20- Question de cravate

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Confortablement installée dans mon lit, je fais défiler les vidéos pour évacuer les tensions accumulées depuis le retour à la maison. Je me suis sentie aussi importante qu'une prévision de campagne sur laquelle des dizaines de têtes pensantes se sont penchées. La moindre de mes paroles a été vue et revue pour anticiper les réactions de l'équipe électorale d'en face mais j'ai explosé lorsqu'il a été question de diffuser le contenu de mon téléphone sur la télévision pour qu'ils se mettent d'accord sur la réponse à l'invitation de DoHyung à la petite fête privée chez Jung. Sans me soucier de l'image explosive que j'ai renvoyée, je me suis réfugiée dans ma chambre dans l'espoir qu'on me laisse enfin tranquille. Toute cette tension commence à me rendre dingue et la manière dont je libérais autrefois ma fougue est impossible depuis que je me suis lancée dans ce satané deal avec Namjoon. 

Revivant chaque scène mentalement avec d'autres mots que j'aurais pu prononcer, je finis par m'épuiser et décide de me caresser pour trouver le sommeil plus facilement. Malheureusement pour ma patience, aucun scénario pornographique ne trouve grâce à mes yeux, parfois trop rapides ou n'apportant pas assez de réalisme. Je finis par dériver sur des pratiques regroupant plusieurs participants quand la porte de ma chambre s'ouvre, dévoilant une silhouette qui m'avait bien manqué. Chris prend soin de verrouiller derrière lui avant de dénouer sa cravate et de se poser à mes côtés. Mon esprit est tellement captivé par les mouvements de ses muscles qui se dessinent derrière le fin tissu de sa chemise que j'en oublie la vidéo qui se poursuit et dévoile des cris tout sauf de terreur. Honteuse, je tente de baisser le volume mais ne fais que l'augmenter puis décide de passer le téléphone en veille en espérant que mon garde du corps n'évoquera pas ce dont il vient d'entendre. 

— Tu cherches de l'inspiration pour notre histoire ? Me questionne-t-il avec le sourire. 
— Je... suis peut-être allée un peu vite en besogne pour imaginer ce a quoi notre princesse pourrait participer lors de sa nuit agitée. 

Ma révélation à moitié noyée dans le mensonge est acceptée alors qu'il lisse avec intensité le tissu de sa cravate, vérifiant parfois sa solidité. J'ignore les raisons qui font que je suis concentrée sur ce geste et manque encore une fois de concentration quand je le constate plus proche de mon visage. 

— De mémoire, nous avions une héroïne pourrie gâtée qui menait la vie dure aux soldats de son père, tout en jouant le rôle de petite fille modèle aux yeux de tous. Elle était promise à un horrible prince cruel et semblait désespérée jusqu'à ce qu'elle trouve en l'un des fidèles chevaliers de son père un soutien inattendu. Alors explique-moi comment on en arrive à une partie de jambes en l'air ? 

L'embarras rougit mes joues et me fait bafouiller avant que je ne retrouve assez d'aplomb pour lui répondre. 

— Je... C'est une histoire bien longue. 
— Je suis tout ouï. 
— Si tu as du temps à perdre à écouter les péripéties inutiles d'une fille qui n'existe pas. 
— Pourquoi dénigrer celle qui sort de nos pensées, mère indigne ? Me reproche-t-il avec le sourire. 

Mais ce mot, banni du domicile, me renvoie l'absence de la mienne et m'empêche de répliquer avec la même joie de vivre. Je fournis toutefois un effort pour noyer le poisson et éviter qu'on ne finisse par aborder le sujet. 

— La princesse refusait de livrer ce qu'elle avait de plus beau et innocent dans son corps à un monstre qui ne le méritait pas. Quelques années auparavant, elle monta un plan pour pouvoir fuir le château en l'absence du roi et rejoindre des amis qui l'attendaient au cœur de la ville. Dans cet endroit, loin du protocole et des règles, elle se sentait elle-même, libre de tout mouvement. Elle pouvait agir comme bon lui semble et multiplier les rôles. Mais surtout, elle pouvait nouer des relations sincères. 
— Hum, je suis d'accord sur la direction que prend l'histoire mais comment expliques-tu qu'elle ait réussi à approcher ses amis du petit peuple ? 
— A un moment où le roi voulait retrouver une certaine popularité, il avait décidé que l'instruction de son unique enfant se ferait dans la petite école au pied de château, pour prouver sa confiance en l'éducation offerte à tous, mais il ignorait qu'il avait lui-même invité le ver à entrer dans la pomme. 
— N'était-elle pas suivi par les soldats ? 
— Durant son enfance, elle bénéficiait de plus de liberté mais l'apparition des garçons et surtout de ses formes féminines ont compliqué la situation. 

Etant emballée par le scénario que ma bouche dévoile sans filtre, je me surprends à remarquer que celui qui occupe mon esprit, a furtivement noué sa cravate aux barreaux de la tête de lit. Avec un détachement feint, il m'invite à poursuivre tandis qu'il récupère mes poignets pour les nouer au tissu au-dessus de ma tête. 

