Chapter 71

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N'étant pas en grande forme, j'ai eu du mal terminer ce chapitre à temps. 

Il a été compliqué à rédiger, pour la simple et bonne raison que c'est ce qu'on appelle une « charnière » : une partie qui sert à relier correctement deux chapitres entre eux. J'avais hâte de passer à la suite, mais j'étais tellement impatiente que j'avais du mal à me motiver à écrire cette fichue charnière.

Mais voilà, c'est achevé et je vais pouvoir vous offrir bien mieux à l'avenir.

Bonne lecture !

C'est comme avoir un coup de chaleur, mais de l'intérieur. Cette petite, alors que je ne portais aucun enfant dans mon cœur, s'est pourtant immiscé dedans, elle y a fait son nid et a emménagé. Elle m'émeut, sans que je ne puisse le nier ou la rejeter.

Il est rare de me voir sans voix, pourtant, après un simple merci, je ne parviens même pas à rebondir. J'aimerais minimiser les choses, lui dire que ce n'est rien, qu'une babiole que j'ai réalisé de mes mains. Cependant, c'est faux. J'ai mis énormément de moi, j'y ai laissé une paume de main en m'entaillant avec un tournevis, j'ai perdu une fortune à concevoir des cylindres moi-même avant d'abandonner... Ce n'est pas RIEN.

— Ça va, Hak ? S'inquiète mon frère.

— Bien sûr que ça va, pourquoi ça n'irait pas ? Je mens sans vergogne.

— Alors tiens, insiste mon frère.

Il me tendit une enveloppe brune, mon prénom écrit en lettres dorées sur l'avant.

— Un ticket gagnant du Lotto ? Je le taquine gentiment.

Dans l'enveloppe, je constate qu'il y a deux éléments. Alors, je déplie d'abord la lettre qui s'y trouve. Le papier est du même marron que l'enveloppe et l'écriture d'or à l'intérieur de la même plume. Leif m'a écrit, un peu comme Klaus aimait le faire avec moi.

Il veut pouvoir parler, s'exprimer sans bafouiller, sans compromettre le message qu'il désire faire passer. Pour cela, l'écrit est une aide précieuse. C'est peut-être aussi parce que me rappeler Klaus pourrait réanimer le sourire que je n'avais qu'avec lui, car mon cousin était bien le seul qui puisse me dérider sans se forcer.

J'ai toujours été d'un naturel froid et réservé, ne s'ouvrant qu'à quelques rares personnes. C'était le cas lors du gala du 23 novembre où, une fois les invités partis, j'ai pu savourer ma soirée en me laissant aller, un peu... Bon, peut-être beaucoup. Vous croyez toujours que c'était l'alcool ? Pas uniquement : me rappeler à quel point je pouvais être prise d'un sentiment de légèreté dès que Klaus amusait la galerie me suffit. Je pense que ce côté-là manque un peu à mon frère. Peut-être essaye-t-il, à sa manière, de réanimer mon sourire et mon enthousiasme des fêtes d'antan ?

Je ne vous raconterai pas ce qu'il a écrit. Cela le regarde, me regarde, ne nous regarde que tous les deux. Je ne peux partager avec quiconque les confessions de l'attachement que mon cadet me porte : il n'apprécierait pas que je communique cela à quiconque. Tout ce que je peux vous expliquer, c'est qu'il consacre un long passage à ses regrets sur son éloignement. Son deuil étant particulièrement compliqué, il a pris de la distance vis-à-vis de moi et de ma surprotection. Oui, je l'admets, j'en ai fait trop. Il conclut ces paragraphes en disant que si je suis revenue à Londres, c'était sans doute pour lui permettre de réparer cela, d'où l'idée de son cadeau qui se trouve dans l'enveloppe.

Je dois être restée un moment, comme ça, perdue dans ses mots, à lire et relire les mêmes lignes. Rosie se penche un peu pour voir ce qui est inscrit, mais je la réprimande d'un coup sans même la regarder.

Une colocataire irascibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant