Chapitre 133 : La Perte

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Mes muscles endoloris menacèrent de me lâcher lorsque je portais mon attention sur les fumées noires qui s'élevaient dans le ciel. Des combats ci-et-là avaient éclatés sur le campus, laissant entendre des cris plaintifs et le son des armes qui s'entrechoquaient. Mes oreilles sifflaient et mes yeux me brulaient, si bien que je faillis prendre en pleine face le coup de poing que m'assena le garçon à la cagoule. Ce Erza, comme l'avait appelé plus tôt sa partenaire, débordait d'énergie. Pourtant, cela faisait bien vingt minutes que l'assaut avait commencé. Sa vitesse augmentait au fur et à mesure de nos échanges et quand je reculai afin de reprendre mon souffle et réfléchir à une nouvelle stratégie, la fille aux cheveux courts ne me laissait aucun répit et se jetait sur moi. Esquiver leurs coups n'étaient pas un problème dans l'immédiat, mais je ne tiendrais pas longtemps, surtout si ces deux là alliaient leur force.

Les séparer me semblait être la meilleure des options, mais comment m'y prendre ? Le terrain poussiéreux et foisonnant de végétation constituait davantage une complication qu'autre chose. Prenant appui sur un tronc, Erza se propulsa en avant et menaça de porter un coup à ma nuque. Je bondis alors sur le sol qui m'arracha une grimace avant de répliquer avec un crochet. Hors de question qu'il m'atteigne de nouveau et utilise son super-poing sédatif. La façon dont il s'y prenait m'échappait car le flux de magie qui se dégageait de ces deux-là était presque imperceptible si je le comparais à celui des descendants. Dans un hurlement, je barrai un coup de pied circulaire et m'accrochai de toutes mes forces au vêtement de ce dernier. Mon piège fonctionna car la jeune fille se lança aussitôt dans l'assaut pour venir en aide à son camarade. Aussitôt, je lui portai un coup de griffe suffisamment profond pour la faire hurler de douleur, mais pas assez pour la tuer. Elle s'effondra au sol en gémissant tout en tenant fermement son ventre.

Un de moins.

La colère ne désemplit pas, mais plutôt de me rejoindre de cette petite victoire, j'attendis avec inquiétude qu'elle se relève comme l'avait fait plus tôt le Minotaure. Ses capacités génératrices devaient lui être propre, car la petite resta allongée au sol, incapable de se relever. Le garçon arracha alors la cagoule de son visage et la jeta violemment au sol. Une mèche blanche contrastait avec sa chevelure noir corbeau. Son nez portait encore la trace rougeâtre de mes coups et un filet de sang s'échappait de sa bouche endolorie. Son visage était en tout point similaire à celui de la fille. Des yeux ambrés, jeunes et pleins d'espoir qui faillirent me faire regretter mon geste. Ces deux là avaient mon âge et se retrouvaient dans une situation pareille. Depuis combien d'années préparaient-ils leur coup ? Depuis combien d'années s'entraînaient-ils à combattre dans l'unique but de nuire aux descendants ?

- La plaie est minime, la rassura le garçon en veillant sur sa sœur qui se tordait de douleur.

Il me fixa alors de ses yeux si similaires aux miens et secoua la tête, faisant danser ses boucles brunes.

- Pourquoi est-ce que tu ne l'as pas tuée ?

- Je n'hésiterais pas à le faire si vous continuez à vous en prendre à mes amis, mentis-je sans ciller.

Le garçon pouffa avant de lever les yeux au ciel. Il avait bien raison de ne pas me croire, mais dans une situation aussi critique la menace et la peur pouvaient vous faire faire n'importe quoi.

- Personne ne nous arrêtera, me promit-il. Je n'ai pas les mêmes capacités que toi, mais j'ai vécu des choses que tu n'imagines même pas.

