Chapitre 40 : Sensualité

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Toutes pensées de mes ex petits-amis s'étaient évanouies. Luca, le garçon de primaire qui m'avait embrassée pour la première fois sous le pommier de mon jardin. Noa, le joueur de basket de mon lycée, qui m'avait tripotée lors d'une soirée de fin d'année. J'aurais pu aller plus loin ce jour là, mais perdre ma virginité dans un lit miteux, jonchés de cannettes de bière à moitié écrasées ne m'avait pas emballée. Noa était doué pour les baisers langoureux, pas étonnant avec toutes les filles qui passaient dans son lit, mais il ne dépasserait jamais Alec. Jamais.

Ce garçon, si il s'agissait bien d'un être humain,  m'arracha des dizaines de frissons en seulement trois secondes. Tous mes muscles se tendirent et s'embrasèrent sous l'effet de cette chaleur incommensurable. Notre baiser, pourtant brutal au départ, prit un rythme beaucoup plus doux, plus mesuré, comme si lui et moi prenions conscience de ce que nous étions en train de faire, l'erreur qui se produisait. J'ouvris finalement les yeux, par peur de voir ceux d'Alec emplit de fureur, lui qui m'avait accusée de le séduire à l'aide de mes dons. Ce qui me frappa d'abord, fut leur couleur, aussi étincelante que des joyaux en plein soleil. Aucune animosité ne tirait ses traits, certainement pour la première fois.

Il ramena ses mains, chaudes et palpitantes sur mes joues, froides et rougies, puis me ramena encore plus proche de ses lèvres. Notre baiser s'intensifia de plus belle, jusqu'à ce que sa langue danse avec la mienne. Un gémissement, peut-être le mien ou le sien, je ne m'en souvenais plus tant j'étais désorientée et à la fois excitée par ce moment, provoqua une nuée de papillons dans mon ventre. Sa main, pourtant sur ma joue il y a quelques secondes, se posa délicatement sur le bas de mon dos.
Alec craignait probablement que je disparaisse, que je fuis le garçon qui m'avait tant de fois frustrée et effrayée, mais moi, plus que lui, me délectait de notre union. Je n'en demandais que davantage.

Avec détermination, je ramenai ma main tremblante dans ses cheveux, que j'avais tant de fois rêvé de toucher, puis les tirai vers mon visage. Alec était tellement grand, si loin que pour la première fois je me sentais minuscule en comparaison. L'écart qui nous séparait me dépouillait de toute raison. Je le voulais aussi proche de mon corps que possible, pour moi seule.

À bout de souffle, nous nous écartions, finalement, essoufflés par la chaleur torride de l'après-midi et de notre échange langoureux. Plusieurs minutes s'écoulèrent sans que ni lui ni moi ne sortions un mot de notre bouche. Que fallait-il dire dans cette situation ? Avec Noa, tout demeurait si simple. Il n'avait pas des yeux verts qui changeaient de tons à la moindre émotion, ni des bras et des mains robustes capable de soulever n'importe quoi, ni une mâchoire carrée et douce dont on souhaitait caresser le moindre centimètre de peau. Non, Alec était une créature mythique, dangereuse, imprévisible, et rester à ses côtés était la pire des idées. Mais comment pouvais-je résister face à cet homme ? Certainement, avait-il gagné dès lors que j'avais posé les yeux sur lui.

On se voit ce soir, je présume, commença-t-il enfin en recoiffant ses cheveux.

Je ne compris pas d'abord, puis lorgnai quelques instants sur sa bouche. Il voulait passer aussi vite à la suite ? Alors que nous n'avions même pas discuté ?

Tu trouves pas ça un peu ... rapide ? osai-je demander en détournant le regard. Enfin, ce n'est pas que je ne veux pas, mais ... comment dire ? Je ...

Je suis chargée de t'entraîner ce soir avec Sara, me coupa-t-il sans cacher un sourire. Ravi d'apprendre que tu as envie de moi.

