Avril - 6

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(évocation de xénophobie et d'homophobie (dans le cadre de la famille) au cours d'un dialogue)


- Je te préviens, si tu ne te réveilles pas, je vais te tuer. Je vais vraiment te tuer.

J'ouvre les yeux sur cette délicieuse phrase, et je me fais à nouveau agresser par du blanc. Mais ce n'est pas le même que celui de ma chambre. Il est légèrement plus bleu.

Je tourne la tête, encore un peu engourdi par l'anesthésie. Mes iris tombent dans ceux de Miho, transformés en coulée de lave capable de lancer des éclairs. Je suis prêt à parier qu'il n'est pas spécialement heureux que je ne l'aie pas prévenu pour l'opération.

- J'arrive tranquillement après ma journée de cours, je réclame qu'on m'amène te voir et qu'est-ce qu'on me dit ? Que tu es en salle de réveil du service de chirurgie. J'ai offert ma plus belle grimace interloquée à cette pauvre infirmière, qui a dû se demander sur quelle personne elle est tombée. Envoyer un message, c'est trop compliqué ? Tu avais envie de maltraiter mon petit cœur ?

- Non, je ne voulais pas t'inquiéter et te mettre dans tous tes états. Et si ça peut te rassurer, je n'ai prévenu personne. Ma mère a même débarqué juste avant que je parte en chirurgie, totalement paniquée. L'hôpital lui a passé un coup de téléphone, cette bande de traîtres.

- C'est raté, espèce d'imbécile. Complètement raté.

Ses mains sont posées sur les miennes, sous les couvertures. On doit être discrets, parce que la salle de réveil n'est pas individuelle. Et vu ce qui nous est tombé dessus la dernière fois qu'on a été proche, on ne s'autorise rien d'autre.

- Miho... je ne suis pas mort, d'accord ? Il m'a mis une plaque dans le pied droit pour réparer ma fracture. Et l'autre a eu le droit à un plâtre et une immobilisation de minimum six semaines. D'ailleurs, tu avais raison. Je vais me déplacer en fauteuil. Toi et moi, on va être temporairement pareil.

Je ne veux surtout pas comparer nos cas. Moi, ce n'est que pour deux mois. Lui, pour toute la vie. Ce n'est absolument pas similaire.

- Je vais enfin pouvoir te battre dans une discipline physique, tu te rends compte ?

Il m'affiche son grand sourire et resserre nos doigts sous la couverture. Je me tais, lui montrant que j'attends qu'il continue.

- La course de fauteuil !

Il éclate de rire, et j'ai vite fait de le suivre. Pour une fois, c'est lui qui voit le verre à moitié plein. C'est vrai. On va pouvoir faire la course, comme lui et son grand-père pendant les vacances de Noël. Je nous imagine bien, sur le terrain de football. Surtout quand il pleut, d'ailleurs. Ça pourrait être fortement intéressant.

- Il y a quelque chose d'autre qu'on pourrait faire, continue le croate. Quelque chose que je ne pensais vraiment plus pouvoir faire avec toi, et qui m'excite soudainement.

Je rougis à grande vitesse, si bien que j'utilise ma main libre pour me cacher le visage. Bon sang, pourquoi est-ce qu'il me sort ça maintenant et avec du monde autour ? Ce genre de paroles doit rester dans la sphère privée. Dans la sphère très privée.

- Rio ? C'est quoi cette couleur faciale ? C'est évoquer le foot qui te met dans cet état ? Je suis désolé si ça t'a rappelé tes traumatismes. Je... je ne le ferais plus.

- Tu parles de foot ? Le truc qui t'excite soudainement, c'est le foot ?

- Bah oui, le foot en fauteuil ! Bon sang, mais à quoi tu pensais ? Pourquoi t'es écarlate comme ça ?

Ciel d'automne [BxB]Where stories live. Discover now