Chapter 27

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La petite clinique dans laquelle exerce le docteur Whitesorrow est financée en grosse partie par Selens Inc. Il s'agit essentiellement d'un petit centre destiné à l'imagerie médicale ainsi qu'à la recherche. Autant dire qu'ils en voient des patients défiler, ici.

J'entre sans aucune hésitation, Sherlock sur les talons. Ce dernier lance un regard à tout ce qui l'entoure dans la seconde. Au moins, s'il me prend soudainement l'envie de m'enfuir, mon colocataire sera en mesure de m'indiquer la première sortie de secours disponible dans le périmètre.

– J'ai rendez-vous avec le docteur Whitesorrow, je m'impose à l'accueil.

– Nom, prénom, carte d'identité, rétorque la secrétaire sans se débiner par mon manque de politesse.

En lui tendant mes papiers, je vois bien qu'elle prend un air étrange. Visiblement, elle ne s'attendait pas à une carte de cette couleur*. Elle hausse un sourcil, me lance un regard interrogateur, mais je reste impassible. La femme soupire et se met alors à taper sur son clavier, sans doute pour m'enregistrer. On peut lire sur son visage comme dans un livre : elle semble surprise de découvrir que j'ai déjà un dossier ici. Ah ! Sa mine a changé : elle a sûrement découvert que le dossier en question est assez conséquent.

– Vous aviez rendez-vous à 8 heures 45, s'empresse-t-elle de confirmer.

– Oui, je sais, je réponds agacée. On pourrait abréger et passer directement à l'étape où vous me donnez les documents nécessaires tout en m'indiquant que ça se trouve au quatrième étage, en orthopédie ?

Décontenancée, elle me tend une feuille sertie de nombreuses étiquettes à mon nom qui sortent à peine de l'imprimante.

– Tenez, obéit-elle. Les ascenseurs sont...

– Dans le couloir à gauche, je complète. Juste après la cafétéria.

– Je vous en prie, ironise-t-elle.

– C'est ça.

Sans attendre plus longtemps, je m'empare du bras de mon compagnon pour me diriger dans la direction que... que je me suis moi-même indiquée, en fait.

– Vous venez si souvent que cela ? me demande Sherlock.

– Normalement, au moins une fois par an. Sauf que j'ai vécu comme une ermite pendant dix-neuf mois, ce qui m'a valu d'avoir loupé mon rendez-vous l'année dernière.

– Cela peut vous porter préjudice ?

– Les différents examens nous le diront. Ça risque de prendre la journée, je vous préviens. Donc, si jamais vous voulez partir en balade, je ne vous en veux pas.

– Je tiendrai parole, assure-t-il en montant le premier dans l'ascenseur.

– L'idée même que je me prenne la tête avec les gens vous amuse. Et puis, au moins, vous ne vous ennuyez pas à la maison.

Vous n'imaginez même pas comme ce trajet jusqu'au cabinet de consultation est gravé en moi. Je suis sûre qu'il est tatoué dans mon esprit. Les vilaines sensations de malaise aussi, visiblement. Mon estomac est un peu noueux, ma jambe me fait souffrir sans raison apparente, je retiens mes dents pour ne pas qu'elles claquent. Je sais que cette journée ne sera pas une partie de plaisir.

La seule chose qui change, cette fois-ci, ce sont les effluves qui chatouillent mes narines. L'odeur de mon colocataire me tourne la tête. Dans l'espace confiné de la cage métallique, mon esprit s'embrume, laissant entrevoir ma nervosité.

– Vous êtes inquiète, observe Sherlock.

– C'est précisément pour cela que je suis contente que vous soyez là, dis-je en sortant précipitamment sitôt que les portes s'ouvrent.

Une colocataire irascibleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant