Chapitre 5

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Mon sac sur l'épaule gauche, les cheveux trempés et le haut de mes vêtements trempés aussi ; je m'avance vers la maison. Mais ce qui a surtout été souillé est mon amour propre et ma dignité. C'est presque si je n'en ais déjà plus. Je me sens vraiment mal et je crois que je serais capable de me jeter sous la première voiture que je vais croiser. Je baisse la tête dès qu'un passant arrive vers moi et ne me lance pas un regard. S'ils en lancent un, je préfère ne pas le voir. Je dois vraiment faire pitié, trempée comme je suis à la tête et l'air de la fille déprimée et mal en point. Mais c'est ce que je suis, une rouquine en manque que personne n'arrivera jamais à sauver si cela continue de cette façon. Je crois que je suis totalement perdue et que je ne suis pas prête d'être repêcher non plus.

Je passe ma main dans ma chevelure rousse trempée et remet mon sac en place parce qu'il glisse sur mes épaules mouillées. J'aimerais disparaître sur le moment. Je me sens de trop sur cette planète. J'accélère le pas alors que j'arrive près de chez moi, là où je suis censée être domiciliée et me sentir bien et chez moi mais ce n'est pas le cas. Je ne me sens bien nulle part ; le malaise constamment dans mon corps, dans mon cœur et dans ma tête. J'ai même parfois peur de me trouver là où je suis simplement parce que les conséquences et les répercussions ne sont pas vraiment ce qui m'a toujours apporté de l'aide, surtout depuis CA. Je change de trottoir en quatrième vitesse et continue ensuite la route jusqu'à la maison.

Je tourne à droite et arrive dans ma rue. J'espère vraiment qu'aucun de mes harceleurs et autres ne va sortir de chez lui puisque certains vivent dans cette rue. Je marche encore plus vite, voulant à tout prix éviter ces personnes. Je les déteste de tout mon soul, pourquoi devrais-je être contente de les voir dans la rue, près de chez moi ? Ce serait vraiment un euphémisme. Je suis devant ma maison, sortant la clé de mon sac. J'insère l'objet dans la serrure et ouvre la porte, entrant dans la maison doucement pour ne pas faire trop de bruit. Je ne tiens pas à réveiller ma mère ou l'un de mes deux frères s'ils dormaient parce que me faire engueuler après ce que je viens de vivre -même si ce n'est pas la première fois qu'ils me plongent la tête dans les toilettes-, n'est pas vraiment ce que je désire. J'ai eu mon compte pour la journée.

Je me rends directement dans ma chambre, ne m'attardant pas à prendre quelque chose à grignoter parce que l'eau des toilettes pleine d'urine et de merde m'a totalement coupé l'appétit au point que je ne suis même pas sûre de manger ce soir. Je laisse mon sac tombé sur le sol, retirant ensuite mes vêtements. Mes stores sont fermés, heureusement parce que je ne m'en rends compte qu'un peu en retard. Je dépose mes vêtements sur ma chaise et prends mon pyjama dans mes mains. Je pivote légèrement et ce que je vois dans la glace me cloue sur place. Cela fait bien quelques temps que je n'osais plus me regarder dans un miroir mais maintenant que j'ai vu une partie, ma curiosité m'oblige à analyser mon corps dans les détails.

Depuis CA, je dois bien avoir perdu au moins presque 10 kilogrammes. Mes joues sont creuses et l'ont peut voir mes côtes. Mes cheveux ont perdu dans leurs éclats et sont assez plats. On dirait qu'ils sont morts. Mes bras et mes jambes sont extrêmement fins, on dirait des cotons tiges. Mes grains de beautés ont perdu dans leur intensité, ils ressemblent maintenant à des tâches de couloir difforme et irrégulière sur mon visage. Mon teint est encore plus pâle et blafard. Je me fais tellement peur que j'enfile rapidement mon pyjama pour ne plus voir cette horreur mais il reste encore mon visage que jamais je n'arriverais à cacher. Des poches gigantesques sous les yeux et le regard perdu et douloureux, je glousse pour faire descendre le boule qui me monte dans la gorge et baisse le regard vers mes pieds pour ne pas voir mes yeux s'humidifiés par les larmes.

« La peur tuera chacun d'entre nous avant même que nous puissions savoir que la peur, c'est nous qui la créons. »



Mise à partWhere stories live. Discover now