Chapitre 67

59 7 0
                                    

Je suis devant l'école, devant les grandes portes de l'enfer. Je n'ose pas faire un pas de plus et reste fixée devant celles-ci. J'ai même du mal à respirer, mon sac sur le dos avec uniquement la bretelle droite sur mon épaule et entourée de ma main droite. Mes cheveux volent dans le vent et je me pince les lèvres. Je ne veux pas retourner dans cet enfer. J'ose vraiment et seulement espérer que les choses ont changés pendant que je n'étais plus là. J'espère que plus rien ne sera comme avant. Je crois que j'espère vraiment trop que pour ne pas finir par être déçue. Je devrais arrêter d'espérer, sûrement que je ne serais plus jamais déçue des autres et de la vie.

Je prends une grande inspiration et pousse les portes battantes. Les couloirs sont vides et me paraissent si froid sans la cohue des autres étudiants qui sont tous en cours, quelque part en rue, à l'étude ou en train de faire je-ne-sais-quoi dans les toilettes. Je préfère ne pas imaginer et ferme les yeux, m'arrêtant même de marcher. Les portes se referment doucement derrière moi. L'air devient pesant d'un seul coup alors que tout contact avec l'extérieur est rompu par la fermeture des portes. Je rouvre les yeux et prends une nouvelle inspiration pour m'avancer dans le couloir vide et froid. J'en ai la chaire de poule. Je ne suis pas habituée à un tel vide, moi qui aie toujours connu les couloirs remplis même quand je fuyais mes démons.

Je passe ma main dans mes cheveux de feu et continue mon avancée jusqu'à mon prochain cours. Jeremy a prévenu l'école que je revenais aujourd'hui et même s'ils étaient surpris, ils ont évités de le mentionner. Comme les cours avaient déjà commencé, je devais me rendre au suivant en fonction de l'heure à laquelle j'arrivais. Comme le cours avait déjà commencé depuis une bonne demi-heure, je suis obligée d'attendre au moins vingt minutes avant la prochaine heure de cours. Je m'avance vers la salle qui est déjà occupée par d'autres étudiants et un autre professeur. Je ne sais même pas en quelle année ils sont ou qui est le professeur. Au pire, peu importe, cela ne changera pas beaucoup à ma vie. Je me laisse glisser contre le mur, sur la gauche de la porte et me retrouve assise sur le sol.

Mon cœur tambourine dans ma poitrine alors que les mots pour décrire ce que je ressens me manquent terriblement. Je prends mon nouveau cellulaire, tactile comme le précédent, dans la poche de mon sac à dos et le déverrouille. Je me rends sur « WordsWorld » pour passer un peu le temps et aussi, je ne m'étais plus connectée dessus depuis hier soir –enfin ce matin très tôt plutôt- et j'ai le besoin omniprésent –comme de voir Timothy aujourd'hui- de voir si Léa m'a répondu ou à vu le message –ou plutôt la brique- que je lui ai laissé. Je me connecte, enfin et me rends directement dans mes messages privés et remarque que j'en ai beaucoup. C'est l'effervescente autour de moi et je suis toujours aussi perdue ; voire même bien plus qu'avant. Je réponds à chacun et reste bloquée quand je vois qu'il ne me reste plus que celui de « Tragédie-sanglotée » alias Léa. Mon sang ne fait qu'un tour et un frisson me parcourt l'échine. Léa m'a répondu. Je me rue sur la discussion, l'ouvre et a lit, restant bloquée et ne réalisant pas ce que je suis en train de lire.

« Tragédie-sanglotée : Je suis vraiment désolée mais tu m'as fais une de ses peurs ! Tu ne peux pas imaginer à quel point ! C'est à ce moment-là que je me suis rendue compte que je m'étais trop attachée à toi, que j'étais devenue dépendante de toi. Et je vais t'avouer une chose, cela me faisait terriblement peur et continue de me faire peur ; encore et encore. Je suis désolée de t'avoir blessé, abandonner et fait du mal mais je ne pouvais pas faire autrement parce que j'avais peur de notre relation. Je ne sais même pas la décrire avec des mots. Je ne sais même pas ce que je pourrais faire, en réalité. Je sais que tu ne voudras pas me pardonner et que tu me détestes sûrement mais sache une chose, c'est que « je t'aime ». Je suis amoureuse de toi Sophia, je crois même depuis toujours. Dès le premier mot que j'ai lu à « Petitesse anormale », je suis tombée amoureuse de ton style d'écriture mais surtout de ta personne. Je t'aime Sophia, bien plus que personne ne pourra jamais t'aimer je suppose, bien plus que je n'ai jamais aimé quelqu'un. J'avais peur de te le dire parce que je ne voulais pas te faire fuir, mais je suis homosexuelle.
J'aime les filles. J'aime les filles et toi. J'aime les filles mais surtout toi parce que maintenant, il n'y a plus que toi que je vois même si je ne connais presque rien sur toi, à peine ton nom. Je suis tombée amoureuse de ta personnalité et non ton physique ou de tes origines. Je t'aime tellement Sophia que j'en souffre et que je me déteste de t'aimer autant et tu ne peux pas à savoir à quel point. De plus, je suis encore bourrée en t'écrivant ces mots parce que je n'arrivais pas à supporter le mal que je t'ai fais. Je suis désolée Sophia, mais je t'aime tellement que je crois que je vais en mourir. Autant mieux que je me tues maintenant avant de te détruire complètement –à moins que ce ne soit déjà le cas ?- je m'excuse encore mais je t'aime tant Sophia que je ne le supporte plus et que je ne me supporte plus parce qu'à chaque fois, malgré mes sentiments à ton égard, je ne pourrais m'empêcher de te faire du mal encore et encore parce que je ne sais rien faire d'autre, que je suis une incapable et que quand j'aime quelqu'un, la personne souffre comme jamais elle n'a souffert et tu ne mérites pas une telle chose.

Je t'aime Sophia, tellement, adieu. »

Mes yeux s'écarquillent alors que tout mon corps entier tremble, littéralement. Elle m'aime. Je l'aime. Je me déteste de l'aimer. Elle se déteste de m'aimer. Toutes les personnes que j'aime finissent par souffrir et c'est de même pour elle, comme si on était des amantes maudites. Mon souffle se coupe alors que les mots résonnent dans ma tête et se percutent de chaque coin. Je ne sais pas comment je pourrais faire mais je vais devoir me concentrer en cours. Elle m'a dit qu'elle m'aimait alors qu'elle ne connaît rien sur moi ou presque et qu'en plus, cette situation, elle est réciproque. Je l'aime comme je n'avais aimé personne d'autre. J'en perds ma respiration alors que mon cœur tambourine dans ma cage thoracique au point que j'ai l'impression qu'il va se décrocher de mon corps, qu'il va sortir de ma poitrine et vivre sa vie ailleurs, là où il aura la paix, loin de moi.

« La peur de blesser quelqu'un qu'on aime est plus forte que n'importe quoi. Mais aussi forte que la peur de perdre quelqu'un. »



Mise à partDonde viven las historias. Descúbrelo ahora