Chapitre 44

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Je cours le plus vite que je le peux, parce que je ne veux pas qu'il me rattrape. Je n'entends plus sa voix derrière moi crier mon nom. Mais je ne veux pas me faire de faux-espoir qu'il ait pu abandonner parce qu'Arthur n'abandonne jamais. De tous mes 16 ans de vie, je ne l'ais jamais vu baisser les bras. Pas une seule fois et je dois avouer, que je l'ai longtemps admiré pour cela. Mais depuis qu'il m'a laissé tomber, cette admiration c'était dissipée et elle s'était carrément volatilisée quand il a commencé à s'en prendre à moi quand nous sommes entrés au collège. Il ne doit pas être loin et je ne veux pas me ralentir à me risquer un petit coup d'œil derrière mon épaule.

Je cours aussi vite que je le peux, sans même savoir où je vais. Je n'en ai pas la moindre idée mais ce n'est pas le plus dérangeant. Ce qui me terrifie le plus est de savoir qu'il pourrait me rattraper à tout moment ou encore, surgir de nulle part. Une telle chose signerait ma mort parce que ces yeux me jetaient des éclairs et que sa poigne coupait la circulation sanguine de ma main droite il y a encore quelques minutes. Je ne veux absolument pas qu'une telle chose se produise à nouveau, surtout que cela sera sûrement beaucoup plus pire que toutes les autres fois où il a levé la main sur moi.

Tomin, arrête de penser et cours ! Me hurle ma conscience.

Cette petite voix dans ma tête, je l'ai toujours détesté parce qu'elle m'a toujours rabaissé, montrant à quel point je me suis enfoncée dans l'autodérision. Mais pour une fois, elle me ramène à la réalité et me permet de me reprendre. Elle ne m'enfonce, pour une fois que je peux lui taper dans la main et faire « wakatépé » avec elle. « Un indien dans la ville » était le film préféré de mon père et souvent, il me faisait faire le « wakatépé » avec lui. C'était de bons souvenirs, de vraiment très bons souvenirs. Je ferme les yeux et prends une inspiration.

Tomin, mais tu es sourde ou quoi ?! Je t'ai dis de courir et non de penser à ton père ! Me crie dessus la petite voix dans ma tête.

Je remarque enfin que je ralentissais, alors je tente de reprendre un rythme plus rapide sans même vérifier si Arthur me suit toujours même si cela m'étonnerait encore puisque je n'entends rien d'autre que mes pensées, mes pieds foulant le bitume, ma respiration saccadée et cette garce de petit voix logée dans ma tête. Je crois que je vais finir par trouver un moyen pour qu'elle la ferme parce qu'elle va me tue un de ces jours. Je continue mon rythme effréné et si la prof de sport me voyait courir ainsi, elle me mettrait la note maximale directement.

Je ralentis progressivement alors que je pénètre dans un endroit que je connais bien à présent. Cela ne fait que la deuxième fois que j'y vais mais je me souviens de tout ce qui s'y trouvait, jusque dans les moindres détails. Je me souviens de la petite fontaine, jusqu'aux deux lignes de bancs de chaque côté du chemin en gravier. Je me souviens de la pelouse comme de la dame âgée qui donne –cette fois-ci encore- du pain aux pigeons. Sauf que cette fois-ci, il ne pleut pas et que j'entre de l'autre côté de ce petit parc. Peut-être que cette fois-ci, je ne croiserais pas Arthur Roy...

« Courir ne résout pas tout, mais la vie n'est pas une course mais un marathon où il faut savoir quand réduire sa vitesse, quand la régularisé et quand accéléré ; sinon on finit dernier et on perd. »


Mise à partWhere stories live. Discover now