Chapitre 18 : La Clôture 3/4

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     Nous montons les escaliers pour chercher les personnes qui surveillent les alentours. Je me cramponne à la rambarde, le souffle coupé lorsque je regarde vers le bas. Je me transis quand je prends conscience de la hauteur et de ce vide sous mes jambes que j'aperçois entre les grilles de l'escalier en fer. Je me stoppe net comme si mon corps était dans l'incapacité d'aller plus loin. Une main vient s'accrocher à mon bras et me tire.

- Les Audacieux n'ont pas peur. Domine, contrôle, surpasse ta phobie. Surtout devant les autres. Me conseille-t-il avec une fermeté me rappelant son attitude lorsque je n'étais qu'une simple novice.

Je ferme les yeux un instant comme pour me charger de volonté et de force afin de gravir ces marches. L'ascension se fait rapidement et sans encombre. Le vent est beaucoup plus puissant là-haut, il me fait paniquer.

Il y a cinq Audacieux dont trois hommes et deux femmes plutôt de l'âge de mes parents. Ils surveillent les environs perchés sur la Clôture, l'arme à la main en guettant le moindre petit phénomène qui pourrait menacer Chicago. Tout le monde se lève pour nous saluer. Il est déjà midi. On doit les conduire au point de restauration le plus proche. La matinée est passée très vite à cause du fait qu'on ait commencé tard. La tâche qu'Éric avait à faire n'était pas prévue. Je me demande d'ailleurs ce qu'il faisait pour qu'on ne parte pas en même temps que cette brigade.

Je redescends les trop nombreuses marches en fixant mon regard devant moi. J'essaie de faire abstraction des potentiels éléments qui pourrait perturber ma concentration. Je ne dois pas montrer ma faiblesse, je ne peux pas.

Lorsque mes pieds foulent le sol boueux, je me sens vivifiée comme si je replantais mes racines pour m'alimenter des énergies contenues dans cette terre. Éric prend les commandes du véhicule. Je ferme les portes arrière après avoir laissé monter tout le monde. On longe la voie de chemin de fer à l'orée des bois non loin du QG des Fraternels. J'entrevois d'ailleurs le dôme qui leur sert de self.

Éric se gare à gauche de la grange où se trouve le bureau de Johanna Reyes. Le groupe part pour manger mais je reste avec Éric qui souhaite voir la porte-parole. Elle est plutôt petite et ses vêtements de couleurs chaudes et ternes me rappellent la terre que sa faction travaille. Elle nous serre la main et nous demande de la suivre dans son bureau qui est à l'étage. Une écurie est au rez-de-chaussée. Le hennissement des chevaux et leur agitation ne me mettent pas à l'aise. Je trouve que cet animal est très imposant par sa taille. Ils me feraient presque peur s'ils n'étaient pas dotés de leur pouvoir empathique et de leur tendresse. Eric pose une main dans le bas de mon dos avant de me lancer un regard qu'il dirige vers l'escalier menant à l'étage. Je le suis en tenant du bout des doigts son auriculaire. Johanna nous invite à nous asseoir en gardant son regard fixé sur l'écran de la tablette qu'elle tient dans ses mains.

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POINT DE VUE ERIC

Laur' semble avoir besoin de contact, elle m'a agrippé le petit doigt lorsque nous étions en train de monter les marches.

Je regarde Johanna et je sens déjà la tension qui s'évertue à rester entre nos deux factions. Les Fraternels sont l'opposé des Audacieux car eux prône la paix et la non-violence. Nous, en tant qu'Audacieux, sommes totalement le contraire. Nous n'avons pas du tout la même définition du mot « paix ». La passivité n'est en aucun cas une solution, il vaut mieux agir pour résoudre les problèmes quitte à aller vers un affrontement.

Cette femme semble avoir du dégoût pour moi. La dernière fois où j'ai dû lui faire face en étant seul, c'est lorsque qu'un de ses citoyens a tué quelqu'un pour une histoire de pain drogué qui l'a rendu accroc. Je n'avais pas été tendre ce jour-là. J'avais même cogné la table devant la face impassible et souriante de Johanna. Toujours sourire bêtement malgré des affaires aussi sensibles. Je trouve cela totalement incongru.

Divergente: La face cachée d'ÉricOù les histoires vivent. Découvrez maintenant