Novembre - 2

2.2K 299 246
                                    

(mention de suicide)


Depuis la mi-octobre, je suis enfermé dans une sorte de quotidien peu agréable, concernant ma famille. Tous les matins et tous les soirs, c'est la même rengaine : un silence pensant, des regards lourds de sens et des soupirs par milliers. Callahan tente parfois de faire la conversation, mais tous ses essais se soldent par des échecs. Ce n'est plus supportable, mais la balle est dans leur camp. J'ai dit ce que j'avais à dire.

Ce matin ne fait pas exception à la règle. Je me lève à l'heure habituelle, je vais à la salle de bain et commence ensuite l'épreuve du petit-déjeuner. Attraper le bol dans l'armoire, le lait sans lactose, car je ne le digère pas, et les céréales, et se placer juste en face de mon père qui lit son journal. Mâcher consciencieusement les cornflakes, boire le lait sans faire trop de bruit, débarrasser et tout laver. Mais aujourd'hui, mon quotidien semble différent. Car, lorsque je vais m'installer à ma place, mon père a les mains aplaties sur les nouvelles du jour et me regarde fixement.

- Je veux que tu sois rentré juste après tes cours. Nous avons besoin d'aide à la boutique, car Callahan est en formation aujourd'hui et ne pourra pas assurer la vente.

- Je ne suis pas vendeur et je ne désire pas en faire mon métier.

- Ce n'est pas une question Eliot, c'est un ordre. C'est grâce à cette boutique que tu as un toit sur la tête.

- J'ai des devoirs à faire.

Le plus amusant, dans cette histoire, c'est que je ne mens pas. J'ai réellement des devoirs, que je conte réaliser avec Valentin, au creux de sa chambre d'hôpital. C'est lui qui m'a demandé de l'aide pour les mathématiques, qu'il comprend moins bien que s'il était avec nous en cours.

- Ne me mens pas. Je sais que tu vas encore aller chez Valentin pour faire je ne sais quoi. Il faut que tu te concentres sur tes études.

- J'ai un niveau suffisant pour entrer dans l'université que je désire. Et Valentin est malade en ce moment.

- Il n'a pas de parents pour l'aider ?

Un regard vers Callahan, qui tente de me faire arrêter de parler. Je suis lancé, bien malgré moi.

- Non. Ils sont morts l'année dernière dans un accident d'avion. Il est entièrement seul, il n'a que moi.

- Quoi ?

Mon père se radoucit d'un seul coup, les yeux arrondis comme des billes. Ma mère, qui vient d'entrer dans la pièce, demande ce qui prend à son mari de faire une tête si interloquée.

- Eliot vient de m'annoncer que les parents de Valentin sont morts l'année dernière, tu sais, dans ce crash qui a fait la une des journaux pendant quelques jours.

- Mais comment vit-il ? s'inquiète-t-elle, en bonne mère.

- Seul. Son parrain, que vous avez vu en aout, vient de temps en temps, mais il est seul, chez lui, dans la maison qu'il a habitée avec ses parents.

- Je suis vraiment désolée pour lui. Mon dieu, et moi qui voulais les inviter à manger. Ça a dû lui faire tant de mal, à ce petit.

- Est-ce que vous comprenez pourquoi je passe toutes mes soirées avec lui maintenant ?

J'espère. J'espère de tout mon cœur que nos relations vont s'apaiser avec cette révélation. Je suis presque prêt à fermer les yeux, en attendant que la sentence tombe.

- Non, ce n'est pas une raison, adjuge mon père. Tu as le droit à une demi-heure de plus pour lui déposer ses devoirs, mais à seize heures maximum, je veux te voir au magasin, en tenue pour servir les clients. Et ce n'est pas discutable Eliot.

Ciel d'été [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant