Chapitre 22 : Last Christmas

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Anna observa sa mère d'un air mauvais. C'était le soir du réveillon et, comme à son habitude, Cécile Joly s'était mise sur son trente-et-un. Un épais rouge à lèvres faisait ressortir son sourire hypocrite et son brushing était si volumineux qu'il cachait l'heureux cadre de famille qui se trouvait sur le mur, derrière eux. Elle portait une robe noire à paillettes et ses yeux étaient entourés de la même couleur sombre, faisant ressortir ses iris verts.

Anna esquissa un sourire ironique en bifurquant son regard vers sa jeune sœur qui se trouvait à côté. Ophélie et sa mère étaient des portraits crachés, ce même parfum d'arrogance pour une même médiocrité. Chez elles, c'était comme s'il n'y avait que l'apparence, mais Anna reconnaissait que cette apparence était plutôt réussie. Heureusement, songea la jeune fille, Puisque c'était la seule chose qu'elles avaient. Ophélie portait, quant à elle, une courte robe rouge moulante qui mettait en valeur ses formes déjà très féminines pour son âge. Côte à côte, on aurait pu croire que c'était Anna la plus jeune. En effet, la jeune fille n'avait pas réellement fait d'efforts sur sa tenue - car elle se fichait éperdument de ce repas de Noël – et s'était contentée d'un jean noir et d'un chemisier blanc, ses cheveux épais attachés en un chignon et c'était à peine si elle s'était maquillée, car seul un trait fin d'eyeliner reposait au dessus de ses cils.

En silence, Anna continua son introspection de la table. Sa grand-mère était tout comme sa fille, bien clinquante, mais peu brillante. Elle l'observa un instant en se retenant de ne pas exploser de rire. La vieille femme tentait tant bien que mal de manger ses huîtres sans salir son beau maquillage, mais, de toute évidence, cela s'avérait compliqué. Las de ce petit spectacle ridicule, Anna se retourna ensuite vers son grand-père qui mastiquait dans son coin un bout de pain sans se donner la peine de participer à la conversation. Il semblait s'ennuyer à mourir... Tout comme Anna qui restait d'ailleurs inexistante dans cette scène.

— Alors, ma petite chérie, murmura tendrement sa grand-mère en s'adressant à Ophélie, Tu es toujours avec ce jeune homme, le petit...

— Léo, compléta Cécile en souriant à sa cadette.

— Non, on a rompu, leur répondit Ophélie, probablement ravie d'accaparer une fois de plus l'attention de tout le monde.

Les deux femmes poussèrent un petit cri de surprise et se retournèrent vers la jeune fille, impatientes d'entendre la suite de l'histoire. Même si elles avaient déjà du l'entendre un million de fois, puisque les histoires d'amour d'Ophélie étaient toutes un peu les mêmes avec le temps.

— Oh non ! Enchaîna sa grand-mère, Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Il était si mignon !

— Trop étouffant, répondit vaguement la jeune fille qui adorait se faire prier.

— C'est parce que tu es comme moi, murmura Cécile à ses côtés, Tu es indépendante, tu n'aimes pas qu'un homme te dicte ta conduite.

Anna ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel. Se rendait-elle seulement compte de ce qu'elle disait ? Celle-là même qui se faisait courtiser par l'homme le plus riche et corrompu de la ville osait déclarer être une femme indépendante ? Personne ne pouvait être aussi dépendante aux hommes que Cécile Joly.

— Et ça va ? S'enquit la grand-mère, Tu t'en es remise ?

— Oui, bien sûr, rétorqua Ophélie en balançant ses longs cheveux en arrière.

— Moi aussi, ça va, si jamais ça t'intéresse, les interrompit Anna en réalisant à l'instant à quel point son intervention devait paraître désespérée, alors qu'elle avait juste voulu être ironique.

NantisWhere stories live. Discover now