Chapter 25.5

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[Dans une petite clinique de Brighton, un événement important se prépare...]

Le docteur Whitesorrow retient un sursaut quand on frappe à la porte de son cabinet, il sait parfaitement qui se trouve derrière la port, qui s'apprête à pénétrer dans la pièce : c'est lui qui a demandé à la voir à la fin de la journée. Il jette un œil au calendrier affiché sur son bureau, le chiffre entouré de rouge... Selens ne va pas tarder à revenir à la clinique. Il est temps.

– Entrez, lâche-t-il dans un soupir.

– Bonjour docteur. Vous avez demandé à me voir ?

La voilà, Cécile Laroche. Elle est toujours aussi fraîche qu'en début de journée, c'est le propre des rookies. Elle ne se laisse pas encore déprimer par la routine. C'est pour cet entrain qui semble être sans limite que le chirurgien avait insisté pour qu'elle prenne la suite de l'ancienne psychiatre de son service, Errin Bradshaw. 

La jeune Cécile reste debout, à cheval sur les politesses. L'homme prend un air rassurant, presque paternel. 

– Oui, c'était important que je vous parle. Je pense que vous devriez vous asseoir. Ne vous en faites pas, rien de fâcheux rassurez-vous.

Il désigne un des sièges en faux cuir devant lui. Elle a une brève hésitation avant de s'installer, le sourire un peu moins franc, et croise les mains sur son genou droit.

– Je vous écoute, ajoute-t-elle.

Elle va droit au but, cette femme est parfaite pour travailler avec lui, Whitesorrow se félicite intérieurement avant de se lancer.

– Il se trouve que j'attends une patiente très particulière, la semaine prochaine. Elle vient pour ses examens de routine et, comme vous l'avez déjà pour les autres sujets, il faudra lui faire passer un entretien pour vérifier son état psychologique. Je vous confie son dossier afin de vous y préparer.

Il tend le portfolio, sa main ne tremble pas, mais il transpire beaucoup. Ses mains sont moites. Il a l'impression d'offrir un cadeau empoisonné à la jeune femme. 

Fallait-il qu'il prenne tout cela tant à cœur ? Il s'investit tellement dans le cas de la jeune Selens, il l'a forgée comme avec son propre fils... Sa vie serait un échec si ces deux-là devaient souffrir de leurs postiches internes. 

Il voit Cécile se saisir du dossier, affichant une confiance à toute épreuve malgré sa très jeune expérience.

– Bien ! Avez-vous des données... particulières à me transmettre concernant cette patiente ? Ou je peux y aller ?

– Docteur Laroche, annonce le chirurgien avec prudence, mademoiselle Selens est loin d'être une simple patiente. J'ai peine à croire que vous l'affronterez. Vous avez entendu les bruits de couloir de cet hôpital ? Le fait que certaines personnes du service me nomment Frankenstein ?

Elle se met à rougir violemment. Bien sûr qu'elle l'avait entendu,  elle en avait ri même de temps à autres, mais qu'est-ce que ce surnom avait à voir avec cette patiente ? Prudemment, Cécile hoche la tête et serre ses mains sur le dossier.

– Je vois. Elle est donc bien plus qu'un cas particulier ?

L'espace d'un moment, l'orthopédiste bedonnant se sent confus : est-ce vraiment utile d'en arriver là ? Oui, cette femme est jeune, elle est encore bercée d'innocence, elle doit être avertie.

– Ce sont loin d'être des rumeurs. Mademoiselle Selens est un monstre... qui peut se mouvoir grâce à mon prototype. Elle vous manquera de respect, vous insultera peut-être, mais en dépit de tout ce que vous pensez, vous ne devrez pas vous laisser prendre au jeu. Faites tout ce que vous pouvez pour arriver à obtenir d'elle les réponses suivantes : sa prothèse peut-elle l'empêcher de vivre sa vie avec les autres, avec l'image qu'elle a d'elle et si sa médication d'opiacées ne montre pas de signe de dépendance. Si vous parvenez déjà à avoir un rapport sur ces trois points, cela tiendrait du miracle. Mademoiselle Selens n'est pas l'amie des médecins, j'en ai peur. Malgré cela, je suis forcé de vous demander, à vous, d'être prévenante avec elle... Je... Je vous ai laissé un article, dans le dossier.

L'homme se force à rester impassible. Cela cache une tension, qui se ressent malgré ses efforts. Laroche prend une grande inspiration et baisse les yeux sur le dossier. Elle se laisse un instant pour réfléchir : elle voudrait le lire immédiatement, mais elle préfère, finalement, l'emporter dans son bureau.

– Vous pensez que je ne peux pas mener à bien cet entretien, docteur ?  Vous ne me faites pas confiance ?

– Détrompez-vous ! s'empresse de dire le chirurgien. Vous êtes sans doute la seule sur qui je puisse compter pour y parvenir. Seulement, je tiens à jouer franc jeu sur la difficulté qui se dissimule derrière cet examen psychologique.

– Bien. Je vous promets d'être bienveillante, tout en faisant mon travail efficacement, comme le veut la profession. Je vous ferai suivre le dossier.

– Bonne chance, docteur Laroche. Je sais que vous trouverez une solution. Vous trouvez toujours...

Et comme si rien ne venait de se passer, le chirurgien se replonge dans son ordinateur. Whitesorrow ne s'attarde jamais sur les politesses, jamais. C'est bien la majeur différence entre la jeune psychiatre et le vieil orthopédiste.

*

Lecteurs et lectrices de tous âges, de tous horizons, bonjour !

Ce petit chapitre a été rédigé en collaboration avec une amie. Cécile Laroche lui appartient, mais je peux vous dire que si j'ai encore l'occasion de l'utiliser une prochaine fois, je n'hésiterai pas. À déterminer selon l'engouement des lectures qui vont suivre.

Merci pour vos suivi, à vous tous ! ♥


Une colocataire irascibleWhere stories live. Discover now