Chapter 1

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Ce matin, je suis d'humeur maussade. Certes, la plupart vous diront que c'est dans mes habitudes. Je l'admets, être imbuvable est l'un de mes passe-temps depuis longtemps, davantage depuis un an. Vivre seule ne me dérange pas, je ne veux voir personne. On est mieux dans la solitude que baigné dans les inepties de la société.

De quoi je me plains, me direz-vous ? Je suis à peine âgée de 19 ans et je suis à la tête d'une entreprise familiale florissante... Quoi, vous ne le saviez pas ? Nous l'aborderons plus tard. Là, je dois me préparer. Tout ce que vous devez savoir, c'est que dans notre manoir, maintenant dépouillé de nos domestiques et de mon jeune frère, je suis esseulée, mais pas malheureuse.

Il y a deux mois, mon cadet vivait encore sous notre toit. Leif, qui atteint à peine l'âge de 16 ans, a un QI évalué à 182. Lorsque nous l'avons appris, je ne l'ai pas retenu, que du contraire. Je le pousse à réaliser ses désirs les plus ardents, puisqu'il a été trop longtemps réfréné par notre défunt père. Ainsi donc, Leif a rejoint l'Université de Westminster dans l'école d'électronique et d'informatique. Ça n'a pas été facile, mais je suis parvenue à mes fins. Il faut dire que quand on vous apprend la manipulation dès que vous pouvez marcher, on peut se montrer terriblement convaincant.

Bon, ce n'est pas que je suis en retard, mais il est temps de me préparer, vous ne croyez pas ? Je prends le temps de me maquiller légèrement et de passer une robe longue pour l'occasion. Et je vous assure que je ne porte pas ce genre d'habit dans mon cœur... Plutôt sur mon dos, ah, ah ! Même mon humour est ennuyeux, il se morfond avec moi. C'est un peu pour cela que je brise ma routine aujourd'hui. En cette matinée d'automne, j'ai un rendez-vous important qui arrive directement de Londres. Mon associée et cousine (et ce qui s'approche le plus d'une meilleure amie) m'a envoyé un client qui voudrait traiter d'une affaire particulière avec moi, personnellement. Il a insisté pour me parler.

Pourtant, je ne parle pas beaucoup avec nos sociétés clientes, ceux qui achètent nos produits de cybersécurité. De plus, je ne connais pas ce monsieur Holmes. Je veux seulement qu'il ne soit ni soporifique, ni vexé par mon manque d'intérêt (ce n'est pas gagné, je ne suis guère loquace). Une fois endimanchée dans une tenue décente, je rejoins la cuisine pour faire du thé. Malheureusement, il faudra attendre : on sonne à la porte. Si cet homme m'importune avec deux heures d'avance, c'est qu'il ne tient pas à la vie... ou que c'est trop important pour attendre. Quoi qu'il en soit, nul ne se dresse entre moi et ma dose de thé noir !

– Calme-toi, Hakan, me dis-je, Plus vite ça sera fait, plus vite ce sera fini. À nous deux, Monsieur Holmes...

Je ne suis pas prétentieuse, mais on a perturbé mes habitudes et cela me rend amère. Je m'empare de ma canne d'apparat qui trône fièrement dans le vestibule. Ah oui ! La canne, il faudra que je vous en parle, de celle-là.

– Une minute ! je crie en me battant avec le verrou.

J'ouvre. De suite, l'homme soigné intervient.

– Vous êtes bien Hakan Selens ?

Hakan, oui c'est moi. Niveau prénom, vous aurez vite compris que nos parents étaient très inspirés, ils adoraient la Norvège. Je m'étonne qu'ils soient restés dans la capitale belge ou anglaise, tiens ! Je réponds du tac au tac.

– Et vous, vous êtes idiot ?

– Je vous demande pardon ?

– Oh, excusez-moi, j'ironise vulgairement, je pensais que le but était de pointer les évidences de l'autre et de les exprimer à voix haute. Mon nom est sur la boîte aux lettres, j'ajoute sur un ton glacial.

– Votre associée m'avait prévenu de votre... tempérament.

Je m'écarte pour le laisser entrer. Il est très propre sur lui, armé d'un parapluie. Il prend soin de fermer lui-même la porte et de s'essuyer les pieds sur le paillasson. Pour en revenir à son physique, je vous dirai qu'il est quelconque : cheveux courts, costume... Quelconque, je vous dis !

Une colocataire irascibleDove le storie prendono vita. Scoprilo ora