— Ce n'était pas la première fois qu'elle se rendait en ville pour se défouler sexuellement. Mais pour que notre histoire accroche le lecteur, il faut que ce le soit avec lui comme surveillant. 
— Ses amis n'étaient pas présents, ce soir-là, et la princesse ne trouvait personne à son goût pour occuper sa nuit. Agacé par l'attente et les risques qu'ils prenaient, le soldat se fâcha et attrapa un homme qu'il considérait comme convenable et les accompagna jusqu'à la chambre mise à disposition. En agissant brutalement, il espérait provoquer une réaction de gêne ou de confusion chez la jeune fille afin qu'elle abandonne son idée perverse. Mais le provoquer commençait réellement à l'émoustiller. 
— Il lui faisait de l'effet ? Demande le garde en plongeant son regard dans le mien. 
— Beaucoup. 

Je laisse échapper un gémissement en sentant sa main effleurer ma peau sur le cou et le creux entre mes seins. Mon corps ne perd rien de cette excitation grandissante et accélère considérablement mon rythme cardiaque, au même titre que mes cuisses se frictionnent. 

— A-t-elle osé donner son corps devant le soldat ? 
— Ta question est bien vague, Chris. Qu'entends-tu par...

Je n'ai pas le temps de jouer sur ses mots qu'il repousse violemment le drap qui couvrait la partie basse de mon corps et dévoile la nuisette qui accompagne ma petite culotte. M'étant trémoussée sur ce matelas avant son arrivée, il ne loupe rien de la vue ni de l'odeur d'excitation qui s'en échappe.

Mon rythme cardiaque marque un arrêt lorsqu'il baisse la bordure du tissu pour dévoiler mes seins et en fait le tour avec ses doigts, comme s'il admirait une œuvre d'art. Lui qui affichait une conviction profonde pour la distance entre son statut professionnel et mes tentatives de séduction, je suis étonnée de le voir me toucher avec autant de facilité. Où était la vérité dans ses affirmations ? Lui ai-je finalement laissé le même désir qu'il a fait grandir en moi ?

— A-t-elle laissé cet inconnu jouer avec ses seins ? 

Au diable la bienséance, je me cambre et partage un souffle de plaisir tandis qu'il se penche pour embrasser le bout de mes seins, réveillés par le toucher sensuel. Instinctivement, je tire sur mes bras dans l'idée de m'enrouler autour de lui mais l'entrave décuple mon agacement. J'aperçois le sourire au coin de ses lèvres qui me fait prendre conscience que je suis à la merci de mon beau soldat. Sa langue s'enroule autour de mes tétons et me fait grogner face à l'irrépressible envie de l'attraper, le caresser, le griffer. Sa main rassure mon autre sein avant que sa bouche ne vienne le réchauffer. Je suis obligée de glisser mes jambes, l'une contre l'autre, pour tenter d'atténuer ce feu crépitant, mais en vain. Mon clitoris est abandonné à son triste sort tandis que ma poitrine vit ses plus belles heures. Le moment est si intense que je ne parviens pas à comprendre comment je suis passée de mon porno solitaire à l'élaboration d'une histoire avec vérification de la conformité des scènes avec un professionnel de l'extase. 

Chris interrompt sa fusion avec le bombé de ma poitrine pour ajuster les bordures de ma culotte avec un professionnalisme troublant. Il a donc l'intention de descendre plus bas. 

— A-t-elle laissé cet inconnu pénétrer son corps sous les yeux de notre soldat ? 

Mon désir de sentir sa main sur cette zone érogène est si fort que j'en viens à inventer la suite du scénario pour qu'il soit en ma faveur. J'acquiesce de la tête, puis répète avec ardeur qu'elle accepte cet ébat sous les yeux de celui qui la protège, que je n'aperçois que tardivement la déception dans les yeux de Chris. 

— Mauvaise réponse. Nous arrêtons là le scénario pour ce soir, princesse. 

Je reste hébétée en le voyant s'en aller, non sans replacer son érection entre ses jambes. Mes bras tirent sur les liens afin que je puisse l'empêcher de me quitter puisque mes mots ne l'arrêtent pas mais je ne fais que malmener ma peau et m'empêtrer dans l'attache. Mon bodyguard quitte la pièce, l'air amusé par la situation mais m'offre l'indulgence de vivre ma honte à huis clos en refermant derrière lui.
Immobile, je patiente quelques secondes dans l'espoir qu'il revienne me libérer, comme une bonne blague qu'on ferait entre amis, mais en viens à accepter l'idée que cet homme est véritablement un électron libre. Je m'accorde alors le luxe de rager avant de m'agenouiller pour défaire le nœud avec mes dents. Ce type ne perd rien pour attendre. 

Bodyguard : Le Soldat et la PromiseWhere stories live. Discover now