Ciel d'automne [BxB]

Janvier - 4

(mention de l'agression évoquée dans les chapitre précédents, mention de chantage)

Je souris. Depuis qu'il m'a crié au téléphone qu'il ressentait possiblement ça pour moi, je meurs d'envie de lui expliquer quelque chose. Mais les vacances sont arrivées, et je n'ai pas eu le temps.

- Facile. Je t'ai regardé droit dans les yeux, et j'ai su que j'étais tombé amoureux.

- C'est tout ?

Il parait déçu. Il n'a pas tout vu.

- Oui. Mais sinon, je peux aussi te raconter comment j'ai commencé à t'aimer. Ça, c'est encore plus intéressant.

- C'est quoi la différence ? J'pensais que c'était la même chose.

- Non. Pas pour moi. Et je vais t'expliquer pourquoi.

Il attrape une de mes mains et joue avec mes doigts, caressant le haut de ma paume. Je frissonne et je me mets à parler.

- Comme tu le sais, contrairement à toi, j'ai continué la physique et la chimie. Cette année, j'ai encore Monsieur Thomson. Et tout comme pour le chat de Schrödinger, il dévie très souvent du programme officiel pour nous expliquer des choses. Cette fois-ci, c'était en chimie, même si très franchement, je suis sûr qu'il y avait des relents de philosophie là-dedans. Donc, en soi, le fait de tomber amoureux, c'est de la chimie. Des réactions dans le cerveau, qui font que c'est ce qui se passe. Ça arrive assez rapidement et facilement et je suis presque certain que parfois, on ne s'en rend pas compte. Alors qu'aimer, pour moi, c'est une décision que l'on prend.

- Ouais, mais quand on parle des homosexuels, la plupart du temps, on entend que ce n'est pas un choix. Que c'est comme ça, un point c'est tout.

- C'est ça. Personnellement, je suis uniquement tombé amoureux de gars. Et tu es le premier que j'ai choisi d'aimer. Tu vois ce que je veux dire ?

- Oui. Donc, si je suis ta logique, je suis sans doute tombé amoureux de plusieurs filles, mais la seule que j'ai choisi d'aimer, c'est Caroline ?

- C'est exactement ça. Et du coup, ça t'intéresse que je te raconte la suite du voyage initiatique dans mon cœur ?

Je sais que je vais me faire un peu de mal. Rio est mon premier amour, mais je suis au courant que je ne suis pas le sien. J'ai assisté à toute l'histoire, au développement de leurs sentiments mutuels, et de la construction de leur couple. C'était affreusement douloureux, parce qu'à l'époque, je l'aimais déjà bien plus qu'un ami.

- Oui. Je suis tout ouïe.

Il s'allonge tout contre mes cuisses, et me demande si ça me dérange ou si j'ai mal. Je hoche négativement la tête et je souris. J'ai l'impression de me faire observer de toutes parts, mais cette position me permet de m'amuser avec ses cheveux. Ils sont doux, sans doute lavés d'aujourd'hui. Son savon sent le citron vert.

- Bon, je t'avoue que lorsque j'ai remarqué que je tombais amoureux de toi, ça m'a fait bizarre. Tu n'étais pas le premier garçon, mais tous les autres, je les ai ignorés bien royalement. Je me martelais que je n'étais pas gay, que les filles étaient ce qui me convenait. Je me suis simplement dit que c'est parce qu'on était proche que je ressentais ça, qu'on comptait l'un sur l'autre. Que je te considérais comme un frère. Sauf qu'en fait, des frères et sœurs, j'en ai, et les sentiments n'étaient pas les mêmes. J'étais au milieu de mon salon quand je m'en suis rendu compte. J'ai paniqué, je me suis enfermé dans ma chambre et j'ai regardé le plafond en me prenant la tête comme un sandwich.

J'imite cette étrange position et il éclate de rire. J'adore le voir heureux, et je reprends mes caresses. Ça n'a pas l'air de le déranger, même si ses joues sont rouges.