Février - 5

1.6K 186 132
                                    

Le lundi matin, à six heures pétantes, le réveil de Valentin retentit dans toute la pièce. Je ne m'en serais pas formalisé - il est normal de devoir se réveiller - si la chanson utilisée ne m'avait pas brisé les tympans. J'ouvre les yeux, parfaitement éveillé, et je cherche la source de tout ce bruit. Les hurlements du chanteur proviennent du téléphone du blond, qui n'a pas encore bougé de la couette. J'essaie de le remuer, de monter au-dessus de lui afin d'atteindre sa table de chevet, mais je n'y parviens pas. Ne supportant pas le bruit m'agressant les oreilles, je prends les choses en mains. Je me pince l'arête du nez, prends une grande respiration, me rapproche le plus discrètement possible de ses oreilles - montant de ce fait dans son lit - et hurle au-dessus du bruit :

- Aurais-tu l'extrême gentillesse d'éteindre ton téléphone portable avant que mes oreilles ne coulent au sol, complètement détruites ?

Il ouvre un œil, puis un deuxième. Mes sourcils tremblent de colère, mais je fais un sourire légèrement hypocrite.

- Maintenant ? continué-je entre mes dents.

Dans un grognement guttural, il attrape le maudit appareil avant d'appuyer sur une touche et que les hurlements cessent. Je reprends ma place initiale - dans mon propre lit - dans un soupir de soulagement, crachant un remerciement.

Regardant le plafond, je souris. Nous commençons aujourd'hui notre première semaine de cours en France. Je vais faire de la littérature et des langues toute la journée, sans me soucier de la moindre équation du second degré. Je suis dans une ville que je ne connais pas, évitant alors les regards des proches qui peuvent juger. S'il y a des ragots sur nous - et je sais qu'il y en aura, nous sommes des adolescents après tout -, je ne les démentirais pas. Malgré les regards de certains, malgré les possibles insultes des autres. Je ne céderais pas.

C'est dans cette optique résignée que je me lève. Avisant mon uniforme, déposé sur un cintre en hauteur sur l'armoire, je tords mes lèvres dans un rictus que j'aperçois dans le miroir. Je ne sais pas comment m'habiller. Fait-il chaud ? Fait-il froid ? J'avise mes t-shirts et mes pulls, me demandant lequel choisir. Au bout de cinq minutes devant l'armoire et pris d'un énervement certain, j'attrape un jean bleu et une chemise à carreaux avant de me rendre à la salle de bain. Je ne croise personne dans les couloirs, signe que je suis le premier levé. J'en ressors près de dix minutes plus tard et découvre, dans la chambre, une sorte de cocon, toujours au fond du lit. Me pinçant à nouveau l'arête du nez en faisant claquer ma langue contre le palais, je m'approche à petits pas du lit, cherchant les cheveux blonds éparpillés sur les draps. Je le trouve, bel endormi, face à moi. M'accroupissant afin d'être à sa hauteur, je m'avance lentement vers son visage.

- Valentin ? Il est l'heure de se réveiller.

Aucune réponse. Les draps sont parfaitement immobiles.

- La Terre appelle Valentin, est-ce que tu es là ?

Rien. Je m'énerve plus encore et prends une nouvelle grande respiration. Je lui attrape les joues et les lui pince tout doucement. Elles rougissent au contact et les draps bougent enfin. Je souris, fier de moi, et glisse.

- Si tu veux que je m'arrête, il va falloir que tu te lèves.

Une jambe émerge, suivie d'une autre. Elles restent en dehors du lit quelques secondes avant d'y retourner, apeurées.

- Fais super froid dehors. Je ne peux pas rester au lit encore quelques minutes ?

Je le fixe, éberlué. J'ai l'impression d'avoir un jeune enfant en face de moi. Sec, je claque.

- Non. Tu ne peux pas.

Un gémissement provient du lit. Ma réponse ne lui plait pas.

- Tu es cruel et sadique. On dirait Monsieur Bluek. Et c'est pas un compliment.

Ciel d'été [BxB]Tahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon