Chapitre 2 : Take me as I am

1.9K 111 18
                                    


«La plupart des gens ne meurent qu'au dernier moment : d'autres commencent et s'y prennent vingt ans d'avance et parfois davantage. Ce sont les malheureux de la terre

Anna relut une dernière fois cette phrase, essayant de la conserver dans un petit coin de sa mémoire. Se sentait-elle concernée ? Probablement, oui. Elle avait souvent l'impression qu'il n'y avait que l'écriture qui pouvait la comprendre, seule la littérature pouvait exprimer clairement ce qu'elle ressentait. Malgré la complicité qu'elle avait avec son père, Anna était incapable de lui parler d'autres sujets que de livres, de cours, d'Histoire... Elle n'arrivait pas à se confier, elle était incapable de mettre des mots sur sa solitude, sa douleur, son manque de confiance en elle. Tout ça était trop difficile et, pour être honnête avec elle-même, elle n'avait aucune envie que son père sache qu'elle était malheureuse. Premièrement, parce qu'il ne pourrait rien y changer, et, deuxièmement, car elle aimait savoir qu'au moins une personne sur cette terre pense que sa vie n'était pas totalement misérable.

— Qu'est-ce que tu lis ?

Surprise, Anna lâcha son livre et releva son regard vers le garçon qui venait de lui adresser la parole. Et c'était bien la première fois qu'on venait la déranger à la bibliothèque, pendant l'heure du déjeuner qui plus est.

— Désolé... Je t'ai fait peur ? Continua-t-il, un sourire en coin, devant le visage hébété de la jeune fille

Ethan Franck, juste devant elle, à la bibliothèque. La jeune fille l'observa en sentant son cœur se resserrer légèrement. Le garçon avait un visage fin sans pour autant avoir des traits féminins, des yeux marrons clairs, plissés sur le coin des paupières comme s'ils avaient le pouvoir de rire et de longs cils soyeux encadraient son regard chaleureux. Ses cheveux étaient châtains, mais ils avaient des reflets blonds, presque dorés.

— Euh... Non, se reprit-elle en retrouvant enfin ses esprits, C'est juste que, j'ai plutôt l'habitude d'être seule ici, à midi.

— Oh...Tu veux que je...

— Non ! L'interrompit-elle confuse, Je voulais dire... Enfin, la bibliothèque n'est pas à moi !

Tout en disant cela, elle dégagea son sac de cours du fauteuil à coté d'elle et Ethan s'y installa en lui souriant. Mais qu'est-ce qu'il pouvait bien faire ici ? S'étonna Anna en silence en l'observant du coin de l'œil. Puis elle replongea soudainement son nez dans son bouquin pour éviter son regard lorsqu'il l'interrompit une nouvelle fois :

«Voyage au bout de la nuit» ? J'ai adoré ce roman !

— Tu l'as lu ? S'exclama-t-elle, surprise

Elle se tut, mal à l'aise. Anna ne l'avait pas contrôlé, mais son ton indiquait clairement qu'elle le prenait pour un parfait illettré. C'était d'ailleurs ce qu'elle pensait de tous les élèves de ce lycée.

— Enfin, pas que tu sois...

— Que je sois quoi ? L'interrogea Ethan, qui semblait bien amusé par la manière dont elle s'emmêlait les pinceaux.

— Je voulais dire que ... Enfin...

La jeune fille ne s'était jamais sentie aussi stupide. Ethan la regardait de ses grands yeux verts et elle se perdait complètement dans son regard. Il faut dire que même si Anna n'était pas très portée sur les garçons, Ethan Franck avait un charme qui était loin de la rendre indifférente. Il fallait reconnaître que le jeune homme faisait bien craquer toutes les femmes de cet établissement, jusqu'à ces professeurs féminines - et même masculins - dans certains cas. Ce n'était pas pour rien qu'il sortait avec la plus belle fille de l'école, la sublime Gabrielle Gallien.

NantisWhere stories live. Discover now