Rouge de honte, je ne pris pas la peine de répondre. Que pouvais-je dire de plus ? Le silence me suffisait, et à lui aussi, car il partit d'un pas rapide vers la forêt, sans même se retourner. Je restai là, les bras ballants, regrettant d'avoir céder à ses lèvres et ce beau visage. Pour Alec, voire pour tous les êtres surnaturels présents sur ce campus, rouler une pelle à qui que soit égalait une poignée de main chez les humains.

          

Alors, je pris la décision d'oublier ce petit accident. Après tout, ça ne reste qu'un bisou, deux bouches qui entrent en contact, tout simplement ... n'est-ce-pas ?

Rectification. J'essayai d'oublier. En revenant sur le campus, je fonçai de plein fouet sur deux vampires, sûrement à cause de mon obsession pour une paire d'yeux verts. Inutile de vous rappeler à qui ils appartenaient. Heureusement, les vampires avaient le cœur à la fête, après de légères excuses, ils me laissèrent passer sans faire d'histoires.

Les réverbères illuminaient déjà la façade orangée des dortoirs lorsque mon pied foula le chemin pavé que je connaissais tant. Je faillis tomber à la renverse quand je reconnus la posture confiante d'Alec. Pendant ma ballade, il avait apparemment troqué son uniforme pour une tenue plus décontractée. Un simple pull à capuche vert d'eau, un jean sombre, et des cheveux encore mouillés qui commençaient déjà à boucler légèrement sur son front. Sara, allongée sur le perron, nettoyait négligemment ses bottes en cuir marron. Un ruban rouge pendait négligemment à ses cheveux, qu'elle avait noué en un chignon bien serré. Tout en restant concentrer sur sa tâche, la jeune fille triturait le piercing qui sortait de sa lèvre supérieure. Sa salopette en jean, déchirée à certains endroits, se fondait presque avec le sol terreux sur lequel elle reposait, tant elle était poussiéreuse.

L'entraînement du soir était complètement sorti de ma tête. Avec cette fatigue, refuser un quelconque exercice et préférer le repos aurait été une meilleure solution.

T'es en retard, me rappela Sara en formant une bulle avec son chewing-gum.

J'ignorai Alec en me concentrant sur ma paire de chaussures, lisse et brillante. Cela faisait déjà plusieurs heures que je n'avais pris aucune douche, mais à quoi bon le faire de suite ? Ces deux monstres m'achèveraient d'ici ce soir, et je me noierai immanquablement dans ma propre transpiration.

Je pensais que seule Sara devait s'occuper de moi.

Ordre de Leith, s'avisa Alec en levant les mains en signe d'apaisement.

Vous écoutez toujours aveuglément les ordres ? rouspétai-je maladroitement en levant les yeux au ciel.

Je savais combien il était difficile pour les divinités de refuser quoi que ce soit à Leith, mais je voulais tout sauf qu'Alec reste avec nous. Aucun des deux ne répondirent à ma provocation, probablement parce qu'ils se le répétaient déjà sans cesse. La culpabilité me fit de nouveau baisser la tête.

Allons-y, m'intima Sara en se relevant. Ça sera rapide, tu n'as pas passé la meilleure nuit de ta vie à ce qu'il paraît.

J'hochai la tête en pensant déjà à mon lit douillet. L'excitation me faisait tenir debout, aucune autre raison possible ne me venait à l'esprit. Je suivis donc gentiment Alec et Sara qui se faufilaient avec aisance entre les différentes branches qui peuplaient la forêt. En chemin, nous croisions très peu d'étudiants. Sûrement avaient-ils peur de subir le même sort que les loups-garous, eux qui osaient ne pas respecter le couvre feu. Depuis l'incident, l'atmosphère sur le campus était lourde, sauf pour les vampires qui fêtaient à chaque seconde la disparition de leurs ennemis.

La légère brise, annonçant le début de l'automne, fit virevolter mes cheveux, déjà suffisamment emmêlés par la journée éreintante passée. Sara et Alec se ressemblaient beaucoup. Aucun des deux n'avait ouvert la bouche. Lorsque j'étais anxieuse, discuter de tout et n'importe quoi avait tendance à me calmer. Je regrettai l'absence de Sean.

GOD'S RETURNWhere stories live. Discover now