.XVII. Une lettre

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- Tu es sûr que tu ne veux pas rester encore un peu ?

Aiden a l'épaule appuyée sur le mur, les mains dans les poches de son pantalon de jogging, et il me regarde en train d'enfiler mon manteau et mon écharpe.

-Oui, je vais rentrer. Hier je n'ai pas prévenu mes parents que je rentrais pas, je réponds.

Il rit.

-Oui, il faut dire que tout s'est passé très vite. (Aiden s'approche de moi, prend mon visage dans ses mains et dépose un baiser tendre sur mes lèvres.) Tout ça, ça faisait si longtemps que j'attendais que ça se passe.

-Tout vient à point à qui sait attendre, dis-je.

-Et je ne regrette absolument pas d'avoir attendu. J'ai rarement été aussi bien.

Cette fois, c'est moi qui l'embrasse. J'ai l'impression que jamais je ne serais capable de m'arrêter.

Lorsque je passe la porte, je m'arrête un moment, et caresse mes lèvres comme si celles d'Aiden y étaient encore. Je réalise le moment, la situation. Je souris bêtement à mesure que je sens le bonheur enfler en moi. Je pensais que c'était sans espoir, qu'il était devenu juste un ami.

« Tu me manques déjà. » me texte Aiden.

Quand je rentre chez moi, Sandy, Damien et Adèle sont tous les trois attablés et ont pratiquement finis leurs assiettes.

-Eh bien Jo ! s'exclame Adèle. On a bien cru que tu étais mort !

-Ouais, c'est pour ça que vous avez appelé la police en mangeant paisiblement, je raille.

-Tu sais très bien que la bouffe ne mérite aucun sacrifice ! lâche Sandy.

-On a essayé de t'appeler, dit Damien, mais tu répondais pas. C'est malin.

-Oui j'ai pas... fait attention, réponds-je.

-Sers toi, me propose Adèle. Il reste des frites dans le saladier.

Sur ces paroles, mes parents se lèvent et enfournent leurs ustensiles sales dans le lave-vaisselle. Sandy me sonde, un sourire malicieux, pour que je lui raconte ma nuit. Elle doit se douter de quelque chose. D'autant plus que mon sourire permanent trahit tout.

-Bon, commence ma mère, on va faire quelques courses avec papa. À toute à l'heure.

-Waouh, fais-je, vous êtes vachement pressés, vous venez à peine de finir de manger.

-Plus tôt c'est fait, mieux c'est ! répond Damien, pas très enthousiaste à l'idée d'accompagner sa femme.

Alors que je me sers des frites, j'entends la porte se fermer. Aussitôt, Sandy m'attaque :

-Alors ? Cette nuit ? T'étais passé où ? Chez Aiden ?

-Sandy, je viens juste de rentrer...

-Oh, allez, comme si tu ne mourrais pas d'envie de tout me raconter !

Je m'assoie lentement au comptoir, mets délicatement un peu de mayonnaise dans un coin de mon assiette et écarte les frites, pour choisir en premier la plus belle à mes yeux. Sandy meurt d'impatience. Mais elle ne réagit pas, car elle sait que si elle le fait, je prendrais encore plus mon temps, pour l'embêter.

-Hier, commencé-je, au lycée, Aiden m'a... comment dire... il m'a avoué ses sentiments, quoi.

-Jure ! s'étonne-t-elle.

-Attends. Il m'a fait une tirade tu vois, et j'étais sur le cul à ce moment. Je ne savais pas comment réagir. Et puis il est partit, et nous on est rentrés aussi. Et je faisais que penser à ça, je me demandais si c'était vrai ou pas. (Sandy me regarde telle une enfant de quatre ans à qui on raconterait une histoire passionnante de princesse et de dragons. Ses yeux sont dilatés, elle tient sa tête dans ses mains et ses lèvres sont rentrées dans sa bouche, de sorte qu'une seule ligne noire lui complète le visage. Elle ne dit pas un mot.) Et hier soir, quand on était dans ma chambre, il m'a envoyé un message, me demandant de passer. Et j'ai été le voir. Et puis voilà.

JoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant