Ciel d'été [BxB]

Octobre - 7 / TW

TW : Suicide, cicatrices

La petite ambiance au-dessus, ce n'est jusque que ce que j'écoutais quand j'écrivais. Ca correspond plutôt bien à ce qu'Eliot raconte.

Les journées se ressemblent énormément dans cet endroit. Le matin, j'ai une séance avec le psy et ensuite du temps libre, que je passe à la bibliothèque ou à observer les poissons, dans les couloirs. Je croise parfois d'autres enfants, avec qui je discute et je prends des nouvelles. Je fais la lecture aux plus jeunes, qui réclament des histoires pour s'évader loin de murs blancs et des bip stridents. Le midi, j'ai le droit à un repas frugal, puis des activités avec d'autres adolescents. J'essaie d'y aller avec plaisir, mais parfois, j'ai envie de rester en boule dans ma chambre, sous les couettes à ne rien faire. En fin d'après-midi, nouvelle séance chez le psy, puis visite d'Eliot, qui me raconte sa journée, avant de passer une heure tranquille entre mes bras, à dormir paisiblement ou à parler tout bas. Cela fait deux semaines et je m'ennuie.

Mais aujourd'hui, Eliot arrive en avance. Je remarque facilement qu'il attend que le psychiatre sorte de ma chambre pour entrer en trombe. Son visage est dans un drôle d'état, à moitié fermé et à moitié très ouvert.

- Tu ne devineras jamais ce que je viens de faire.

- Quelque chose de pas commun, vu ta tête. Tu veux t'asseoir et me raconter ?

- Non. Je suis bien debout, il faut que je me calme et que je respire. Mais voilà. En fait, j'ai tout dit à mes parents.

- Pardon ?

- J'étais à la maison cette après-midi, parce que notre professeure de littérature a eu un empêchement familial et ne pouvait pas assurer son cours. Alors je suis rentré et j'ai trouvé mon père et ma mère en train de lire le courrier. Cela concerne la journée du dix octobre. Malheureusement, Callahan n'a pas réussi à intercepter la lettre avant eux. Il s'excusait tout bas lorsque j'ai croisé ses pupilles.

Il reprend sa respiration, rit sans que je ne comprenne pourquoi. Il se rapproche, cherche mes yeux.

- J'ai eu le droit à tout le petit speech sur la responsabilité, sur le fait que j'étais en dernière année, que je n'arriverais jamais à entrer à l'université de Cambridge en médecine si je me comportais ainsi. Et à un moment, j'en ai eu marre et je l'ai coupé. J'ai coupé mon père pour lui dire que je ne ferais pas ce qu'il voulait lui. Je n'ai pas eu le droit à beaucoup de temps de parole, parce qu'il a continué à me hurler dessus. Mais je me suis battu pour pouvoir faire passer mes idées. Que la biologie m'ennuie, que ce qui me fait vivre, c'est la littérature. Que je n'ai pas spécialement envie de partir à Cambridge et que je leur préfère une université en France.

Il dépose ses mains sur mes épaules, m'embrasse la joue soudainement et continue son petit discours.

- Et il a continué sur le fait que je rentrais tard à la maison, tous les soirs et que ce n'était pas sérieux, parce que j'avais des devoirs et que j'allais être fatigué pour les examens à venir. Il m'a demandé ce que je faisais jusqu'à cette heure-ci et je lui ai parlé de toi. Très calmement, j'ai dit que j'allais te voir chez toi - je ne voulais pas révéler le fait que tu es à l'hôpital, ils pourraient en faire des conclusions hâtives - parce que tu ne te sens pas bien. Mais je ne me suis pas arrêté là. Je leur ai dit que j'étais homosexuel, parce que cela fait des semaines que j'y réfléchis. Je leur ai dit que j'étais amoureux de toi, que nous sortions ensemble depuis août et que je ne comptais pas du tout me trouver de petite amie, puisque tu étais déjà à mes côtés. Je ne te dis pas leur tête. Callahan m'a fait un clin d'oeil discret pour ne pas se trahir. Je les ai laissé s'énerver, être choqués, me poser des questions auxquelles je n'ai pas répondu. Je suis resté silencieux, ce qui les a fait abandonner et me consigner dans ma chambre. Je me suis échappé par la porte fenêtre de ma chambre, je suis passé par le jardin des voisins et je suis arrivé ici pour tout te raconter.