Chapitre XIII : Fuir ou mourir ?

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Je sens les petits doigts humide de Béatrice se poser sur mon visage. Je la sens tirer les draps et me monter dessus comme une brute. J'ouvre les yeux et découvre sa belle frimousse qui me fait tellement craquer. Elle pose ses mains sur mon visage et vient me manger la joue tout en me bavant dessus... Les réveils de bon matin font partie des joies d'avoir un bébé mais cela ne me dérange pas car sans elle je ne trouverai pas la force d'avancer. Elle ne dort plus dans sa chambre car les sédatifs que me donnent les médecins sont trop puissant pour que j'entende ma sœur pleurer de sa chambre. Désormais, je partage mon lit avec elle même si je sais que ce n'est pas sain de faire dormir un enfant avec soi sans arrêt... Je me redresse et la couche sur le dos pour lui faire quelques caresses sur son petit ventre bien rond. Elle gesticule beaucoup et éclate de rire quand je commence à la chatouiller. Je lui embrasse le ventre ainsi que ses petits pieds pour la faire encore plus rire. Elle se met debout et vient se coller contre mon buste pour faire son câlin du matin. Quelques fois, j'ai l'impression qu'elle vient vers moi pour me réconforter et cela me serre très fort le cœur au point de laisser échapper quelques sanglots qui la font pleurer à son tour. Je sors du lit et lance un regard aux photos sur la commode où ma mère et mes frères déploient un large sourire en témoignage d'un moment heureux. Les photos mentent vraiment très bien, car derrière ces jolies sourires se cache une terrible souffrance, et une peur abrutissante du patriarche qui nous violente. Je regarde ma mère et ne peux retenir mes larmes.

- J'aimerai tellement que tu sois là maman... J'ai tellement besoin de toi... Je ne réussirai jamais à me relever sans toi, sans Éric, sans mes frères...

Béatrice s'agrippe à mes jambes et tire ma robe de chambre pour que je prête attention à elle. J'essuie mes larmes et embrasse la tête de ma sœur qui se met à courir dans la cuisine. Elle ouvre un placard et y sort un biberon qu'elle me tend. Je le prend et prépare son lait auquel je rajoute une cuillère à café de chocolat en poudre. Je secoue le biberon pour obtenir un mélange homogène et le donne à ma sœur qui est assise sur le canapé. Je lui met son bavoir et m'assois à côté d'elle avec ma tasse de café que je bois tranquillement.

- Bois doucement Béatrice sinon tu vas avoir mal au ventre.

Elle soupire et me donne son biberon à moitié plein. Elle colle sa tête contre la baie vitrée et cogne dessus tout en prononçant des syllabes incompréhensible. Elle me montre du doigt le ciel et me regarde en attendant une réponse de ma part.

- C'est le ciel. Il est bleu et ce qui brille là bas, c'est le soleil.

Elle hausse les épaules et part prendre un jouet pour me l'emmener.

- Finis ton biberon chérie. On ne va pas tarder à y aller.

Elle courre le prendre et elle s'assoit par terre tout en posant son dos contre la baie vitrée. Elle a des manières qui me font rire... L'autre jour, elle faisait parler ses poupées tout en prenant une expression du visage différente pour l'une des deux. Je ne comprenait rien du tout mais cela était très amusant de la voir parler toute seule (même si c'était incompréhensible). Elle grandit beaucoup en ce moment, le médecin trouve qu'elle a un peu d'avance par rapport aux autres enfants de son âge, ce qui est plutôt bon signe. Je la prend dans mes bras et l'emmène dans la salle de bain où je fais couler l'eau dans la baignoire. Je prépare nos vêtements et la met avec moi dans l'eau pour ne pas perdre trop de temps pour nous préparer. J'avoue que je fais ça pour ne pas la laisser seule dans l'appartement sans surveillance. L'autre jour, elle a réussi à ouvrir la porte et est partis jouer... Je m'en suis voulu qu'elle ait réussi à échapper à ma vigilance, je me suis senti vraiment nulle. J'ai pensé fermer à clé la porte de la salle de bain mais je ne souhaite pas l'enfermer comme un animal... Ce serai un bon exercice de la faire obéir en lui disant de ne pas bouger, mais je préfère gagner du temps en la lavant en même temps que moi. Je la met dans son petit siège et me lave en deux deux pour ne pas qu'elle attrape froid même si l'eau lui arrive jusqu'à la poitrine. Je la savonne énergiquement, ce qui la fait grimacer mais je ne ralentis pas, de peur d'arriver en retard au travail. Jeanine a demandé que mon projet d'anéantissement des sans-factions aboutisse donc je gère un plan qui consiste à construire un drone qui répandra le sérum de la mort en détectant les sans-factions. J'en suis malade de devoir faire ça, mais je n'ai pas envie de me faire remarquer même si ma vie ne m'est pas du tout cher. J'habille ma sœur et enfile mes vêtements pour aller ensuite m'asseoir sur une chaise de la salle à manger. Le chagrin m'a broyé et je n'arrive même plus à sourire avec le monde extérieur... Béatrice est ma seule et unique raison de vivre dans cette ville qui se déchire de plus en plus. Cela fait quelques jours qu'Éric est partis mais j'ai l'impression d'avoir vécu un mois sans lui. Tout s'est bousculé et ma vie ne sera plus jamais comme avant... La disparition d'Éric m'a anéantis, elle m'a détruite au point de ne plus réagir correctement à ce qui m'entoure. Je baisse les bras, je ne trouve plus la détermination que j'avais avant et je n'avance plus du tout. Je n'ai jamais autant pleuré, je n'ai jamais autant montré ma souffrance aux gens qui m'entourent... Je n'ai pas la force de me relever et mon épuisement est continuel, il ne s'arrête pas, il est infini. Richard dit qu'il faut que je sorte pour me changer les idées. Il m'affirme que les rayons du soleil sont bons pour le moral et que voir d'autres personnes m'aidera à faire mon deuil. Cependant, ce n'est pas Un deuil que je dois faire, mais bien deux deuils... J'ai presque tout perdu en si peu de temps... Quelqu'un toque doucement à la porte et Béatrice courre pour se cacher sous la table basse.

Divergente: La face cachée d'ÉricWhere stories live. Discover now