Chapitre 12 : Too close

817 58 20
                                    


Gabrielle traversa la cour du lycée Saint-Richard en coupant la musique qui résonnait dans ses oreilles. Elle fit glisser son casque autour de sa nuque et reporta son regard autour d'elle. C'était la rentrée et le lycée était morose, ce matin. On était fin avril et une pluie fine coulait le long des briques rouges de Saint-Richard. Gabrielle resserra son blouson sur sa taille fine et essuya une goutte de pluie qui venait de lui tomber sur le front. Elle s'engouffra à l'intérieur du lycée pour se réchauffer. Son regard tomba sur Ethan et elle se dirigea vers le garçon.

— Tu fais le mort ? Cingla-t-elle en arrivant à sa hauteur.

— Pardon ? Rétorqua-t-il en levant les yeux de son téléphone portable.

— On n'a eu aucune nouvelle de toi de toutes les vacances, qu'est-ce que tu faisais ?

— Tu es bien la première à t'en inquiéter, ironisa-t-il en rangeant son portable dans la poche de son jean.

La jeune fille l'observa d'un air blasé. Elle l'avait littéralement harcelé ces deux dernières semaines, il ne pouvait pas prétendre qu'elle ne s'était pas inquiétée pour lui.

— Je bossais mon concours Science-po, précisa-t-il face à son regard incendiaire.

— Je croyais que tu avais déjà passé tes épreuves écrites ?

— Oui... Je bossais l'oral pour fin mai.

— Attends, tu as eu l'écrit ? S'exclama-t-elle, perplexe, Pourquoi tu ne l'as dit à personne ?

— J'ai eu le résultat pendant les vacances, c'est tout.

Sympa, songea-t-elle. Ethan la bassinait avec Science-po depuis le collège et, aujourd'hui, il ne pensait même pas à la prévenir qu'il avait passé la première étape du concours.

— Enfin bref, reprit la jeune fille, Tout ça t'a empêché de répondre à mes SMS peut-être ?

— Non, ça, je n'avais juste pas envie.

— Ethan, souffla Gabrielle, exaspérée, Tu vas me faire la tête pendant encore combien de temps ? Je pensais qu'on était de nouveaux amis. On s'est bien amusés à ton anniversaire, juste entre nous, qu'est-ce qu'il se passe encore ?

— Je ne te fais pas la tête Gabi, j'arrête, c'est tout.

— Tu arrêtes quoi ?

— De me prendre la tête sur tout ça, toi et Raphaël, Noah et Anna, j'en ai marre. Je tire une croix sur tout ça. Je ne veux plus rien avoir à faire avec vous tous.

— T'es sérieux ? L'interrogea-t-elle, pas vraiment ravie d'être rangée dans la même case que les personnes qu'il venait de nommer avec amertume.

— Tu sais, reprit-il, On aura beau passer notre temps à accuser Noah et Ellie de ce qu'il nous arrive, le fait est que c'est toi qui m'a trompé deux fois, que c'est moi qui me suis servi d'une fille juste pour te rendre jalouse et me venger. Ce n'est pas eux qui ont fait ça, c'est nous. Et je ne veux pas être cette personne. Je ne veux plus être cette personne Gabi, ce n'est pas moi.

— Mais...

— Alors tant pis si ça implique de manger tout seul au réfectoire ou de ne plus faire de soirées au Palace, la coupa-t-il, Je m'en remettrai.

Ethan la planta au milieu du hall pour rejoindre sa salle de classe. Il sera en avance, tant pis. Gabrielle l'observa s'éloigner, perplexe, se demandant à partir de quel moment sa vie si parfaite était devenue cet abominable cauchemar. Elle, Gabrielle Gallien, la petite-amie du parfait Ethan Franck, la meilleure amie de cette peste d'Ellie Lefevre, la fille du grand politicien Jean-Claude Gallien, la cousine de ce dépressif de Lucas, elle et plus rien. Elle n'était plus la petite-amie parfaite et idéalisée de ce lycée, plus la meilleure amie compréhensive, plus la fille de ce père qu'elle haïssait de jour en jour, et avait-elle seulement été un jour une cousine pour Lucas et Rachel ? Elle n'était plus rien. Une tache parmi une autre. Une de ces filles qui s'était faite avoir par Noah Khan, une de ces filles qui complétait l'entourage d'Ellie pour ne pas lui donner l'impression d'être l'insociable qu'elle était pourtant, une de ces filles parmi les autres. Une fille banale et sans intérêt. Tout ce qui avait fait d'elle "Gabrielle Gallien" avait disparu et elle se retrouvait désormais au naturel, sans artifice, ni paillette. Elle était seule.

NantisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant