Février - 5

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> Hey Miho ! C'est Caroline. J'ai demandé ton numéro à ta sœur, parce que tu ne m'as finalement jamais envoyé de message, et j'ai besoin de ton aide sur quelqu...

Je ne parviens pas à lire la suite, mais ce que j'ai vu est largement suffisant.

Caroline.

La question est immédiate : est-ce ma Caroline ? Ma première petite-amie sérieuse, mon premier amour ? Que fait-elle en Irlande ? Aux dernières nouvelles, elle est au Canada. Il y a un moment, j'ai voulu la joindre, mais tous ses profils sur les réseaux sociaux avaient disparu. Plus aucune trace d'elle nulle part. Je me suis posé des questions, mais le seul moyen d'avoir des réponses était de monter dans un avion pour Ottawa, et mes finances sont très loin de me le permettre. J'ai donc ruminé ma déception, et j'ai fini par mettre cet épisode au fond de ma mémoire.

Heureusement pour moi et pour ma curiosité, j'entends du bruit dans le couloir. De peur, je lâche le téléphone et me cache sous le lit - parce que ça ne pourrait ne pas être Miho, et personne ne sait que je suis là. Je vois le bout des roues, et je commence à sortir. Mais comme il m'arrive d'être maladroit, je me cogne contre le bois, et je hurle très légèrement. On se fixe mutuellement, les dents serrées. Pris d'un élan de je ne sais quoi, je vais me planquer derrière la porte. Juste à temps, parce que celle-ci s'ouvre sur le père de mon petit-ami.

- Tout va bien, Mihovac ? Rien de cassé ?

- Je me suis coincé le doigt dans ma roue. Je vais aller le passer à l'eau et ça ira mieux. Désolé, je suis incroyablement maladroit lorsque je m'y mets.

Nos yeux se croisent quelques secondes, et je suis certain que si ses iris pouvaient lancer des éclairs, je ne serais plus qu'un tas de cendre au sol. J'ai manqué de nous faire repérer.

- D'accord. Fais plus attention la prochaine fois, tu nous as fait peur.

- Pas de problème !

La porte se referme et je respire nettement mieux. J'ai toujours les dents serrées, et je m'excuse platement auprès du croate.

- Tu m'as foutu une trouille bleue ! Sérieux, n'essaie plus de te cacher sous le lit, tu es trop grand pour ça. Et ce n'est pas discret, je t'ai tout de suite repéré.

- Désolé, encore une fois. C'est juste que... j'ai été surpris par le bruit.

Et puis j'étais plongé dans mes pensées parce que je viens juste de voir un message sur ton téléphone, qui m'a renvoyé quelques années en arrière, et qui ne me plaît pas beaucoup. Mais bien entendu, il vaut mieux éviter de dire ça, ou je risque de passer pour un fouineur.

Miho se réinstalle sur le lit, et frappe la place à côté de lui. Il me demande d'attraper son ordinateur portable sur le bureau, et je devine que nous allons regarder un film. J'aurais préféré aller me laver avant de me coucher, parce que je me connais. Je risque de m'endormir comme une souche, et ne pas me réveiller avant le lendemain. Sauf que le jeune homme ne semble pas de cet avis, et navigue rapidement dans son incroyable collection filmographique. Mes yeux s'arrêtent sur mon préféré, comme d'habitude. Même si je le regarde plusieurs fois par mois, je ne me lasserais jamais de Forest Gump.

Le plus drôle et le plus étrange là-dedans, c'est que je suis incapable d'expliquer comment cet amour indescriptible a commencé. Cette œuvre est plus vieille que moi, et je ne l'ai vue qu'à mes quatorze ans, pas plus tôt. Mais à mon goût, c'est un chef-d'œuvre. C'est plein d'espoir sur la vie, et même si la fin est mélancolique, elle n'est pas triste. Parce que Forest n'est pas tout seul. Il a son fils. Je crois aussi que je l'aime énormément à cause de la relation qu'a le héros avec sa mère. Fusionnelle, comme avec la mienne. Enfin, jusqu'à maintenant.

Ciel d'automne [BxB]Where stories live. Discover now