes en costard, et une blonde en robe rouge. Lui et ses amis s'alignent avec ces gens et quatre photographes prennent des clichés de tous les angles, et lorsqu'un part, un autre arrive, comme si cette séance photo ne s'arrêtera jamais. D'autres personnes s'installent sur les photos, s'échangeant les places comme si ces jeunes tatoueurs n'étaient qu'un paysage devant lequel on pose.

Le spectacle dure une dizaine de minutes. Longues minutes pendant lesquelles j'attends impatiemment qu'on me rende mon Aiden pour qu'il puisse me tenir compagnie. Longues minutes pendant lesquelles chaque flash m'aveugle et m'irrite tant tout ceci est superficiel. Longues minutes pendant lesquelles mes jambes me piquent à force de rester debout, immobile, derrière les photographes. Et quand ceux-ci de dissolvent et que je pense enfin pouvoir retrouver ma compagnie, un autre homme attrape Aiden pour lui parler, et d'autres encore attrapent le reste. Le seul dont la conversation ne dure pas longtemps est Jake, qui vient voler à ma rescousse dès qu'il voit mon regard implorant de merlan frit.

― Hey, mon p'tit Jo ! Comment tu vas ? demande-t-il en me donnant une petite tape sur l'épaule.

― Je savais que je me ferais chier, mais quand même pas autant, je souffle.

― Quoi ? Mais ça ne fait même pas une demi-heure qu'on est là !

― Je sais, justement ! J'ai l'impression que ça fait déjà un mois que je suis planté là, j'ose pas imaginer ce que ça va être de rester ici jusqu'à minuit.

― Il doit y avoir... cinq-cent personnes ici, rétorque Jake. Tu vas forcément trouver quelqu'un à qui parler.

― Oh je t'en prie, Jake, ne dis pas de bêtise. Si parler à des étrangers était mon point fort, je ne serais pas ici.

Juste le temps d'un dernier sourire, et Jake est de nouveau interpellé par de nouvelles personnes qui veulent lui poser des questions, prendre des photos avec, réserver une date pour une prochaine interview... Quant à Aiden, je l'ai carrément perdu de vue, ainsi que Hauni. Aucun moyen de savoir s'ils sont même encore sur la terrasse. Alors que je les cherche des yeux, un point de couleur s'impose devant mes yeux. À l'instant où je vois ce bleu criard, mon cœur fait un bond curieux dans mon poitrine, et je sens comme mes jambes se ramollir. Mon premier réflexe est de me mettre à l'abri de sa vue.

JoWo Geschichten leben. Entdecke jetzt