49- Les alliances

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Alors que mon corps se crispe, refusant cette proximité avec le deuxième homme qui mérite toute ma haine sur cette Terre, mes yeux se fixent sur l'inattendu mis en valeur par deux billes de bronze qui ne m'inspirent que de l'apaisement. Park Jimin, tel est le nom du fiancé attribué à ma connaissance Lya. Je connais la richesse de la famille Park qui détient plusieurs chaines hôtelières, des restaurants et bon nombre d'immeubles et terrains dans le pays, mais je n'ai jamais eu la chance de côtoyer le fils héritier. Aujourd'hui, c'est chose faite. Les rumeurs disent de lui qu'il est silencieux, renfermé et se livre peu, comme paralysé par une méfiance des autres. Pourtant, l'homme qui me fait face partage un sourire radieux. Peut-être est-ce la seule chose qui me fait du bien dans ce lieu. 

— J'ai beaucoup entendu parler de toi, commente Jimin. 

Mon regard dérive sur DoHyung mais mon hypothèse est balayée par le jeune en chemise. Je constate qu'il est bien le seul à porter une tenue qui se veut décontractée, comme s'il savait que sa réputation ne s'arrêtait pas à des vêtements.

— Je ne suis pas un proche de Kim DoHyung. Je crois même que nos pères ne se sont jamais rencontrés. Je suis simplement l'un de tes followers sur les réseaux. Tu m'excuseras mais j'étais trop intimidé pour le faire sous mon vrai nom. 

La nouvelle me stupéfait aussi bien qu'elle m'étonne. Ayant dépassé le million de curieux qui suit mes faits et gestes, j'ai oublié de me demander qui se cachait derrière chaque image de profil. Et la crainte de m'être ridiculisée me fait rougir tandis qu'elle amuse mon interlocuteur. Les deux qui n'apprécient pas d'être écartés de la discussion nous le font bien savoir en redirigeant la conversation. 

— Les journaux annoncent une fusion de vos entreprises. Ca serait pour quand ? Se renseigne mon voisin de droite. 
— Dans un an si tout se passe bien. 
— Papa a promis que je serais à la tête d'une puissance internationale, jubile Lya. J'ai tellement hâte d'être invitée à des diners mondains ou de défiler sur les tapis rouges. J'ai déjà pris rendez-vous avec mes stylistes pour préparer ces événements. Je ne t'ai jamais croisé dans les grandes boutiques, Jiu. Pourtant tu n'arrêtes pas de partager tes collections et des photos de ton dressing. Je suis sûre qu'on pourrait s'entendre à merveille lors d'une sortie shopping.

Ce qu'elle ignore, c'est que mon compte est entretenu par les petites mains au service de Doona, à la recherche des dernières tendances et des coloris inspirant le rêve et la luxure. Je ne dois pas avoir déjà porté le dixième de mon armoire et préfère me sentir à l'aise dans une petite sélection de vêtements. Mais si Lya a cette vision de moi, cela doit en être de même pour Jimin qui semble apprécier un caractère qui n'est pas le mien. 

— Il ne faut pas croire tout ce que l'on montre sur les réseaux, malheureusement. Je suis plus heureuse à rester enfermée des heures avec un livre qu'à arpenter les vitrines. 
— Ah, réagit-elle déçue. Les bouquins, c'est... bien. Chacun son truc. Et toi, Jimin, qu'est-ce qui te plait ? Quels sont tes passe-temps ? Tu dois être un grand sportif ou un passionné de jeu de Go. 
— Pas vraiment, malheureusement. Je dois posséder la plus grande bibliothèque personnelle de tout Séoul, réplique-t-il avec un sourire de connivence. 
— Tu n'as pas vu la mienne, Park Jimin. Ne t'accorde pas cet honneur sans le savoir, réponds-je amusée. 
— Ma petite fiancée est un rat de bibliothèque, s'exclame DoHyung en plaçant son bras sur mon épaule pour marquer son territoire. Mais j'ai hâte de lui faire découvrir d'autres plaisirs.
— Retire tes sales pattes de mon corps, avant que je ne t'écrase les burnes. 

Lya s'offusque des termes employés tandis que DoHyung n'apprécie pas que je l'humilie publiquement en mettant à nouveau de la distance entre nous. Ce type se voile la face s'il pense que nous allons réellement échanger nos vœux. Je ne serai jamais sienne et chaque espoir que je lis en lui me motive à trouver une solution à ce bazar. 

— Et bien, ce n'étaient pas des salades quand on m'a dit que vous vous étiez disputés, commente doucement Lya. Heureusement qu'entre nous, tout va bien. Hein, Jimin chéri ? 

Je lis de la surprise devant le petit surnom donné mais son fiancé ne prend pas la peine de lui répondre. Tout ce qui concentre son intention est cet espace matérialisé entre mon agresseur et moi, qui ne m'assure pourtant aucun répit. 

— Vos pères ont fait la paix pour soutenir votre union. J'espère que tu sauras mettre ta rancune de côté pour tendre la main à ton fiancé, Jiu. Regarde, il a l'air si peiné de la façon dont tu lui as parlé. Présente-lui tes excuses, m'incite la dinde habillée en tailleur Chanel. 
— Cher DoHyung, je te prie de m'excuser si je t'ai laissé croire un seul instant que nous avions un avenir ensemble, répliqué-je avec force. 
— Bon... Ben c'est toujours pas ça. 
— Laisse tomber, Lya. Ma future femme aime un peu trop son indépendance et a oublié ce pour quoi nous avons vu le jour. Prendre la relève. Mais elle finira par céder. 

Sa menace est à peine voilée et Lya doit être la seule à ne pas la décrypter. Je ne sais pas comment il espère me convaincre mais en ayant éloigné Han et Hwasa de ma vie, je n'ai plus de point faible connu. 

— Ce n'est pas comme si nous n'étions pas préparées à ça depuis toutes petites, Jiu, me sermonne la partisane de l'antiféminisme. 
— Je ne pense pas que la bonne marche à suivre soit de forcer quelqu'un à agir contre sa volonté, intervient Jimin. Comme l'a dit l'hôtesse, le mariage est un contrat que l'on signe à deux et chacun doit y voir son intérêt. Peut-être que DoHyung n'a pas fait assez d'effort pour se montrer à la hauteur des attentes de Jiu. J'ai donc hâte de voir comment il va se rattraper vu la situation compliquée. S'il y parvient, bien entendu.

Lya ne fait que boire les paroles du plus bel homme de cet open space et celui-ci ne prête pas attention à la menace qui se dégage de celui qui n'apprécie pas cette absence de soutien masculin. Je suis étonnée de tomber sur un jeune homme peu pressé de se mettre un fils de député dans la poche, à moins qu'il ne cible mon amitié par rapport à mon père et ses chances d'être élu. 
Toujours est-il que je me méfie de cette main tendue et décide de ne plus participer à la conversation, jusqu'à ce qu'on nous annonce la fin de cette première approche et le dégourdissement de nos jambes dans le jardin croisé quelques étages plus bas.  

Bodyguard : Le Soldat et la PromiseWhere stories live. Discover now