J'allais lui répondre combien j'étais désolée pour lui en pensant à l'horreur des camps, mais il s'élança en bondissant de plusieurs mètres au dessus du sol exactement comme je l'avais fait lors de mon premier entraînement de Capflag. Erza atterrit avec fracas sur le sol qui se fendit en deux. Déséquilibrée, je tombai dans la petite crevasse, sombre et rocailleuse, mais me rattrapai in extremis en m'accrochant à la racine d'un arbre. De la boue éclaboussa mes yeux et ma cheville, bloquée, s'étira comme un chewing gum. Mon hurlement retentit dans toute la forêt. La douleur fut telle qu'une vague de chaleur puis un froid glacial me firent trembler des pieds à la tête.

Les pensées des descendants qui se bousculaient auparavant dans ma tête se firent soudain silencieuses, annonçant une terrible nouvelle.

Erza en profita pour se poster juste devant moi et débloqua ma cheville en tirant violemment dessus. Je ne pus retenir un gemissement. J'avais l'impression que ma jambe était parcourue par des milliers de fourmis et que mon pied avait été broyé par un bulldozer. De nouveau, il me porta sur son épaule et se précipita vers sa sœur qui se releva avec grande difficulté.

Allez, Ambre, n'abandonne pas ! cria Leith dans ma tête.

Je voulais du plus profond de mon âme me relever et flanquer une sale raclée à ces deux-là, mais mon corps était faible et j'avais si sommeil ...

Alors que j'allais sombrer dans l'inconscience, mon sang ne fit qu'un tour. Une étrange fraîcheur parcourut mes vaisseaux sanguins me redonnant ainsi force et vigueur. Je me sentais de nouveau pleine d'énergie, comme si j'avais dormi depuis des siècles et qu'on m'avait administré un super médicament aux propriétés génératrices.

Je m'agrippai violemment à Erza qui ouvrit des yeux ronds lorsqu'il vit que je bougeais à nouveau. Pourtant, mon attention était davantage focalisée sur ce qu'il se passait à plusieurs mètres de là, non loin de Leith qui combattait le Minotaure et le rouquin à la fois.

Un homme, vêtu d'une cape noire s'avança sur le champ de bataille, chaotique et tapageur. En grand mécène — ou avocat du diable — , il déposa le corps drapé d'un individu à la chevelure blonde, presque blanche au sol. Les descendants cessèrent tout mouvement et j'en fis de même lorsque je reconnus de qui il s'agissait. Ses yeux portant rieurs et pleins de vie étaient vides de toute émotion. Ses vêtements parfaitement immaculés contrastaient avec son visage blafard et pétrifié. La fleur rouge, une lycoris, demeurait encore accrochée à sa chemise.

- Sean, murmura Leith sans quitter son cadavre des yeux.

Je ne m'étais même pas rendue compte que j'avais marché jusqu'à ses côtés. Le garçon à la mèche blonde s'était éloigné de plusieurs mètres et assistait sa sœur qui penait à rester debout. Tout se bascula dans ma tête et mon cœur sembla se déchirer en milles morceaux. Mais, ce n'était rien comparé à Leith qui demeurait interdit devant la scène. La perte d'un descendant équivalait à une petite mort pour lui, il me l'avait plus d'une fois expliqué. Sean n'était pas seulement un descendant ordinaire parmi les douze. Leith lui faisait réellement confiance et le descendant de Dionysos avait joué le remplaçant de Jaad. Mais, il était avant tout mon ami et tout le monde l'appréciait sur le campus peu importe l'espèce. Si il y avait bien une mascotte à Diafosa et le seul garçon qui occupait une place chère à notre cœur, c'était bien lui.

Une larme s'écrasa le long de ma joue. Salée, elle picota ma langue, mais ne fut accompagnée d'aucun sanglot ou de consœurs. Une larme. Une seule petite larme, voilà ce que je m'étais permis un court instant avant de tout lâcher.

- Vous allez le payer, m'entendis-je gronder d'une voix méconnaissable.

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Coucouuuu ~

Ça va ? Vous digérez bien la nouvelle ? Vous avez envie de me tuer ou pas ? 😩

Désolée si j'ai du couper ici, mais encore une fois, ça aurait fait beaucoup trop long sinon 😵‍💫

À dimanche ! 🖤

GOD'S RETURNOù les histoires vivent. Découvrez maintenant