Chapter 98

357 51 39
                                    

Bonjour/Bonsoir !

Vous avez hâte de lire la suite, j'en suis persuadée. 

Du coup, je ne vais pas vous faire patienter plus longtemps. 

La voix ressemble à celle d'Elizabeth, mais elle sort du parlophone. J'avais oublié que je l'avais actionné par mégarde avant d'allumer la lumière de la pièce. Je peine à l'entendre distinctement, car la tempête à l'extérieur fait trop de bruit. J'ai diffusé ce qu'il se disait dans la pièce partout dans le manoir. Bon sang, je ne suis pas seule, je sais qu'on nous a entendus : j'ai des témoins de ce qui est en train de se passer dans ma chambre.

L'essentiel, maintenant, c'est de rester concentrée pour que personne ne soit blessé. Je filtre une information à la fois, en veillant à mettre dans un coin de mon esprit celles qui peuvent me servir à me sortir de cette situation. Cependant, l'idée même que Grace attendait un enfant, pire, qu'elle ait cette enfant, qu'elle l'élève depuis tout ce temps sans qu'on n'en ait jamais rien su, ça, oui, c'est bien trop dur à encaisser.

— Navrée que tu aies eu à entendre ça, Lizzy, je lui crie pour m'assurer qu'elle entende. Tu ne le prends pas trop mal ?

— Je passerai ma colère plus tard, déclare-t-elle. En attendant, ne t'en fais pas, young lady, on gère.

On gère ? Ça veut dire quoi « on gère » ? Qui gère quoi, au juste ? Qui a tout entendu depuis le début ? Leif ? Quentin et Charles ? John ? Ou même Rosie ? Tout le monde ? Ils gèrent quoi ? Ils ont appelé la police ? Parce que si c'est le cas, je pense qu'elles nous tireront dessus bien avant. Ou elles mettront peut-être fin à leurs jours pour échapper à la justice. Dans tous les cas, ça va laisser des traces sur le papier peint, c'est navrant.

Tous les quatre, nous nous jaugeons pour voir si cet événement change quelque chose. Fondamentalement, non, Sherlock et moi sommes toujours en situation de faiblesse face aux deux autres. Toutefois, une chose me permet de changer un peu de tactique.

Nous avons une chance d'être en vie à la fin de cette altercation. Pour le moment, je ne vois pas encore cela comme une lutte finale, bien au contraire. Tout ne fait encore que commencer. J'ignore ce qui adviendra ensuite, mais ce sera riche et corsé, autant que ces bons cafés que Leif aiment tant. Leif...

Bon sang, j'espère qu'il va bien, qu'il sait que je peux encaisser. J'ai la crainte de demander à Lizzy si mon cadet entend tout également et comment il fait face à tout cela. Minuit doit être passé, maintenant, c'est donc le jour de son anniversaire. Je suis persuadée qu'il s'attendait à un tout autre cadeau.

Une chose à gérer à la fois, Hak, concentre-toi. Attends l'arrivée des forces de l'ordre, gagne du temps, fais en sorte qu'aucun coup de feu ne soit tiré. Protège ton coloc, aussi, ce serait une bonne idée. Si je tiens le coup, si je parviens à faire cela, je pourrais me soucier du bien-être de Leif juste après.

— Donc, si j'ai bien tout compris, je recentre l'attention sur moi, vous vouliez C.H.E.S.S. pour vous faire de l'argent. Vous avez planifié de vous faire passer pour Klaus pour obtenir notre prototype, le revendre, avoir de l'argent et partir ensuite rejoindre l'original. Outre le fait que cette histoire soit plus timbrée que le bureau de poste, vous m'expliquez comment vous avez fait pour utiliser le numéro de téléphone de Klaus ?

— C'est moi qui l'avais, tout simplement, me dit Jude comme si c'était l'évidence même. Je l'ai cédé à Grace pour qu'elle puisse se jouer de toi.

— J'avais juste envie de vous torturer, à l'image de tous les tourments que vous m'avez infligés.

— Oh, je vois, je les cherche délibérément, vous êtes des dégénérées toutes les deux. C'est pour cela que vous vous entendez si bien.

Une colocataire irascibleWhere stories live. Discover now