Chapitre 48 : Adieux

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J'épongeai la sueur du front d'Alec. Allongé ainsi dans son lit, il ressemblait à un petit garçon ... ou à une princesse endormie. L'illusion utilisée pour me montrer son histoire l'avait vidé de ses forces. Il s'était écroulé au sol juste après. Et je ne m'en plaignais pas. J'avais pleuré de longues minutes après avoir retrouvé mes esprits.

J'avais toujours su qu'Alec ne pouvait tuer de sang froid sa propre famille, mais la raison n'en demeurait pas moins touchante. Sa malédiction différait des autres dieux olympiens. Il était prisonnier, oui, mais même si son indépendance lui permettait de partir à sa guise, Hélène l'en empêchait.

Je plongeai de nouveau la serviette dans le récipient plein d'eau et de sang. Le torse d'Alec se soulevait au rythme de sa respiration, mais je remarquai que sa main commençait à tressauter. Ses yeux s'ouvrirent lentement, si bien que je réussis à sécher la dernière larme qui perlait encore sur ma joue.

- Ça va ? lui demandai-je en rehaussant son coussin. Je crois que tes blessures ont cicatrisé.

- Tu as pu tout voir ?

Sa voix rocailleuse retarda ma réponse.

- Oui, tout, murmurai-je en essayant tant bien que mal de retenir mon émotion.

Sa main se posa délicatement sur ma joue. Je n'avais pas l'habitude qu'on me caresse aussi tendrement, surtout lorsqu'on me regardait comme si j'allais bientôt disparaître.

- Alors tu sais que nous deux, ça ne pourra jamais marcher. Ari... Hélène, passe avant tout, se rectifia-t-il en souriant tristement.

- Bien sûr, opinai-je en serrant avec force sa main.

Je n'avais pas envie de le lâcher, et lui non plus. Alors, nous étions restés ainsi pendant les quelques heures qui nous restaient, conscients que nous n'aurions jamais plus l'opportunité de partager davantage.

___

Dans la salle de conférence, deux types d'étudiants se distinguaient. Ceux qui étaient totalement confiants et discutaient tranquillement avec leurs camarades, puis ceux qui se rongeaient les ongles - ou griffes - alors qu'ils relisaient pour la énième fois leur feuille d'étude. Je n'appartenais à aucune de ces deux catégories.

J'étais bien trop occupée à relooker de l'œil mon partenaire. L'oral ne consistait pas seulement à organiser son étude. Il fallait la faire vivre, la partager et la transmettre avec passion pour que les jurés eux-mêmes doutent de leurs héros mythologiques favoris. Vous l'aurez compris, la qualité orale primait. Et entre Alec et moi, nous savions d'avance le résultat final : un beau zéro.

Honnête et langue de vipère que nous étions, la sympathie des jurés ne serait pas de notre côté, mais je comptais sur autre chose. Pourvu que nous tombions sur une femme.
Comme les autres étudiants, l'uniforme avait été proscrit. Une tenue élégante et professionnelle avait été exigée. Vous comprenez maintenant pourquoi je n'étais pas concentrée.

Le costume bordeaux d'Alec aurait pu faire fondre la reine des glaces en personne.

- Ce pantalon de smoking te fait un cul ravissant, le complimentai-je en levant un pouce en l'air.

- Ta toge n'est pas mal non plus, on dirait presque un drapeau comme ça.

N'ayant pas été mise au courant de ce changement de tenue de dernière minute, Ali m'avait prêté son tailler qui m'allait trois fois plus grand. Le pantalon tombait sur mes talons qui se coinçaient sans cesse sur celui-ci, malgré les ourlets. Depuis mon entrée dans la salle, j'avais déjà glissé deux fois.

GOD'S RETURNOù les histoires vivent. Découvrez maintenant