Chapter 91

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Bonjour/Bonsoir ! 

Cette fois-ci, nous plongeons dans la fin de la torpeur de Hakan, ou plutôt, dans sa prise de conscience. Est-ce que cela la sortira définitivement de sa mélancolie récalcitrante ? C'est ce que nous allons voir..


Ce n'est ni la lumière blafarde de cette fin du mois de décembre, ni l'odeur de la cuisine de Quentin, pas même encore la chaleur du corps de mon colocataire qui m'éveille et me sort de mon sommeil. Ce sont les bruits dans le couloir qui m'ont un peu brusquée, mais j'ai choisi de ne pas me lever tout de suite. Si je pouvais grappiller ne serait-ce encore que quelques minutes de tranquillité...

D'ailleurs, j'ai récupéré toutes les heures que j'avais perdues à me morfondre au lieu de me reposer. C'est étrange, comme si un baiser pouvait débloquer tout ce qui m'empêchait de me détendre.

Je geins mollement dans les couvertures, me retournant avec autant de souplesse qu'un énorme ver de terre qui aurait reçu un coup de pelle. J'ai dit que j'étais reposée, pas que mes métaphores allaient être embellies ou avoir du sens. Une fois contorsionnée comme j'aime, je passe distraitement mes doigts sur mes lèvres, me moquant de mon geste à voix haute.

— Je comprends pourquoi les séries pour adolescentes en manque d'amour font ça, maintenant. Ça doit être instinctif.

Je me remémore ce qu'il s'est passé hier, sans vraiment y croire. Pourtant, je sais que je ne défaille plus, ma mémoire est bonne et je n'ai plus d'hallucinations. Certes, je suis toujours triste de la perte de mon chien, je ne sais toujours pas qui se fait passer pour Klaus pour tourmenter notre famille, mais je suis saine, mentalement saine. Si, je le suis !

Sherlock s'est laissé embrasser, plus précisément, il m'a encouragée à le faire. Je n'en reviens toujours pas que cette phrase qui tourne en boucle dans mon esprit ait du sens et que celle-ci soit réelle. Je n'ai rien fait pour mériter cela. J'en avais juste envie, depuis longtemps. Et voilà, c'est arrivé... Et c'était authentique. Je veux dire par là que, sous le gui, on pouvait encore prétendre que c'était simulé, que nous ne faisions cela que pour faire enrager Mycroft. Non, je ne pouvais pas me mentir ou me cacher derrière une excuse futile. Lui non plus.

Toutefois, cela ne signifie rien de réjouissant pour autant. N'oublions pas de qui on parle. Sherlock reste Sherlock. Je suis une expérience qui l'attise et, d'ici peu, il se lassera de cette découverte grisante. Il s'amuse. D'ailleurs, n'était-ce pas pour vérifier que je céderai à ses avances, qu'il a placé la branche de gui ? C'est ce qu'il a dit, non ? Il n'a été nullement question de sentiments dans notre discussion, hier soir.

Je songe brièvement à William Lenneers. Lui, m'avait déclaré sa flamme, il m'a pourtant bien trahie de la pire des manières. Alors, non, je ne dois pas baisser ma garde à nouveau, aussi agréable ait été ce baiser. Je dois garder les idées claires et agir selon un ordre logique, mettre des priorités sur les choses qui ont de l'importance.

Première chose, découvrir qui est le hackeur, pourquoi et comment il compte se servir de C.H.E.S.S. et lui faire regretter amèrement d'être venu au monde. Si ça ne tenait qu'à moi, à ce type, je lui collerai ma canne au plus profond de...

Je baille, juste assez pour me calmer un peu. Deuxièmement, deuxièmement...

Deuxièmement, m'assurer que ma tante ne sorte plus jamais de l'hôpital psychiatrique avant qu'elle ne soit en état de rejoindre un hospice. Et même là, je l'internerai dans une maison de repos pas sympa, une de celles où il n'y a qu'une seule télévision pour tous les résidents et qui ne passent que des documentaires ou des film de série B débiles. Si elle ne termine pas en légume bien avant, car je m'arrangerai pour qu'on la gave de médicaments. Oh, oui, des tas de médicaments. Je veux qu'elle soit droguée à en être malade, comme elle m'a rendue malade, comme elle a certainement rendu malade Baron avant qu'on ne soit forcé d'abréger ses souffrances. Je veux qu'elle souffre, ni plus, ni moins. Souffrir longtemps, très longtemps. Je la hais...

Une colocataire irascibleWhere stories live. Discover now