Mise à part

Chapitre 68

Je pince mes lèvres entre elles alors que je relis encore et encore son message. Léa m'aime. J'aime Léa. Mais nous ne pouvons pas être ensemble. C'est complètement absurde. Je n'arrive même pas à savoir pourquoi on ne pourrait pas. Sûrement parce qu'on s'est aimé sans se connaître et que maintenant, on s'avoue nos sentiments dans un gros bordel de mots et de sentiments contradictoires avec une situation un peu déplaisante. Je crois bien que je vais devenir folle si je ne peux pas vivre avec Léa à mes côtés, parce que même si je n'ai jamais vu son visage, j'aimerais pouvoir embrasser ses lèvres. J'ai l'impression de devenir folle, c'est de trop pour moi.

Je tape l'arrière de front contre le mur et une douleur soudaine prend possession de mon corps. Je ferme les yeux et entrouvre les lèvres pour mieux respirer. J'ai l'impression d'étouffer alors que je suis toute seule dans un long et large couloir vide et froid. Je manque d'air, je tente de me calmer et cela se fait petit à petit. La douleur que je ressentais à l'arrière du crâne part au fur et à mesure que le temps passe. Je passe ma main dans mes cheveux et me redresse alors que je m'apprête à rédiger une réponse au message de Léa.

« Euphorie_Noire : Ne m'abandonne pas encore une fois, parce que putain, je t'aime. Ce n'est pas ton orientation sexuelle qui m'aurait bloqué, tu sais. Je m'en foutais pas mal, d'ailleurs, avant que tu me dises que tu aimes les filles. Je ne m'étais jamais posé la question avant que je découvre mes sentiments à ton égard. Je t'aime. Léa, je suis tombée amoureuse de toi et je peux te dire que ça fait de tomber, très mal. Je me suis attachée trop vite à toi. Je ne connaissais même pas ton prénom il y a quelques semaines et je ne connaissais même pas ton existence il y a moi et pourtant, je suis amoureuse de toi maintenant. Je ne croyais n'être capable que d'éprouver de l'amour pour les hommes mais tu m'as fait découvrir que j'étais bisexuelle ou alors que j'aime les hommes et toi. Je n'en sais trop rien. Tout ceci est nouveau pour moi, tellement nouveau que je me sens perdue. J'en perds la tête. Tu veux bien m'aider, s'il te plaît ? Je ne suis nulle part. Je n'en suis nulle part. J'aimerais pouvoir t'embrasser alors que je n'ai jamais vu ton visage et que je ne le verrais peut-être jamais. J'espère qu'un jour, nous pourrons nous embrasser et devenir un couple parce que je crois qu'à l'heure d'aujourd'hui, c'est totalement impossible ; ce que ce n'est pas dans nos cordes. Et putain, pour une fois dans ma vie, je n'arrive pas à trouver les bons mots ! Je n'arrive pas à trouver les mots et c'est peut-être parce qu'il n'y en a pas justement. Je me désespère toute seule mais, s'il te plaît, je t'en supplie, ne m'abandonne pas. Surtout pas maintenant que je t'aime, que je me suis rendue compte de mes sentiments pour moi et que tu m'as avoué que tu m'aimais. S'il te plaît, ne m'abandonne plus jamais ; je n'y survirais pas. »

Je termine mon message avec les larmes aux yeux. Je tremble de partout et je remarque que les vingt minutes sont presque déjà entièrement écoulées. Je n'entends plus rien, malgré tout, parce que je suis perdue dans ma bulle que je partage avec Léa malgré que nous puissions être à des milliers de kilomètres l'une de l'autre. Je n'arrive pas à me faire à l'idée qu'elle pourrait vivre dans un autre pays, qu'elle pourrait ne pas être française. Je n'arrive pas à me dire qu'elle pourrait être d'ailleurs, que le français n'est peut-être pas sa première langue. J'aimerais tellement qu'on habitude carrément dans la même heure ; mais ce serait trop beau pour être vrai. Je ferme les yeux et me déconnecte, rangeant ensuite mon téléphone. Mon cœur bat rapidement dans ma poitrine et pour une fois, ce n'est pas douloureux, je dirais même que c'est doux. Je rouvre les yeux lorsque j'entends mon prénom venant d'une personne dont je reconnaîtrais la voix entre mille. Timothy.

-Sophia, dit-il d'une voix étonnée avec une mine surprise sur le visage.

« La confiance est un bien précieux que nous ne devrions pas être capable de détruire et d'égratigner. »