Août - 7

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Et il plonge dans un grand bruit. Ce même bruit se répercute sur toute ma personne, dans mon coeur, dans mon corps. Je ne réalise pas ce qui a été dit, je ne réalise pas ce qui a été fait. Je ne fais qu'enlever mon t-shirt, mes chaussures, mon téléphone de ma poche, rouler en boule mes chaussettes, poser mes lunettes sans délicatesse et courir dans ce lac glacial. Je suis plutôt bon nageur, je m'immerge en fermant les yeux, en maudissant ma myopie, en maudissant la nuit. Je suis mes souvenirs de son emplacement, nageant comme une grenouille. J'ai froid, je ne vois rien mais toute mon attention est focalisée sur le blond.

- Valentin ? Valentin, où es-tu ? Est-ce que tout va bien ?

Dire que je suis inquiet serait un euphémisme. Je respire mal, je tourne la tête dans tous les sens, je sens l'eau glaciale dans ma nuque. Je plonge même, les yeux grands ouverts, pour scruter tous les alentours. Je suis dans un puits sans fond, littéralement. Je reprends ma respiration, et enfin, je les croise. Les deux pupilles bleues, avec qui les étoiles jouent, comme les méduses cette après-midi. Il sourit comme jamais.

- Je suis là Eliot. Je ne bouge pas.

Je m'avance d'un coup de jambe et l'enlace par le cou. Je le place tout contre moi, nous sommes tous deux mouillés alors que la température n'est pas très haute. Je n'en ai cure. Il n'est pas perdu. Il est là.

- Je m'inquiétais. Disparaitre ainsi n'est pas bon pour mon coeur.

- Vraiment ?

- Tu as dit que ce lieu était contre les mensonges. Je ne te mens pas, continué-je, toujours contre lui.

Il se recule, passe une main sur ma joue toute mouillée, sourit toujours. Je ne parviens pas à lire en lui, j'ai l'impression de faire face à une brume épaisse. Ce jeu des vérités est arrangeant pour lui, non pour moi. Je me fais berner, je le sais et je l'accepte. Parce qu'il est avec moi.

Nous nous fixons encore, avant de tous les deux nous rapprocher comme deux aimants. On ne se consulte pas le moins du monde, et nos lèvres se rencontrent avec férocité, sous le froid d'aout, au milieu de ce lac. On se laisse aller, on respire puis on reprend, en ouvrant les yeux, en faisant glisser les mains, qui ripent sur la peau pleine d'eau. C'est parfaitement différent de la premier fois, ce n'est pas doux, ce n'est pas poétique. C'est simplement l'expression pure de nos sentiments, peut-être un peu violents, peut-être un peu trop forts. Mais ce n'est que nous.

***

Le feu crépite à mes pieds. Je suis devant, emmitouflé dans deux pulls, content d'avoir pris un pantalon de jogging avec moi. Valentin a allumé les bûches en quelques secondes, avec un briquet étrange, aux couleurs roses, violettes et bleue. Il s'est ensuite placé non loin de moi, pour se réchauffer. Nous ne discutons pas, nous ne faisons qu'écouter la vie autour de nous. Il n'y a pas besoin de plus.

- Je suis bisexuel. C'est pour ça, le briquet.

- Oh. D'accord.

- Je ne t'ai pas menti, quand je t'ai parlé de Daisy. J'étais attiré par elle, au collège. Je ne sais pas trop si j'étais amoureux, parce que c'est un peu compliqué à expliquer. Mais c'était bien réel.

- Comment l'as-tu su ? continué-je, ravis qu'il se confie à moi.

Il lève les yeux au ciel, pose ses mains de part et d'autre de lui. Il a remis ses bracelets éponges sans que je ne m'en rende compte.

- J'ai été attiré par un mec pendant les vacances entre la year 11 et 12. On était à la plage, on avait pris le bus tous ensemble, il faisait miraculeusement beau. Je suis vraiment tombé sous son charme, ça a été une claque. J'en ai discuté avec mes parents, et une amie a compris très vite ce qui se passait en moi. On a passé la soirée ensemble, et on a été à un festival de musique. Ca a duré un peu plus d'un an, mais je suis jamais tombé amoureux, parce qu'il me mentait à longueur de journée. Il ne voulait que coucher avec moi, alors que tu vois, la plupart du temps, il avait honte de moi. Mais ça a été mon premier. Et toi, tu es le second.

Ciel d'été [BxB]Where stories live. Discover now